L’Abandon de l’Aide Médicale d’Etat … une grave erreur ?

En 2022, les recettes de la branche maladie de la Sécurité Sociale proviennent de 11,3 millions de cotisants. Les caisses primaires d’assurance maladie de la Sécurité Nociale ont décaissé 221,6 milliards d’euros nets qui se répartissent à 43 % dans la médecine de ville, 40 % les établissements de santé (hôpitaux, dispensaires…), les, 17 % restants se répartissent dans d’autres domaines, dont les charges de fonctionnement, l’aide médicale d’état ou les fonds d’intervention régionales. Ces chiffres sont en provenance directe du gouvernement (consultables sur https://www.securite-sociale.fr/files/live/sites/SSFR/files/medias/DSS/2023/Chiffres%20cles%20de%20la%20DSS%202022.pdf)

Dr Mathilde Chouquet, vice-présidente de l’association ReAGJIR – DR

En zoomant, notamment au regard du récent débat sur le budget de la sécurité sociale mêlé bien opportunément à celui sur l’immigration (on se demande en quoi ils sont liés), on se rend compte que l’Aide Médicale d’Etat, que la candidate RN aux dernières élections présidentielles considérait comme “injuste à l’égard d’un tiers des Français qui n’arrive pas à se soigner” (source : BFMTV-RMC interview face à Jean-Jacques Bourdin, 12 Janvier 2022)” coûte entre 0,7 et 1 milliard d’euro au budget de l’état (source : institut Montaigne) et concerne moins de 400.000 personnes en France.

C’est au Dr Mathilde Chouquet, établie à Rennes en Ille-et-Vilaine et vice-présidente de l’association ReAGJIR (Regroupement Autonome des Généralistes Jeunes Installés et Remplaçants) que j’ai demandé des éclaircissements sur cette mesure, après que l’association ait communiqué sur le remplacement de l’AME par l’AMU, qu’elle considère telle “la perte d’un le moyen donné aux professionnels de santé de poursuivre leur devoir déontologique: prendre soin de tous, sans distinction”.

La structure est particulièrement sensibilisée à la question de l’AME. En effet, dans le désert médical qui commence à s’étendre dans toutes les régions de France, les jeunes médecins sont ceux qui prennent en charge, en premier, les personnes dans les plus grandes souffrances. Y compris, donc, ces “sans-papiers” comme on les nomme pudiquement, mais qui ont néanmoins eu maille à partir avec les paperasses des CPAM pour bénéficier de cette aide.

Contrairement au fantasme largement répandu” commence la vice-présidente “le bénéfice de cette aide médicale d’état n’est ni automatique, ni systématique. Moins de 50 % des patients qui pourraient bénéficier de cette aide en font la demande; pour de multiples raisons, qu’il s’agisse de méconnaissance ou de difficultés linguistiques.

Il faut dire que les conditions d’octroi de cette aide sont particulièrement exigeantes : 

  • Ne disposer d’aucun titre de séjour régulier en France
  • Percevoir moins de 800 € par mois (sauf pour les mineurs)
  • Ne pas avoir être demandeur d’asile (un autre dispositif existe dans ce cas)
  • Renouveler chaque année la demande d’AME, qui peut être refusée
  • Nécessiter des soins qui ne font pas partie de la liste établie par l’Article R251-3 du Code de l’action sociale et des familles.

En d’autres termes … être en bonne santé au moment de la demande !

L’association ReAGFIR millite activement pour un accès égal aux soins pour toutes et tous – DR

Souvent” poursuit le médecin “les personnes exilées ne sont pas en excellente santé eu égard à leur parcours. Les pathologies les plus courantes sont des psychotraumatismes liés d’une part au parcours migratoire, d’autre part à ce qui au vécu qui a donné naissance à ce parcours. Sur l’ensemble de la population migrant dans notre pays, ce sont environ 10 % qui le font pour des motifs médicaux. Et sur ce – faible – pourcentage, seuls 66 % bénéficient de l’aide médicale d’état. »

L’étude de l’IRDES de décembre 2023 (https://www.irdes.fr/recherche/questions-d-economie-de-la-sante/284-une-analyse-des-consommations-de-soins-de-ville-des-personnes-couvertes-par-l-aide-medicale-de-l-etat.pdf) est particulièrement révélatrice d’une situation dans laquelle les malades dépositaires de cette aide ne sont pas de surconsommateurs de soins ni de médicaments. La fameuse “Carte vitale qui fait le tour du foyer SONACOTRA” est purement et simplement un mensonge. En 2018, le bénéficiaire de l’AME a “coûté” en moyenne 1.138,8 € là où le bénéficiaire de la Complémentaire santé solidaire non contributive (CSS-NC) a fait dépenser 1.219,1 € au budget de la France. Soit un total, pour l’année 2022, d’environ 1.2 Milliards d’Euros, sur un budget, rappelons-le, de 221,6 milliards d’euros. C’est donc environ 0,5 % du budget de la sécurité sociale universelle qui est consacrée à celles et ceux qui, après avoir fui guerres, famines, persécutions et tortures sont venus trouver refuge en France.

Le passage d’une aide médicale d’état à une aide médicale d’urgence restreindra les possibilités à ces patients de bénéficier d’un suivi médical absolument nécessaire à la mise sur pied d’une démarche de santé globale”. D’autant que rien dans le projet de loi ne prévoit que les consultations de médecine générale ne soient couvertes. “C’est un service minimum de santé qui est mis en place, foulant du pied le principe égalitaire d’accès aux soins et cantonnant celles et ceux qui n’ont pas ce bénéfice aux urgences des hôpitaux, déjà saturées” poursuit le Dr Mathilde Chouquet.

Dit plus simplement, les consultations pour des pathologies bénignes ne seront plus prises en charge, ce sont donc autant de foyers d’infections qui vont s’installer dans les conditions de salubrité déjà déplorables qui font le lit des personnes exilées en France.

Le message passé est fortement négatif” poursuit le Docteur “Pour les gens pauvres même Français qui pourraient eux aussi se voir, à terme, embarqués dans la lame de fond que constituerait ce passage de l’AME à l’AMU.

Que faire alors ? D’abord, ne pas céder aux sirènes des économies faciles, car c’est de cela qu’il s’agit. Ensuite, contacter nos députés pour leur rappeler les principes de Léon Blum et de 1936 puis ceux du Conseil national de la Résistance de créer un pays fait de solidarités et de bienveillance, pour toutes et tous.

Vous avez dit médecine à deux vitesses ?

Italie : « Femme, mère et chrétienne » Giorgia Meloni est-elle anti féministe ?

Dimanche 25 septembre 2022, le parti d’extrême droite Fratelli d’Italia, dirigé par Giorgia Meloni, est arrivé en tête des élections législatives qui ont eu lieu en Italie.

Âgée de 45 ans, la femme politique conservatrice qui se présente comme « femme, mère et chrétienne » met au cœur de son programme électoral Risollevare l’Italia (Redresser l’Italie), le soutien à la natalité et à la famille.

Qu’est-ce que la famille pour cette extrême droite postmoderne qui réaffirme la valeur de la triade traditionnelle Dieu, Patrie et Famille?

Avec un mélange de valeurs religieuses et laïques, le modèle familial reproposé est celui considéré comme «naturel», fondé sur le mariage hétérosexuel et la division rigide des rôles masculins et féminins, dans lequel les femmes garantissent l’«économie du don», un travail de soin non rémunéré et non reconnu dans une société organisée selon les principes de la hiérarchie des classes et des sexes, de l’individualisme compétitif et du profit individuel.

Le droit à l’avortement menacé en Italie ?

Plus encore qu’une opposition à l’avortement, Giorgia Meloni incarne cette droite dure et nationaliste qui veut renforcer la natalité et qui craint le déclin de la population face à une arrivée d’immigrés.
Il faut que les femmes fassent des enfants et il en va de la survie du pays, clame en résumé Fratelli d’Italia : « La population italienne est en déclin. Je ne dis pas que les étrangers ne devraient pas avoir d’enfants mais nous devons créer les conditions pour que les Italiens se reproduisent », déclarait récemment Carlo Ciccioli, un des leaders du parti.
Toutefois, la candidate d’extrême droite et favorite des sondages a déclaré qu’elle souhaitait protéger la maternité et trouver des solutions pour permettre aux femmes de ne pas avorter. Giorgia Meloni veut limiter le recours à l’IVG. « Nous ne toucherons pas à la loi sur l’avortement, nous voulons juste que (les femmes) sachent qu’il y a d’autres options », a t’elle déclaré.

La France sera « attentive » au « respect » des droits humains et du droit à l’avortement en Italie, a affirmé lundi matin Élisabeth Borne. La Première ministre réagissait après la victoire du parti post-fasciste de Giorgia Meloni dimanche lors des élections législatives italiennes.

Au delà de la question de l’avortement, la communauté LGBT craint elle aussi de voir ses droits limités, au nom des valeurs familiales chrétiennes défendues par Giorgia Meloni.

Lors de rassemblements politiques, Giorgia Meloni a farouchement dénoncé ce qu’elle appelle « l’idéologie du genre » et « le lobby LGBT ».

L’éducation des enfants par des personnes du même sexe n’est pas normale, a suggéré un membre important du parti d’extrême droite qui devrait remporter les élections italiennes dimanche, jetant un nouveau coup de projecteur sur son programme socialement conservateur.

Les remarques de Federico Mollicone, porte-parole de la culture pour les Frères d’Italie (FdI) de Giorgia Meloni, ont déclenché l’indignation des opposants politiques et des médias sociaux alors que Meloni semble sur le point de devenir la première femme Premier ministre d’Italie.

Giorgia Meloni n’est certainement pas une icône féministe: il y avait une certaine ironie dans sa remarque, adressée à ses adversaires de la gauche réformiste, sur le fait que, si pour la première fois l’Italie avait une femme à la tête du gouvernement, il y aurait là une rupture du «plafond de verre».

Selon Paolo Berizzi, journaliste au quotidien italien La Repubblica, la région des Marches a servi de laboratoire pour les politiques de l’extrême droite. « Ils ont expérimenté à l’échelle locale un modèle qu’ils se préparent à reproduire au niveau national« , analyse le journaliste, spécialiste de l’extrême droite en Italie.

« Cela implique de revenir sur certains droits, d’introduire des politiques adaptées aux familles traditionnelles et de faire campagne contre l’avortement. C’est une voie qui est anti-progressiste, qui s’oppose à la modernité et au principe de l’égalité des droits pour tous, dans laquelle les hommes et les femmes se voient attribuer des rôles spécifiques« .

Zarifa Ghafari, plus jeune maire Afghane sort son autobiographie et un documentaire Netflix

Zarifa Ghafari est afghane. Elle avait trois ans quand les talibans ont interdit aux filles d’aller à l’école, six lorsque les frappes aériennes américaines ont débuté. Autrice et femme politique, Zarifa a obtenu le Prix international de la femme de courage 2020, le Prix Nord-Sud 2021 du Conseil de l’Europe, ainsi que le Prix international des droits de la femme 2022 du Sommet de Genève.

À vingt-six ans, elle est devenue la première maire de la province de Wardak, l’une des plus conservatrices d’Afghanistan. Les extrémistes ont barré l’accès à son bureau, ont tenté de la tuer trois fois. Malgré cela, Zarifa a tenu bon. Elle a lutté contre la corruption, œuvré pour la paix et tenté d’éduquer les femmes. Mais à l’arrivée des talibans à Kaboul en 2021, et après l’assassinat de son père, elle a dû fuir en Europe. Elle continue pourtant d’aider celles qui vivent sous le règne des talibans. Les récompenses internationales ont salué son engagement.
Elle a ainsi obtenu le Prix international de la femme de courage 2020, le Prix Nord-Sud 2021 du Conseil de l’Europe, ainsi que le Prix international des droits de la femme 2022 du Sommet de Genève.

Aujourd’hui réfugiée en Allemagne, l’opposante déterminée aux talibans, vit désormais en exil. Le 14 septembre, elle publie son autobiographie aux éditions JC Lattès, suivi d’un documentaire « Dans ses mains » dont la sortie est prévue en novembre sur Netflix.

Son témoignage offre un éclairage sans précédent sur les deux dernières décennies en Afghanistan, à travers le regard d’une citoyenne, femme et maire. Il incarne la résistance des Afghanes face à l’obscurantisme.

« Dans ses mains » aura sa première mondiale au Festival international du film de Toronto 2022 le 9 septembre.

Le documentaire raconte l’histoire de Zarifa Ghafari, qui est devenue à 26 ans l’une des premières femmes maires d’Afghanistan et la plus jeune à occuper ce poste.

Tourné pendant deux années turbulentes, le film documente sa bataille personnelle pour la survie alors que son pays se défait au milieu du retrait rapide des forces occidentales et du retour au pouvoir des talibans. Face à cette nouvelle réalité, Zarifa doit prendre la décision la plus difficile de sa vie.

« « Dans ses mains » est un travail extraordinaire de narration personnelle qui nous offre un aperçu rare et une réelle compréhension de ce à quoi les femmes afghanes ont été confrontées ces dernières années », ont déclaré Hillary Rodham Clinton et Chelsea Clinton, qui ont produit le film via HiddenLight. « Lorsque nous avons entendu parler de ce projet pour la première fois, nous avons dû nous impliquer. Nous croyons que les filles et les femmes – et les hommes et les garçons – partout dans le monde seront inspirés par le travail acharné, l’intelligence et la pure détermination de Zarifa Ghafari. »

Site officiel Zarifa Ghafari

Yaël Braun-Pivet devient la première femme élue à la présidence de l’Assemblée nationale

C’est historique ! Le 28 juin 2022, Yaël Braun-Pivet est arrivée en tête du premier tour de l’élection pour la présidence de l’Assemblée nationale, avec 238 voix. Elle devient la première femme à accéder au perchoir.

La députée des Yvelines succède à Richard Ferrand et marque l’Histoire de la politique française en féminisant la présidence de l’institution.

Éphémère ministre des Outre-mer, Yaël Braun-Pivet a quitté ces fonctions pour être candidate de la majorité à la présidence de l’Assemblée nationale.

L’avocate de 51 ans et mère de cinq enfants, vient d’être élue présidente de l’Assemblée nationale. Elle est la première femme à accéder à cette fonction prestigieuse, devenant ainsi le quatrième personnage de l’État. « Enfin ! Pour la première fois de son histoire, l’Assemblée nationale sera présidée par une femme », venait de la féliciter M. Véran sur Twitter, avant l’annonce officielle du résultat.

Députée depuis seulement cinq ans, Yaël Braun-Pivet a commencé sa carrière d’avocate en droit pénal au barreau de Paris, avant de rejoindre celui des Hauts-de-Seine. Elle avait mis sa vocation entre parenthèses pour suivre son mari, cadre chez L’Oréal, sept ans à Taïwan et au Japon, et élever leurs cinq enfants.

Militante associative, elle lance le réseau « accès à la justice » et assure des permanences juridiques gratuites en 2014. Elle rejoint par la suite Les Restos du cœur par « souhait d’être utile » et dirige bénévolement l’antenne de Chanteloup-les-Vignes en 2015, avant de superviser la création du centre d’accueil de Sartrouville, dans lequel elle dirige une centaine de bénévoles. Elle quitte la vie associative lorsqu’elle se lance en politique en 2017, après avoir adhéré à « En Marche » fin 2016.

L’engagement politique de Yaël Braun-Pivet a débuté du côté du Parti socialiste, au début des années 2000. Novice, on pointe son « amateurisme ». Son poste est exposé et suscite des critiques, certains pensent même qu’elle l’a obtenu pour que la parité soit respectée. « J’ai déjà connu ces procès en incompétence pendant la campagne. Mais je me sens légitime à ma place », répond-t-elle à L’Obs.

Karine Jean-pierre, la nouvelle porte-parole de la maison blanche au parcours hors du commun

Karine Jean-Pierre, née le 13 août 1977 à Fort-de-France, est « tout ce que Trump déteste » comme elle s’amusait à le dire il y a quelques mois. Femme, mère, noire et ouvertement homosexuelle, le président américain, Joe Biden, a annoncé, jeudi 5 mai, avoir choisi Karine Jean-Pierre pour remplacer Jen Psaki au porte-parolat de la Maison Blanche.

C’est la première fois que ce poste très exposé est attribué à une femme noire.

Et pas n’importe quelle femme ! La nouvelle porte-parole aujourd’hui âgée de 44 ans, est francophone. Et pour cause : elle est née à Fort-de-France, en Martinique, de parents haïtiens qui avaient fui la dictature de Duvalier. Toute petite, elle vit ensuite quelque temps à Paris, avant que ses parents ne s’installent à New-York dans le quartier du Queens. Son père devient alors chauffeur de taxi (il y a beaucoup de Haïtiens chauffeurs de taxi à New-York) et sa mère aide-soignante.

Press Secretary Jen Psaki introduces incoming Press Secretary Karine Jean-Pierre as the first Black and out LGBTQ person to hold the position in the Briefing Room at the White House in Washington, DC on Thursday, May 5, 2022.

S’ensuit un parcours fulgurant et une sucess story dont sont friands les américains. Diplômée de la prestigieuse université Columbia avant de s’engager dans le monde associatif et politique, la nouvelle porte-parole de la Maison Blanche milite pour faire tomber les préjugés en matière de santé mentale dont elle a souffert : une dépression et tentative de suicide dont elle sortira renforcée.

En 2008, Karine Jean-Pierre n’a alors que 30 ans et elle s’engage dans la primaire démocrate aux côtés de l’un des candidats, John Edwards. Barack Obama remporte la primaire. Karine Jean-Pierre rejoint son équipe de campagne. La fille d’immigrés haïtiens sera également de la campagne 2012, celle de la réélection d’Obama. Elle devient ensuite chargée de cours à l’université Columbia, là où elle avait étudié, puis s’engage dans des associations de défense des droits.

Karine Jean-Pierre et son épouse la journaliste politique Suzanne Malveaux

Le vendredi 13 mai, elle s’installera derrière l’iconique pupitre de la « Briefing Room » de la Maison-Blanche où elle aura à répondre aux questions des médias américains et internationaux.

Sa sucess story, elle l’a dédié aux jeunes femmes et hommes à travers un message rapporté par l’AFP : « Si vous travaillez très dur pour un objectif, cela arrivera. Oui, vous subirez aussi des coups durs, vous traverserez des moments difficiles et cela ne sera pas toujours facile mais la récompense sera incroyable, surtout si vous restez fidèles à ce que vous êtes. »

Cette nomination intervient alors que les États-Unis se trouvent actuellement secoués par une vague conservatrice qui entend remettre en cause le droit à l’avortement des femmes. Tout un symbole !

Femme(s) et élections présidentielles, le vote est-il genré ?

Dans une pré-campagne souvent marquée par une concurrence entre hommes et femmes au sein de chaque camp et une féminisation du scrutin, existe-t-il toujours un vote dit « féminin » ? C’est l’objet de l’enquête de l’institut de sondage IPSOS, commandée par LCI, menée auprès d’un échantillon de 1 441 femmes inscrites sur les listes électorales, du 25 février au 4 mars 2022. Éléments de réponse…

Est-ce qu’une candidate femme va davantage attirer le vote féminin qu’un homme ? L’étude révèle que Valérie Pécresse est la candidate la plus citée quand il est question du candidat le plus crédible dans la lutte contre le sexisme (29%) devant Marine Le Pen (27%) puis Emmanuel Macron (22%).

A ce titre, les femmes expriment majoritairement le souhait qu’une femme remporte l’élection présidentielle (71%).

Pour autant seul un peu plus d’une Française sur trois pense qu’une femme remportera l’élection à l’issue du second tour (32%). Un pronostic en concordance avec les dernières intentions de vote dans lesquelles aucune femme n’est donnée victorieuse face à Emmanuel Macron dans les différentes hypothèses de second tour. Sur ce point, le vote des femmes rejoint celui des hommes, à noter que face au Président sortant, Valérie Pécresse en particulier ne bénéficie pas d’une forme de « prime » à la féminité puisque les femmes sont moins nombreuses à avoir l’intention de voter pour elle que les hommes (37% contre 43%).

© auremar/123RF

De plus, les intentions de vote diffèrent légèrement entre les femmes interrogées et les hommes notamment en ce qui concerne les poursuivants d’Emmanuel Macron. Quand 13% des hommes voteraient pour Jean-Luc Mélenchon, 10% des femmes en disent autant. De même pour Marine Le Pen, plus plébiscitée par les femmes (18%) que par les hommes (15%) alors que la candidature d’Eric Zemmour rencontre toujours une certaine résistance des femmes (11% ont l’intention de vote pour lui contre 13% des hommes). Cela traduit la persistance d’un radical right gender gap identifié depuis le début de cette élection présidentielle.

A noter toutefois, que les femmes se considèrent, à ce jour, comme étant moins certaines de leur choix (68%) que les hommes (77%), ce qui en fait donc un électorat plus volatile pouvant influencer des évolutions de tendances futures.

Un renouvellement générationnel

En ce qui concerne les préoccupations des femmes pour l’élection, la santé est le sujet le plus déterminant dans leur vote (83%), c’est davantage que pour l’ensemble des Français (74%). La question du pouvoir d’achat (74%) et de la lutte contre le terrorisme (74%) viennent ensuite dans des dimensions comparables à celle de l’ensemble de la population française. En revanche, la défense du droit des femmes et la lutte contre le sexisme n’apparaissent pas comme prioritaires chez les femmes (54%) mais donnent à voir des clivages politiques et générationnels.

En effet, les sympathisantes du Parti Socialiste et d’Europe Ecologique Les Verts sont plus nombreuses à citer cet enjeu comme « déterminant » (66%) que celles des partis de droite (43% pour les partisanes de la majorité présidentielle et Les Républicains, 50% pour celles de Reconquête). De plus, les femmes les plus jeunes s’avèrent nettement plus préoccuper par cette question : 71% des 18-24 ans la jugent déterminante contre 53% des 35 ans et plus.

En 2022, l’Elysée accueillera-t-il (enfin) une femme ?

Caroline Stevan – L’histoire du droit de vote des femmes, un combat féministe

Féminisme et droit d’expression des femmes sont intimement liés. Il ne peut exister le second sans le premier. C’est à cet état des lieux que nous invite la journaliste Caroline Stefan avec le livre « Citoyennes ! Il était une fois le droit de vote » paru aux éditions Helvetiq.

En 2022, les femmes disposent, au même titre que leurs alter ego, du droit de vote. Mais ce droit n’a pas toujours été un acquis, à l’instar de l’ensemble des possibilités offertes aujourd’hui sans distinction de sexe. Féminisme, politique et droit à l’expression se mêlent dans cet ouvrage passionnant. Les illustrations qu’il contient à la manière de « Tomtom et Nana » (Message aux plus jeunes : « pas le GPS, la bande dessinée« ) rendent « Citoyennes ! Il était une fois le droit de vote » accessible aux citoyen.ne.s autant qu’à celles et ceux qui le deviendront demain.

Illustration de la vie d'une famille et de l'injuste répartition des tâches ménagères
Les tâches ménagères réparties le sont-elles réellement en tant que charges ?

Le Livre de Caroline Stevan, “Citoyennes ! Il était une fois le droit de vote » aux éditions Helvetiq se lit à la fois comme un ouvrage d’histoire, de politique, de fiction et de projection. L’ensemble des grandes figures féminines de la politique et de l’accès des femmes à la gestion de l’Etat est rappelé de manière ludique mais précise. Ceci sans parti pris ni militantisme, tel que l’histoire le dit, tels que les faits se sont déroulés.

Qui êtes-vous Caroline Stevan ?

Je suis une journaliste Franco Suisse. J’ai passé l’essentiel de ma carrière à travailler pour le journal “le temps” puis j’ai rejoint la RTS (Radio publique Suisse) il y a 2 ans.

Xaroline Stevan, autrice et journaliste
Caroline Stevan, autrice et journaliste – DR

Depuis le premier confinement, je travaille pour le point J, dans lequel on pose une question chaque jour en relation avec l’actualité. Par exemple “pourquoi autant de prêtres pédocriminels ? –  Peut-on tout guérir avec l’hypnose ? “.  Chaque épisode dure 10-12 minutes en format podcast. Beaucoup d’invité(e)s pour alimenter ce point J. En fin de podcast, une deuxième voix intervient, un témoignage ou un point de vue dissonant.

Le 14 juin 2019 a eu lieu la grève des femmes. J’ai eu la sensation que cette journée ferait date dans les luttes féministes.

Caroline Stevan

Le 14 juin 2019, en suisse, a eu lieu la grève des femmes. Des centaines de milliers de femmes dans les rues Suisse, une marée violette a envahi les avenues. J’y étais en famille avec mes 2 filles et leur papa, j’ai eu la sensation que cette journée ferait date dans les luttes féministes. Je voulais que les enfants puissent prendre conscience du fait qu’il y a eu du chemin pour que les femmes puissent voter, parler et s’exprimer.

Mes deux filles, âgées de 8 et 12 ans, ne sont pas encore en âge de voter. Ce qui n’empêche aucunement d’avoir une conscience !

Sortir du regard très européen sur notre droit de voter

L’idée directrice de ce livre était de sortir du regard européen sur le droit de voter – de s’exprimer – dont disposent les femmes. D’autant que 2021 marquait le cinquantenaire du droit de vote des femmes en Suisse.

Le livre s’ouvre sur le portrait de 10 militantes du droit de vote des femmes, toutes de différentes cultures.

Où en est en 2022 le droit de vote des femmes ?

Partout dans le monde où les hommes votent, les femmes votent. Deux exceptions notables : le Bruneï et le Vatican. Au Vatican les choses évoluent, une femme a été nommée à la conférence des évêques et a le droit au chapitre.

Quant à l’égalité d’accès au vote, les femmes et les hommes ne sont pas empêchés de voter partout ailleurs. Par contre, c’est un aspect important qui ne signifie pas nécessairement une égalité en politique. Il y a bien moins de femmes que d’hommes aux postes de pouvoir. Et celles qui le sont ne sont jamais rattachées à des ministères régaliens. Au-delà de ces chiffres, il faut voir la manière dont les femmes sont considérées (uniquement le prénom de la femme et le nom de l’homme). A l’époque, on a bien plus décrit les vêtements de Ségolène Royal que ceux de Nicolas Sarkozy, par exemple.

Quelles ont été les difficultés majeures à obtenir le droit à voter ?

Les luttes sont convergentes et ne couvraient jamais qu’un seul sujet. Les femmes qui se sont battues pour pouvoir voter réclamaient souvent d’autres choses, lutte contre l’esclavage, pour l’indépendance… Beaucoup des opposants avaient finalement peur que les femmes qui iraient voter délaissent leur statut de femme et les tâches qui leur incombent historiquement (cuisine, foyer, ménage, enfants…). Ce sont des sujets sous-jacents à cette quête du droit de vote.

A l’époque des grands combats, les femmes demandaient à avoir accès à la sphère publique. Elles voulaient avoir une place publique dans la société. Aujourd’hui, même si la place faite aux femmes n’est pas parfaite, il n’y a plus de remise en cause des possibilités notamment politiques données aux femmes. Par contre, et c’est là un frein important à la féminisation de la fonction politique, les femmes ont toujours la politique en plus du reste. La famille (gestion du foyer, des enfants…) est vue comme un frein pour les femmes qui veulent entrer en politique.

La première ministre Néo-Zélandaise a été enceinte pendant son mandat.

Certains – autant d’hommes que de femmes – ont questionné la compatibilité d’une vie de famille avec sa fonction. Elle s’est insurgée qu’on ne pose pas cette question aux hommes.

Quel est le prochain combat des femmes ?

L’obtention d’une pure égalité de traitement entre les Hommes & Femmes

Quel est l’impact de certaines prises de position radicales de féministes sur le message féministe en lui-même ?

Certains comportements ou certaines manières de porter la lutte peuvent crisper. Et partout où il y a crispation, il y a tension et rupture du dialogue. Prenons l’exemple de l’écriture inclusive, qui me semble pourtant quelque chose d’anodin. On doit faire avec les hommes, pas contre. Pour qu’une question féministe avance, elle doit embarquer les hommes avec les femmes. Être féministe ce n’est pas être contre les hommes.

Etre féministe ce n’est pas être contre les hommes.

Caroline Stevan

En écrivant ce livre, je me suis aperçu que la gentillesse, la bienveillance ou la modération ne fonctionnent pas toujours. Les suffragettes, au Royaume Uni, ont compris très tôt que cela ne marchait pas et qu’il fallait aller vers plus de radicalité. Leurs méthodes, provocantes et parfois violentes, ont été efficaces. Il peut falloir passer par du plus dur. Il faut se poser la question de ce qui est ou n’est pas radical selon l’air du temps. La radicalité doit toujours se mesurer à l’aune d’une situation immédiate.

Enfin, il ne faut pas mettre toutes les féministes dans le même panier, il peut y avoir des crispations différentes. Il y a autant de féminisme qu’il y a de féministes.

En cette année présidentielle, croyez-vous en la possibilité d’une Présidente de la République en France ?

J’espère qu’on est prêts. La société a évolué et il y a toujours des femmes candidates. On va vers ce chemin-là.

En Suisse, nous avons trois conseillères fédérales qui sont présidentes à tour de rôle. Donc, dans la confédération, nous allons avoir une femme présidente.

Et, pour un pays conservateur comme le mien, c’est un très bon signe !

Pour la France, la question n’est pas « va-t-on y arriver ? ” mais “quand va-t-on y arriver ?”.

Pour autant, d’Edith Brunschvicg à Nadia Jai, les femmes sont à des postes de responsabilité. Qu’est ce qui bloque cette avancée ?

On va cantonner les femmes à des postes “moins valorisants” (secrétaire d’État, conseiller, ministère rattaché…). Même ministres, elles vont être systématiquement positionnées sur des fonctions perçues comme plus féminines.

Il existe aussi un phénomène de cooptation, on promeut ses semblables, les hommes soutiennent les hommes.

Il faut aussi changer le regard des électeurs et des électrices sur ce que sont certaines fonctions ministérielles. Il n’est pas plus féminin d’être à la culture ou à la santé qu’être à l’économie ou la défense !

Il faut aussi changer le regard des électeurs sur ce que sont certaines fonctions ministérielles. Il n’est pas plus féminin d’être à la culture ou à la santé qu’être à l’économie ou la défense !

Caroline Stevan

Les choses se jouent sur le terrain pour le concret et dans les esprits pour la représentation.

Quel accueil a reçu votre livre ?

Un excellent accueil ! Je suis ravie, j’ai eu quelques séances de dédicaces qui ont fini trop tôt. Le public était très varié (femmes plus âgées en suisse, jeunes filles très militantes, des papas, des familles…).

Au début du livre, j’imagine une scène dans laquelle un enseignant définit la règle de vie. Les garçons ont tous les droits dans l’école, les filles n’ont aucun droit. Une sorte de métaphore d’une société dans laquelle les femmes ne pouvaient pas voter.

Une enseignante qui a lu mon livre a rejoué la scène dans son établissement. Pendant une semaine elle a favorisé les filles (filles assises avant les gars, encouragements, bonbons en cas de bons résultats…)

La semaine suivante, elle a inversé les rôles.

Après ces 2 semaines d’expérience, les enfants ont bien compris la métaphore. Lorsqu’ils étaient dans le groupe défavorisé, c’était difficile et ils s’en sont plaints. C’est lorsqu’ils seront, les unes comme les autres, devenu(e)s citoyens qu’il faudrait analyser leurs comportements.

L’éducation (scolaire, familiale, culturelle, environnementale…) est une clef majeure dans l’évolution des choses.

Quels espoirs pour le féminisme ?

Je termine le livre en souhaitant qu’il disparaisse. Il joue sur deux terrains. De grosses luttes et des chantiers concrets (égalité salariale par exemple) sont en cours.

Puis une couche très insidieuse, de l’ordre de la culture et des stéréotypes, a fait son apparition qui recrée les stéréotypes. Par exemple, les Lego « Friends » (que le packaging destine plus aux filles qu’aux garçons) sont plus faciles à assembler que ceux des garçons et mettent en scène de jolies maisons avec des spas.

Dans les années soixante-dix / quatre-vingt, sur les publicités Lego, les filles et les garçons assemblaient une fusée et le slogan disait : « Les enfants construisent l’avenir !« .

On est ici sur des choses qui peuvent sembler des détails, sur des photos dans les catalogues de jouets de Noël par exemple mais en réalité, on recrée du sexisme dans de nombreux domaines.

Je veux un féminisme de fond, un éveil des consciences. Il faut dresser un constat de tous ces « détails » mis bout à bout. Travailler sur ces “détails” beaucoup plus pernicieux. C’est un travail bien plus long et moins visible.

Je veux un féminisme de fond, éveil des consciences.

Caroline Stevan

Et, à chaque « entorse », il faut dénoncer aux institutions. Les hot-lines, numéros verts, saisines… Existent et doivent être, par la force des choses, déplacées vers ces nouveaux terrains de féminisme.

En Suisse, les “bureaux de l’égalité” tiennent une veille et sont à l’écoute des alertes de la population.

En France, la saisine du défenseur des droits est le seul moyen d’alerte, il n’est pas proactif. Il faut utiliser les moyens mis à la disposition par les États pour promouvoir une véritable égalité.

Auteur    Caroline Stevan
Illustration    Elina Braslina
Editeur    Helvetiq
Date de parution    03/09/2021

« Bonjour à tous, c’est Mélanie ! Retrouvez-moi désormais sur #TikTok. À très bientôt ! 🇫🇷 » – Décryptage

Melanie en compagnie d’un bon ami pose pour un selfie

Melanie, vous ne la connaissez sans doute pas plus que moi. Elle a un petit succès sur les réseaux sociaux depuis qu’elle poste des vidéos de son quotidien. Phénomène montant des réseaux, comprenons qui sont ces inconnues aux publications simples.

Je dois le reconnaître, j’ai un compte Tik-Tok. Et un compte Instagram et un compte Facebook. A 45 ans passés, je pense être dans la moyenne haute des vieux adultes connectés.

A mon grand désarroi, il aura fallu que ce soit l’ado de la maison (elle a 19 ans, votera pour la première fois en avril 2022. Elle a un compte Instagram, un compte Snapchat, un compte Tik-Tok, un compte Telegram et elle démarre doucement ses études supérieures) qui me parle, au détour d’un Mac Donald’s rapidement avalé de Méline. Ce compte, typiquement Breton “présente la vie normale d’une nana qui s’occupe de ses chats” m’explique l’ado.

Transcendant appel à la curiosité, je lui demande de me montrer ce compte si extraordinaire. Fière comme un bar tabac (J’assume) elle s’empresse de me montrer une ou deux vidéos de Mélanie.

En effet, elle semble super sympa Mélanie sur ces vidéos. A tel point que j’ai envie de vous les décrire une de ces vidéos. Après tout, si une inconnue parvient à attirer les bonnes grâces de mon adolescente, je devrais y arriver moi aussi !

Une simplicité palpitante

En arrière-plan de la vidéo, des bouteilles d’alcool posées au sol. Ces bouteilles sont visiblement entamées, comme chez une personne normale qui a récemment fait une petite fiesta. Si on s’amuse à zoomer, on peut reconnaître quelques alcools. Sans doute un whisky avec la collerette orange, une bouteille de Malibu probablement et une de gin. 

Bref, Mélanie a fait la fête.

Chez elle, Mélane a des bouteilles d’alcool

Dans le bar de Mélanie, une photo posée à la va-vite. Probablement un souvenir familial, photo de son papa (Jean Michel) et de sa maman (Paule).

Peu importe la décoration en fait.

Sur les premières images, Mélanie est accroupie et elle tend la main, en signe de secours et d’assistance, tout en parlant à quelqu’un : “On ne mange pas ça, hein” dit-elle.

Bon, c’est surprenant de tendre la main tout en interdisant, mais après tout, je ne sais pas ce vers quoi elle tend la main.

Fin de la première seconde de vidéo.

Le cadreur de Mélanie pivote le téléphone qui a servi à faire la vidéo vers la gauche (plus je regarde ses vidéos, plus je la sens à gauche, Mélanie). Ce vers quoi elle a la main tendue, c’est un joli sapin de Noël, très traditionnel, presque un peu tristounet. Elle tient à la main ce qui m’a d’abord fait penser à un fil barbelé pour n’être, en fait, qu’une guirlande lumineuse de Noël.

Un chat bien effrayé sur une branche

Et il y a un chat,caché dans ce sapin. Ce chat semble bien effrayé. Il se trouve alors à un endroit dont il ne sait pas trop s’il peut y être en sécurité ou non. Cette main tendue est-elle là pour la douceur d’une caresse ou pour la dureté d’une réprimande ?

Ce chat, je l’imagine comme une personne qui aurait passé des jours à conduire et qui, un beau matin à l’aube, se retrouve perdue sur une plage. Images façon Claude Lelouch, Anouk Aimée et Jean-Louis Trintignant sur la plage de Dauville un matin de décembre. En l’occurrence, Jean-Louis s’appelle Kerhillio, le nom d’une plage dans la baie de Quiberon.

Le chat de Mélanie

Le mal du Pays, sans doute. J’ai oublié, Mélanie a quitté sa Bretagne natale pour vivre dans les Yvelines.

Cette attendrissante scène entre un chat et son humaine (c’est l’expression consacrée dans les vidéos de chats sur Tik-Tok pour parler des propriétaires de félins) me rappelle Maître Corbeau sur son arbre.

Suit une poignée de secondes pendant lesquelles on voit ce pauvre félin se débattre sur les branches bien souples de cet arbre de Noël.

Là, une question me taraude l’esprit. Si le félin est parvenu à monter sur ces branches tout seul, c’est qu’elles sont suffisamment solides et rigides pour qu’il parvienne à y prendre appui. Les chats sont des êtres intelligents (et populaires sur les réseaux sociaux) qui ne s’aventurent que rarement dans des endroits d’où ils ne sauraient pas repartir. On n’imaginerait pas un chat, par exemple, se laisser enfermer dans une remorque de semi-remorque alors qu’il ne sait pas ni vers où il va, ni comment il va survivre en cette destination inconnue.

Elle est de plus en plus sympa cette vidéo. Du coup, viralité oblige, Mélanie aussi est de plus en plus sympa. A mes yeux comme aux yeux de mon adolescente et des 270 000 autres teenagers (j’ai définitivement grandi dans les années quatre-vingt-dix) qui ont liké cette vidéo.

Entre les secondes 13 et 17 de ce court-métrage, Mélanie tend la main vers son chat de manière un petit peu plus autoritaire. Bien sûr, elle ne maltraite pas l’animal. Elle fait montre de l’autorité dont a besoin tout humain qui souhaite sortir un tiers d’une autre race d’une situation dans laquelle il (l’étranger) s’est mis alors qu’il n’était pas réellement autorisé à le faire.

C’est exactement le cas de ce chat qui n’avait sans doute aucune permission pour monter dans les branches de ce joli sapin de Noël.

Vers la quinzième seconde, un sent une pointe d’agacement dans l’attitude de Mélanie. Elle a la main vers le bas et les doigts tendus au contact de l’animal. On pourrait penser qu’elle va le saisir pour le sortir de ce mauvais pas mais il est évident que l’amoureuse à la fois des chats et des sapins de Noël (tradition apparue au XVIe siècle en Allemagne) sait que le résultat serait catastrophique. Non seulement risquerait-elle de blesser l’animal apeuré mais, en plus, elle réduirait à néant les efforts qu’elle a mis dans l’érection récente (il n’y a quasiment pas d’aiguilles aux pieds du sapin. Soit Mélanie est une fée du logis, soit le sapin a été mis en place pour la vidéo, je ne sais pas trop) de ce sapin de Noël.

Bref, de Maîtresse douce et gentille, on sent bien que Mélanie passe vers un niveau d’autorité dont on ne penserait pas cette gentille femme capable du haut de ses presque 304 000 abonnés.

Est-ce ce qu’on appelle la main de fer dans le gant de velours ? Je ne sais pas.

Mélanie tente bien de récupérer son chat

Seconde 17, on entend Mélanie hausser le ton et menacer l’animal par un “Sors, sors”. Pour un peu, on se sentirait devant une église que des policiers voudraient investir pour en déloger des migrants. Les invectives d’août 96 devaient aussi contenir du “sors, sors”, parfumé d’un peu de lacrymo.

Les goûts et les modes ont bien évolué en 30 ans.

Zoom avant vers le félin. A la seconde 20, on entend Mélanie déclarer “tant pis, il est installé. Il ne bouge pas.” C’est étonnant qu’elle abandonne déjà, Mélanie, elle me fait presque pitié là.

Force doit rester à l’état et à la police, sacrebleu !

Mélanie, au secours !

Mélanie, je t’en conjure, ne laisse pas cet animal sur cette branche !

Il va se blesser et abîmer ce si joli sapin de Noël que ta colocataire et toi avez construit. Tu dois défendre le territoire contre l’invasion de ce félin, tu dois ramener ordre et discipline dans ton salon.

Mélanie, au secours ! » C’est ce qu’entendent crier les fans de cette vidéo. C’est peut-être aussi ce que pense l’animal, après tout il ne fait que chercher du confort et de l’assistance alors qu’il se sent bien en danger.

Le regard du chat est d’ailleurs de circonstance. On le sent craintif quant à sa situation pour le moins instable. Ensuite l’autorité venant de cette main qui, quand elle n’a plus besoin des ronronnements besogneux du félin, va le repousser l’inquiète.

Le regard effrayé du chat de Mélanie

La vidéo s’achève sur un gros plan du visage animal, sur l’air de “All I want for Christmas is you” par la chanteuse aux origines bigarrées (vénézuélienne et afro-américaine par son père, irlandaise par sa mère) Mariah Carey.

Elle est douée Mélanie, je vais m’abonner à son compte. Pas vous ?

Remettre en contexte

Cette jolie vidéo est un exercice de style remarquable. Elle contient tout ce que les réseaux sociaux aiment : 

  • une véritable personne dans son environnement
  • un animal aimant et innocent, star des réseaux sociaux qui plus est
  • un chat dans une situation cocasse
  • un intérieur « normal » avec une vie banale
  • des restes de vie – les bouteilles d’alcool
  • une musique de circonstance
  • peu d’actions 
  • des actions courtes et brèves
  • des messages subtilement distillés ici et là

Quels messages Mélanie peut-elle bien avoir envie de nous faire passer ?

Voici le lien vers la vidéo de Mélanie https://vm.tiktok.com/ZM8cc4UQj/ sur le réseau social TikTok.

Pardon, de Marine… Marine Le Pen, renommée Mélanie pour l’occasion.

Marine Le Pen en compagnie d’un bon ami pose pour un selfie

Sur cette photo, Marine Le Pen pose à gauche (décidément) de Ruuben Kaalep, suprémaciste blanc assumé néonazi, homme politique estonien.

Marine Le Pen est, depuis quelques années, dans un exercice de dédiabolisation du parti fondé par son père, Jean-marie Le Pen.

Il faut rappeler que le fondateur du Front National a notamment qualifié les chambres à gaz de “détail de l’histoire”, entre autres sorties très contrôlées. Certes, la façade du château a été repeinte. Le parti de La Celle-Saint-Cloud s’appelle maintenant Rassemblement National, mais il n’a pas changé son message. Seule son image, notamment auprès des jeunes, a évolué.

Cet exercice trouve son accomplissement ici. Le message que passe cette vidéo est celui d’une femme « normale » dans un environnement banal. Cette femme a des préoccupations normales et a une vie normale.

Bref, la normalité dans tout ce qu’elle a de plus dangereux.

De plus stigmatisant et de plus excluant de l’anormal. Celui qui n’a pas ce beau logement propret en colocation. Celui qui n’a pas cet arbre de Noël bien chrétien. Celui qui n’a pas ce joli chat.

Cet autre que nous sommes tous dès lors que nous ne sommes pas dans la norme, c’est lui, uniquement lui que cette vidéo pointe du doigt. C’est sous son menton que la main tendue de la candidate se pose pour lui rappeler qui est force et autorité.

Il n’y a pas d’altérité dans cette vidéo, malgré la tentative. L’altérité nécessite que l’autre soit accepté dans toutes ses caractéristiques et ses différences. C’est l’altérité à la façon de Platon.

Ce que nous propose Marine Le Pen ici, c’est la lecture grecque de l’autre. Celui qui n’est pas de la cité est un non-citoyen et s’il ne parle pas la langue, c’est un barbare.

L’occupation des réseaux sociaux pour la campagne des élections présidentielles à venir va être un élément de victoire déterminant. Le candidat pathétique “Z” l’a compris et ne se prive pas de faire participer une cohorte de comptes pour porter sa parole.

Marine Le Pen lui doit énormément d’ailleurs, il a décalé de plusieurs cases la position de la candidate vers un terrain bien plus acceptable et propre sur lui.. Ou l’extrême droite glamourisée et banalisée.

Sans épine sur le sol.

#LesFemmesAvecZemmour : Mythe ou réalité ?

Dans le cadre de son travail d’analyse des forces politiques françaises, la Fondation Jean-Jaurès publie « Les questions de genre et de lutte contre le sexisme dans le vote à la présidentielle, un frein au zemmourisme ? », une note rédigée par Louise Jussian, chargée d’études à l’Ifop et membre de l’Observatoire de l’opinion.

Face à l’ascension dans les sondages d’un candidat aussi ouvertement misogyne qu’Éric Zemmour, la question se pose de savoir comment l’électorat féminin appréhende la candidature de l’auteur du Premier sexe (2006) et, plus largement, quel rôle vont jouer les enjeux relatifs aux droits des femmes et à la lutte contre le sexisme dans cette première campagne présidentielle de l’ère post-MeToo.  Dans une pré-campagne souvent marquée par une concurrence entre hommes et femmes au sein de chaque camp (ex : Y. Jadot versus S. Rousseau pour la primaire EELV, X. Bertrand versus V. Pécresse pour la primaire LR, E. Zemmour versus M. Le Pen pour les nationalistes), on peut se demander si le genre des candidat(e)s joue encore un rôle dans un processus de décision électorale marqué cette année – il faut le rappeler – par des appels à « la virilité » (J.-M. Le Pen, juin 2021) ou des assertions selon lesquelles « les femmes n’incarnent pas le pouvoir » (Éric Zemmour).  Confirmant les enseignements tirés de grandes enquêtes publiées récemment, une étude de l’Ifop menée pour le magazine Elle auprès de 2 000 personnes montre que si l’électorat féminin n’échappe pas à une certaine extrême-droitisation, il n’en n’exprime pas moins une forte aversion à l’égard d’Eric Zemmour, qui fait craindre à beaucoup d’électrices une remise en cause des droits des femmes, droits qui constitueront pour les jeunes femmes de la génération #MeToo le critère déterminant de leur vote le 10 avril 2022.    

Louise Jussian part du constat que l’électorat féminin est moins perméable aux discours du « presque » candidat Éric Zemmour, ce dernier faisant craindre à bon nombre d’électrices une remise en cause des droits des femmes. La candidature d’Éric Zemmour réactive ainsi le « radical gender gap », alors même que Marine Le Pen était parvenu à le neutraliser, l’électorat féminin apparait moins perméable à l’extrême droite de Zemmour : 12% des femmes ont l’intention de voter pour le polémiste, contre 17% des hommes. On peut donc se poser légitiment la question, Éric Zemmour, fait-il peur aux femmes ? Plus d’une femme sur trois (66%) se dit inquiète pour les droits des femmes à l’idée que ce dernier soit élu président de la République. Le droit des femmes reste déterminant pour les jeunes femmes (86% des moins de 25 ans le prendront en compte dans leur vote pour 2022) mais pas pour toutes les femmes (47% des Françaises seulement jugent ce thème déterminant dans leur vote). Ces résultats révèlent l’absence d’effet MeToo notable dans l’ensemble de l’électorat féminin, malgré une très forte mobilisation des plus jeunes.   Emmanuel Macron arrive en tête des intentions de vote (25% des femmes ont l’intention de voter pour lui) malgré un bilan mitigé en matière de droits des femmes : moins d’une Français sur deux (47%) est satisfaite de l’action du président de la République.  

Il est à noter cependant la fin du mythe de la prime à la « virilité » dans la compétition pour l’élection présidentielle : 41% des femmes ayant l’intention de voter pour une femme déclarent que le genre de leur candidate est déterminant dans leur choix. Il existerait donc aujourd’hui une prime à la féminité dans une dynamique d’habilitation des femmes dans le politique.    

Un électorat féminin moins perméable au zemmourisme   Cette étude Ifop pour Elle confirme la réémergence du « radical right gender gap » (expression signifiant une adhésion moindre des femmes à l’extrême droite par rapport aux hommes) en la candidature d’Éric Zemmour, mise en lumière récemment dans de grandes enquêtes (ex : étude Ifop pour la LICRA, étude Ipsos-Cevipof-Fondation Jean Jaurès) Le scrutin présidentiel de 2017 semblait avoir confirmé le nivellement des choix électoraux selon le genre. Marine Le Pen était en effet parvenue à capter l’électorat féminin sous sa candidature alors que la droite radicale avait toujours pâti d’un plus faible engagement du vote féminin. A six mois du premier tour de l’élection présidentielle de 2022, la chute du mur entre les femmes et l’extrême droite semble se confirmer comme le donnent à voir les intentions de vote (toutes précautions d’interprétation gardées dans l’analyse de ces dernières à ce stade de la campagne). Les partis comme le Rassemblement national (RN) ne font plus office de repoussoir auprès des femmes ; les votes de l’électorat féminin en leur faveur ont connu une forte augmentation depuis 2012. A cette époque, le bloc de la droite nationale populiste représentait 19% du vote féminin, pour ensuite s’élever à 27% en 2017 et atteindre aujourd’hui 34%. L’hostilité des femmes envers le RN n’est plus. Ce phénomène est sûrement boosté par la posture moins guerrière et plus apaisée affichée par Marine Le Pen par souci de présidentialisation, ainsi que par la précarisation accrue des femmes déjà en situation de fragilité, pour qui la gauche ne parvient plus à s’ériger en « défenseuse » si l’on observe ses difficultés à s’imposer dans les intentions de vote.

Source : Étude Ifop pour Elle réalisée par questionnaire auto-administré en ligne du 20 au 22 octobre 2021 auprès d’un échantillon de 1 030 femmes, extrait d’un échantillon national représentatif 2 002 personnes âgées de 18 ans et plus.
 

Toutefois, les données pré-électorales récoltées à ce stade révèlent une réactivation du gender gap à l’extrême droite en la candidature d’Éric Zemmour. Si Marine Le Pen était parvenue à neutraliser ce phénomène, le polémiste le ranime, sa candidature faisant office de repoussoir pour les femmes. Si l’élection présidentielle avait lieu demain, à l’instant T et selon le rapport de force actuel, ce sont 17% des hommes qui voteraient pour Eric Zemmour contre seulement 12% des femmes. Et le négatif photographique de ce résultat se retrouve dans les intentions de vote pour Marine Le Pen : 20% des femmes et 16% des hommes ont l’intention de voter pour elle, donnant à voir une différenciation selon le genre dans le vote d’extrême droite.  

Autre faiblesse de la base électorale du polémiste : les jeunes femmes « primo votantes ». En effet, un clivage générationnel émaille l’électorat féminin, et le poids de cette variable dans les choix électoraux semble presque se substituer à celui du genre dans les intentions de vote pour les autres bords politiques. Les femmes âgées de moins de vingt-cinq ans adoptent des comportements plus typiques que les autres générations, peut-être car leur récente politisation s’est opérée dans un contexte post-MeToo et rythmé par les marches pour le climat, en faisant un électorat encore à part. Quand on focalise sur le vote des femmes âgées de dix-huit à vingt-quatre ans, la hiérarchie entre les candidats semble s’inverser : Yannick Jadot recueille ainsi 22% de leurs intentions de vote quand sa candidature ne rassemble que 7% des voix chez l’ensemble des femmes. Quant à Eric Zemmour, il tombe à 7% des intentions de vote auprès de cette cible.

Source : Étude Ifop pour Elle réalisée par questionnaire auto-administré en ligne du 20 au 22 octobre 2021 auprès d’un échantillon de 1 030 femmes, extrait d’un échantillon national représentatif 2 002 personnes âgées de 18 ans et plus.

 Ainsi, Éric Zemmour, ou « l’agitateur » de cette pré-campagne, vient fractionner l’électorat d’extrême droite ; son ton guerrier et offensant envers les femmes l’empêchant de recueillir leur adhésion. Les électeurs et électrices de la droite nationaliste se retrouvent donc presque scindés en deux groupes : les femmes avec Marine Le Pen et les hommes avec Éric Zemmour.                         

Mais existe-t-il toujours un « vote des femmes » ?   Dans les années 1990, Janine Mossuz-Lavau identifiait trois phases dans la construction du vote des femmes, depuis son acquisition dans les années 1940 jusqu’à l’époque contemporaine de la rédaction de son analyse. La première phase dite de « l’apprentissage » s’étalant jusqu’aux années 1960 se définit par une participation des femmes bien inférieure à celle des hommes, et par une orientation plus droitière de leur vote. La deuxième phase de « décollage » voit, dans les années 1970, une hausse de la participation féminine et une première réduction de l’écart entre les hommes et les femmes sur le vote de gauche. Et la troisième phase de « l’autonomie », dont le tournant des années 1980 ancre encore le virage vers la gauche du vote des femmes, met également en exergue une certaine hostilité de cette frange de l’électorat à l’égard des forces politiques d’extrême droite. Aujourd’hui, et après le chamboulement du scrutin présidentiel de 2017, le vote des femmes s’inscrit-il toujours dans cet âge de l’autonomie ? Il serait impossible d’apporter ici une réponse, mais la précédente analyse d’un alignement de l’orientation du vote des femmes sur celui des hommes au travers de leur appétence pour l’extrême droite constitue un premier point de départ à cette réflexion. Un autre point de départ serait l’analyse du taux de participation des femmes aux scrutins des années 2010.  La phase d’autonomie conceptualisée par Janine Mossuz-Lavau met en exergue une quasi égale participation à des scrutins entre les hommes et les femmes. La variable du genre n’apparaitrait alors plus significative dans l’explication de l’abstention comme l’affirme Mariette Sineau. C’est en effet ce qui est mesuré depuis les années 1980 et qui se confirme lors des premiers tours des derniers scrutins présidentiels : en 2012, 79% des hommes se sont rendus aux urnes et 81% des femmes, et en 2017 ce sont 80% des hommes et 79% des femmes (sondages jour du vote, Ifop). C’est également ce que l’on observait en 2014 pour les élections municipales : 64% des hommes sont allés voter et 62% des femmes. Toutefois, 2015 et les élections régionales voient s’amorcer une baisse de la participation féminine sur les autres formes de scrutin que l’élection reine. Ainsi, aux élections régionales de 2015, ce sont 57% des hommes qui se sont déplacés pour voter contre 45% des femmes, soit un différentiel de 12 points, et aux élections européennes de 2019, nous retrouvons un écart de 8 points sur la participation. La crise du Covid apparait alors comme un catalyseur de cette baisse amorcée lors des précédents scrutins (12 points d’écart sur la participation aux élections municipales de 2020, et 6 points pour les dernières élections régionales), et met à jour la fragilité de l’engagement des femmes par rapport aux hommes dans le vote.                      

Eric Zemmour, demeure pourtant le candidat qui inquiète deux femmes sur trois. L’une des clefs d’explication de la réactivation de cette différenciation du vote entre les hommes et les femmes est à trouver dans la « zemmouro-scepticisme » exprimée par deux électrices sur trois. Diverses études ont montré que malgré sa capacité à capter son électorat dans quasi toutes les strates de l’opinion, la faiblesse de la candidature du polémiste réside dans sa difficulté à rallier le vote des femmes, réactivant ainsi une forme de « radical right gender gap » sur sa candidature, phénomène qui tendait pourtant à se résorber depuis ces dernières années. Pointé du doigts pour ses prises de position misogynes et violentes à l’égard des femmes, non seulement le polémiste souffre d’un déficit de voix chez les femmes, mais il provoque également chez elles une aversion forte. Ce sont en effet 66% des femmes qui se disent inquiètes pour leurs droits s’il était un jour élu à la présidence de la République. Cette « zemmouro-scepticisme » traverse largement toute la gent féminine, et imprègne particulièrement les femmes ayant une sensibilité féministe (70% d’inquiétude chez les « très féministes »).

Source : Étude Ifop pour Elle réalisée par questionnaire auto-administré en ligne du 20 au 22 octobre 2021 auprès d’un échantillon de 1 030 femmes, extrait d’un échantillon national représentatif 2 002 personnes âgées de 18 ans et plus.

             

Les droits des femmes : un rôle déterminant du vote des jeunes électrices mais pas de l’ensemble des femmes.  L’impact de cette crainte pour les droits des femmes est tout de même à nuancer car comme le montre l’étude Ifop pour Elle, toutes les femmes ne lui accordent pas la même importance dans la construction de leur vote. Comparativement à 2017, la place des droits des femmes dans les déterminants du vote féminin semble relativement constante. En effet, ce sont toujours 47% des femmes qui jugent cet enjeu « déterminant » dans le choix de leur vote à l’élection présidentielle. Si le positionnement des candidats en matière de droit des femmes reste déterminant, ce dernier est à relativiser une fois mis en concurrence avec d’autres thématiques dont le poids dans le vote a augmenté depuis 2017. Ainsi, la santé (déterminante pour 71% des femmes) a, sous l’effet de la crise liée à la Covid-19, augmenté de 8 points depuis 2017, comme la lutte contre l’insécurité et la délinquance, qui a connu une hausse de 12 points (70% des femmes déclarent que c’est un enjeu déterminant).  

Source : Étude Ifop pour Elle réalisée par questionnaire auto-administré en ligne du 20 au 22 octobre 2021 auprès d’un échantillon de 1 030 femmes, extrait d’un échantillon national représentatif 2 002 personnes âgées de 18 ans et plus

  Toutefois, cette hiérarchie des thématiques dans le déterminant du vote s’inverse totalement chez les femmes de moins de vingt-cinq ans. Beaucoup plus nettement touchées par le mouvement MeToo et l’émergence de collectifs féministes comme Nous toutes, les jeunes placent la défense des droits des femmes en tête de leurs déterminants du vote (86%, soit plus de 27 points depuis 2017). L’impact de la crise sanitaire se fait également sentir au sein de cette population (73% déclarent la santé comme déterminante, soit une hausse de 21 points depuis la dernière élection présidentielle). Enfin, depuis le dernier scrutin national, la protection de l’environnement s’est fortement imposée dans les ressorts du vote des jeunes femmes. Avec une hausse de 30 points, ce sont désormais 71% d’entre elles qui prendront en compte les positionnements des candidats sur la lutte contre le réchauffement climatique dans leur choix de vote pour 2022.

Source : Étude Ifop pour Elle réalisée par questionnaire auto-administré en ligne du 20 au 22 octobre 2021 auprès d’un échantillon de 1 030 femmes, extrait d’un échantillon national représentatif 2 002 personnes âgées de 18 ans et plus

A contre-pied des idées reçues, c’est dans le vote des femmes les moins diplômées et les plus précaires que la défense de la condition féminine sera le plus déterminante : 52% des femmes ayant un diplôme inférieur au baccalauréat jugent cet enjeu déterminant, contre 38% de celle diplômées du supérieur. Pareillement pour les employées qui sont 51% à prendre en compte le droit des femmes dans leur vote, contre 31% des cadres et professions intellectuelles supérieures. Ce résultat peut être compris comme la manifestation de la précarisation accrue des femmes étant dans des situations socio-professionnelles moins certaines et subissant une forme de double peine : celle de leur statut social plus précaire et celle de la domination subie incombant à leur genre. La candidature d’Emmanuel Macron ne pâtit pas d’un jugement mitigé sur son action en faveur des droits des femmes. Preuve que l’aspect déterminant des droits des femmes ne traverse pas l’opinion féminine de manière homogène, Emmanuel Macron parvient, malgré un bilan mitigé en la matière, à se hisser, pour l’instant, en tête des intentions de vote des femmes et des féministes. Au lendemain de son élection, Emmanuel Macron présentait la lutte pour l’égalité entre les hommes et les femmes comme la « grande cause du quinquennat ». A la veille du prochain scrutin, quel bilan les femmes en tirent-elles ? Ce sont moins de la moitié des Françaises (47%) qui se disent satisfaites de l’action du président de la République concernant « l’amélioration des droits des femmes ». Ce résultat mitigé reste cependant important quand on le compare aux autres domaines d’action du chef de l’Etat. L’amélioration de la situation des femmes en France arrive en effet en deuxième position des secteurs vecteurs de satisfaction après l’entretien des relations avec l’Union européenne (56%). Toutefois, cette satisfaction ne semble pas traverser l’opinion féminine de manière homogène : les plus jeunes (qui, on l’a vu précédemment, sont particulièrement attachées à cette thématique) sont 39% à se déclarer satisfaites contre 50% des 35-49 ans. Ce résultat fluctue également selon le positionnement politique des femmes interrogées, et plus particulièrement qu’elles soient sympathisantes ou non de la majorité présidentielle (96% des partisanes de La République en marche sont satisfaites contre 37% des sympathisantes d’Europe-Ecologie-Les Verts ou 41% du Parti socialiste). Le degré de féminisme joue également sur leur rapport au bilan du chef de l’Etat et tend à relativiser sa bonne évaluation : plus les femmes interrogées sont féministes, moins elles s’avèrent satisfaites de l’action menée par le gouvernement (34% des « très féministes » contre 50% chez les « non féministes »).    

Source : Étude Ifop pour Elle réalisée par questionnaire auto-administré en ligne du 20 au 22 octobre 2021 auprès d’un échantillon de 1 030 femmes, extrait d’un échantillon national représentatif 2 002 personnes âgées de 18 ans et plus

 Toutefois, ce bilan en demi-teinte ne semble pas se faire ressentir sur l’engagement des femmes à l’égard du président de la République puisqu’il recueille 25% des intentions de vote de ces dernières, le plaçant en première position chez les femmes. S’il apparaît « fort » chez ces dernières, il l’est particulièrement chez les électrices revendiquant une sensibilité accrue à la condition féminine puisque 31% des femmes « très féministes » ont l’intention de voter pour lui. Ces deux résultats « paradoxaux » donnent peut-être à voir la manifestation de deux formes de féminisme ne donnant pas la primeur aux mêmes problématiques, l’une étant satisfaite de l’action du gouvernement en matière de droit des femmes, l’autre jugeant ce bilan encore largement insuffisant au vu des enjeux et des promesses de début de mandat.   

Source : Étude Ifop pour Elle réalisée par questionnaire auto-administré en ligne du 20 au 22 octobre 2021 auprès d’un échantillon de 1 030 femmes, extrait d’un échantillon national représentatif 2 002 personnes âgées de 18 ans et plus

Le mythe de la prime à la « virilité » dans la compétition présidentielle. Dans un modèle de société où l’identité particulière des individus semble de plus en plus prise en compte, chaque candidat à une élection présidentielle tente de se distinguer de ses adversaires sur ses traits de personnalité et d’appartenance. La virilité a longtemps été présentée comme une qualité incontournable d’un participant au « combat » pour l’Elysée. Flotterait alors l’idée qu’il existe une « prime à la virilité », idée aujourd’hui largement contestée par l’opinion publique. En effet, 41% des femmes ayant l’intention de voter pour une femme en 2022 déclarent que le genre de cette candidate les a incitées à voter pour elle plutôt que pour un homme portant les mêmes idées. Il existe donc une « prime à la féminité » chez les femmes, mais aussi chez les hommes souhaitant voter pour une femme qui sont 43% à partager cette opinion. En négatif, la masculinité d’un candidat semble moins jouer, notamment sur le vote des femmes (15% des électrices potentielles d’un homme votent pour ce dernier du fait de son genre). Ce double résultat peut nous permettre de formuler l’hypothèse selon laquelle la prime au féminin dans le vote féminin s’inscrit dans une dynamique d’habilitation des femmes dans le politique par rapport aux hommes, en effet, leur présence à des postes électifs est plus courante.

Source : Étude Ifop pour Elle réalisée par questionnaire auto-administré en ligne du 20 au 22 octobre 2021 auprès d’un échantillon de 1 030 femmes, extrait d’un échantillon national représentatif 2 002 personnes âgées de 18 ans et plus.
 

De plus, le fait de voter pour une femme en raison de son identité de genre apparaît comme un choix « féministe ». En effet, les femmes déclarant avoir une sensibilité féministe sont plus nombreuses à prendre en compte ce critère que celles n’en déclarant aucune, et les plus militantes placent ce critère au premier plan (61% d’entre elles) lorsque deux candidats présentent des idées semblables. Le fait qu’aucune femme n’ait encore été élue à la présidence de la République peut appuyer cette démarche des électeurs et électrices à voter davantage pour l’une d’elle. Être un femme candidate à la présidentielle en 2022 ne semble plus représenter un handicap. Si ces résultats rendent caduques les « appels à la virilité » de certains hommes politiques, le genre des candidats n’apparaît tout de même pas totalement déterminant au point de surclasser les propositions programmatiques et la personnalité de ces derniers dans les déterminants du vote. Contrairement aux assertions d’Eric Zemmour selon qui « les femmes n’expriment pas le pouvoir », la figure de la femme présidente de la République semble de plus en plus s’imposer dans l’opinion publique. La capacité des femmes à occuper de hauts postes électifs n’est plus frontalement questionnée par les Français puisque nous mesurons depuis les années 1980 un tournant dans la confiance accordée aux femmes pour assumer les fonctions de présidente de la République. Ce sont ainsi près de huit Français sur dix qui déclarent leur confiance envers une femme pour mener le pays, et ce résultat imprègne dans les mêmes proportions aussi bien les hommes que les femmes. Non seulement l’ensemble des Français apparaît en adéquation avec l’idée qu’une femme puisse être présidente, mais il semblerait que ce taux soit supérieur à celui mesuré à l’égard des hommes. En effet, « seulement » 71% des femmes et 77% des hommes disent faire confiance à un homme pour tenir le rôle de président de la République, contre 80% des femmes et 81% des hommes qui déclarent faire confiance à une femme.

Source : Étude Ifop pour Elle réalisée par questionnaire auto-administré en ligne du 20 au 22 octobre 2021 auprès d’un échantillon de 1 030 femmes, extrait d’un échantillon national représentatif 2 002 personnes âgées de 18 ans et plus.

Toutefois, il convient de prendre ce résultat pour ce qu’il est, c’est-à-dire purement déclaratif, avec tous les biais que cela comporte. Ce phénomène déclaratif n’a en effet toujours pas abouti à l’élection d’une femme comme présidente de la République, et nous notons une autre forme de paradoxe : si l’idée qu’une femme est capable d’être présidente imprègne l’opinion publique féminine de manière quasi homogène, les femmes les moins diplômées semblent légèrement plus en retrait que les plus diplômées. Ces dernières sont aussi moins nombreuses à déclarer voter pour une femme parce que c’est une femme. Pour autant, on retrouve une partie de ces femmes moins diplômées dans l’électorat de Marine Le Pen, la femme politique rassemblant ces dernières années le plus de voix autour de sa candidature.

Sources

« Sociologie du « zemmourisme » : radiographie d’un nouvel électorat national-populiste », par François Kraus. Note de l’Ifop pour la Licra et la revue « Le DDV ».

« Radiographie de l’électorat potentiel d’Éric Zemmour », par Antoine Bristielle et Tristan Guerra dans une enquête de la Fondation Jean-Jaurès intitulée « Le Dossier Zemmour : idéologie, image, électorat ».

Mossuz-Lavau Janine. Le vote des femmes en France (1945-1993). In : Revue française de science politique, 43?? année, n°4, 1993. pp. 673-689.

« Sociologie du « zemmourisme » : radiographie d’un nouvel électorat national-populiste », par François Kraus et « Radiographie de l’électorat potentiel d’Éric Zemmour », par Antoine Bristielle et Tristan Guerra.

Journée internationale des femmes en politiques, continuons la lutte !

A l’initiative du réseau Elues locales, qui entend soutenir et valoriser les femmes pour lever les obstacles à leur engagement politique et leur permettre d’accéder aux plus hautes responsabilités, sera lancée le 4 décembre prochain, la journée internationale des femmes en politique.

Les chiffres sont affligeants ! Une étude conjointe APCE/UIP souligne que des actes de sexisme, d’abus et de violence à l’égard des femmes sont fréquents dans les parlements nationaux des États membres du Conseil de l’Europe :

  • 85,2% des femmes parlementaires ayant pris part à l’étude indiquent avoir fait face à des violences psychologiques au cours de leur mandat
  • 46,9% ont reçu des menaces de mort, de viol ou de coups
  • 58,2% ont été la cible d’attaques sexistes en ligne sur les réseaux sociaux
  • 67,9% ont été la cible de remarques portant sur leur apparence physique ou fondées sur des stéréotypes de genre
  • 24,7% ont subi des violences sexuelles
  • 14,8% ont subi des violences physiques
  • Les femmes parlementaires de moins de 40 ans sont davantage visées par les actes de harcèlement.

Jusqu’à présent, en France, la violence que subissent les femmes en politique n’attire pas l’attention des médias ni du grand public. Les chiffres à ce sujet sont limités et compliqués à collecter. Les femmes ne témoignent pas ou peu. Pourtant cette violence est réelle et systémique et ce à tous les niveaux du pouvoir, que ce soit sous les ors de la République ou dans le couloir d’une petite mairie de village.

Une enquête nationale sur les violences sexistes à l’encontre des femmes en politique est actuellement en cours afin de collecter des données objectives. Les résultats seront dévoilés le 3 décembre lors de la conférence de presse donnée en vue du lancement de la journée. Les organisateurs espèrent également pouvoir réunir au moins 500 femmes politiques de la France entière le 3 décembre pour le lancement officiel de cette journée avec l’objectif que le 4 décembre devienne la journée où les femmes politiques de petites communes rurales, les adjointes de grandes villes, les députées, les sénatrices et les ministres se réunissent pour dire non à la violence qu’elles subissent du fait de leur genre.

Brillante Magazine est partenaire officiel de cette journée, pour que continue la lutte..

Plus d’info sur : https://www.journeeinternationaledesfemmesenpolitique.com/

Nathalie Goulet : « Je suis contre l’écriture inclusive et pour la chasse », une interview sans filtre

Nathalie Goulet est une femme aux avis tranchés et au parcours atypique s’il en est. Arrivée en politique brutalement suite au décès de son mari sénateur, elle se retrouve sénatrice de l’Orne et membre du groupe Union centriste au Sénat depuis 2007.
Celle qui tente actuellement de boucler sa liste en Seine Maritime, a eu la gentillesse de prendre le temps de répondre à nos questions sur les femmes, la société et son action politique.
Une interview fleuve et sans filtre d’une femme au franc parler, sans concession qui a accepté de se confier.

Lorsque nous la contactons, Nathalie Goulet vient tout juste d’apprendre la naissance de sa troisième petite fille aux États-Unis, elle ne manque pas de nous faire part de la bonne nouvelle, enthousiaste : « Une brune pour une fois, ma fille n’a fait que des blondes aux yeux bleus, ce qui n’est pas trop le genre de la famille. »

A l’aube de ses 63 printemps le 24 mai, la sénatrice vit difficilement son propre vieillissement : « J’ai détesté être grand-mère. J’ai l’angoisse de ce délabrement physique auquel on est condamnés, je suis en sursis je fais le maximum, je suis végétarienne et fais de la gym tous les jours. J’ai l’obsession de la balance, en cela le premier confinement a été terrible à vivre. J’ai fait la moitié du confinement en boulimie et l’autre moitié au régime. »
Que pense t’elle alors de la condition des femmes à travers cette crise sanitaire ? « La crise sanitaire a été une caisse de résonance pour les inégalités hommes-femmes au plan domestique et salariale avec une aggravation des situations. Les femmes occupent plus d’emplois à temps partiel vous ajoutez à cela la condition des femmes en tant que mère, épouse, il a fallu maintenir des équilibres familiaux avec beaucoup plus d’efforts dans un contexte très difficile. Psychologiquement cela a été plus difficile pour les femmes que pour les hommes.« 

Au niveau de votre région avez-vous envisagé de donner un écho à ce débat là ? « J’ai une femme tête de liste dans chaque département. C’est un choix stratégique qui m’a été reproché d’ailleurs par un « vieux cheval de retour » qui voyait d’un très mauvais œil l’une des tête de liste puisque lui même ambitionnait d’être tête de liste pour moi. Entre une femme qui travaille le terrain et un « vieux cheval de retour » qui a trainé ses guêtres dans tous les partis je n’ai pas hésité ! « 

« En politique les femmes se conduisent aussi mal que les hommes, il n’y a pas de différences. J’adore la phrase de Françoise Giroud : « Une femme serait vraiment l’égale de l’homme le jour où, à un poste important, on désignerait une femme incompétente ». C’est difficile d’avoir des femmes sur les listes électorales, elles déclinent volontiers aux motifs qu’elles ne seraient soir pas assez compétentes ou pas assez disponibles. Ce qui n’est jamais le cas d’un homme qui accepte quasiment systématiquement même s’il est très mauvais ou n’a pas d’expérience. Le scrutin de liste, comme celui des régionales ouvre une porte importante pour les femmes, cela leur donne une visibilité dans le cadre d’une liste ce qui est plus difficile au scrutin majoritaire à deux tours. »

Nathalie Goulet dit détester les réseaux mais suis l’activité d’associations telles que Jamais sans elles « J’ai remarqué que les femmes travaillent très facilement en réseau alors que les hommes ont besoin de référer dans un fonctionnement hiérarchique. Je ne suis pas une ayatollah du féminisme, je ne suis pas Laurence Rossignol. Je suis militante de la parité, du droit des femmes et de l’égalité salariale. Je préfère que l’on m’appelle LE sénateur que LA sénatrice. »
Vous êtes donc contre l’écriture inclusive ? « Ah oui ! Je suis POUR la chasse et CONTRE l’écriture inclusive ! Je trouve cela d’une absurdité délirante, cela n’a aucun sens c’est une négation de la culture et de l’histoire. Le « pater familias » est une notion connotée et datée. »

Quel sont vos principaux défis professionnels à venir : « Finir les régionales, ma liste en Seine maritime qui est un vrai enjeu car il faut 39 membres et je ne les ai pas pour l’instant, le défi le plus important c’est en ayant une candidature indépendante ne pas faire le jeu du Rassemblement National, c’est fondamental. Il y a un enjeu immédiat de territoires mais également un enjeu de programme pour l’instant je suis la seule à avoir publié un programme, j’espère que l’on pourra marquer le débat. Je m’emploie a finir ma liste.« 

Nathalie Goulet vient d’apprendre que l’un de ses colistier en Seine Maritime était atteint du COVID : « Nous continuons de faire campagne, de faire du porte à porte et les marchés puisque l’on a maintenu les élections. Je voulais absolument qu’on les reporte. »

Le second défi est concomitant au Sénat puisque l’on va examiner le 25 mai, une proposition de loi que j’ai déposée le 8 janvier 2020 sur l’irresponsabilité pénale liée non seulement à l’affaire Halimi mais à d’autres affaires, le code pénal ne peut pas être un permis de tuer si l’on prend des stupéfiants ou si l’on se met soi même dans une situation d’irresponsabilité. »

Un conseil pour les jeunes femmes des générations futures ? « Il faut y aller ! Il faut aller aux élections, confronter les idées, s’imposer. il faut faire la différence entre Paris-Lyon-Marseille où la politique est un peu pipée, sur des territoires plus ruraux qui sont quand même la majorité de la France, c’est le terrain qui est très important. les femmes doivent s’engager qu’elles soient infirmières, agricultrices, on a besoin d’une représentation pluriprofessionnelles féminine sur les territoires et il ne faut pas avoir peur, il faut s’organiser pour aider les femmes débordées. C’est très important. »

Propos recueillis par Romy Zucchet, le jeudi 29 avril 2021

Thaïlande. Des féministes harcelées pour leur engagement démocratique.

LAUREN DECICCA / GETTY IMAGES VIA AFP

D’après un rapport publié en février dernier par l’Observatoire pour la protection des défenseurs des droits de l’Homme, les droits fondamentaux des femmes qui ont joué un rôle majeur dans la conduite de manifestations pro-démocratiques en 2020 en Thaïlande ont fréquemment été bafoués dans le but d’entacher leur crédibilité et de les décourager.

« Garder la tête haute : c’est la devise des défenseures* des droits humains en première ligne des manifestations pro-démocratie en Thaïlande ». C’est ainsi que pourrait se traduire le titre du rapport Standing tall – Women human rights defenders at the forefront of Thailand’s pro-democracy protests . 22 femmes ont été interviewée, toutes engagées dans la protection et la promotion pacifiques des droits humains et des libertés fondamentaux dans le cadre des manifestations qui ont démarré en juillet 2020 réclamant une réforme de la monarchie à travers le pays. Ces militantes ont été les cibles systématiques d’acteurs gouvernementaux et non gouvernementaux pour avoir participé à ces rassemblements .

Attaques et violences répétées

Recours à des lois et décrets répressifs contraires aux normes internationales , harcèlement, intimidation et surveillance de la part des autorités qui se rendaient notamment à leur domicile ou dans leur établissement universitaire afin de les intimider ou recueillir des informations sur leurs activités: la liste des attaques et tentatives de déstabilisation est longue. Elles doivent aussi faire face à d’autres types de violences liées à leur sexe : elles ont notamment rapporté avoir été la cible d’agressions par les acteurs gouvernementaux, principalement des violences et harcèlements oraux qui leur étaient destinés uniquement en raison de leur sexe et/ou de l’expression de leur genre. Elles ont en outre subi une pression de la part de leur propre entourage en raison de leur militantisme. Cette situation a touché les étudiantes de façon disproportionnée, car elles sont nombreuses à dépendre de leur famille.

Démocratie et féminisme

Les féministes ont connu des difficultés au sein même du mouvement pro-démocratie. Une frange de manifestants jugent que leurs combats sont moins urgents que la lutte démocratique et qu’ils peuvent attendre. « Ça serait complètement hypocrite de prétendre se battre pour la démocratie tout en ne voyant rien de mal dans l’inégalité des sexes » condamne Verita Sriratana, professeure agrégée au Département d’anglais de la Faculté des arts de l’une des plus grandes universités de Bangkok, l’Université Chulalongkorn, et engagée sur les questions féministes en Thaïlande.

Le rapport formule de nombreuses recommandations tant à l’égard du gouvernement thaïlandais que de la communauté internationale pour assurer la protection des femmes défenseures des droits humains et le respect de leurs droits fondamentaux conformément aux normes internationales.

*le parti qui a été pris ici est de féminiser à dessein le mot « défenseur », même si la féminisation du terme n’est pas reconnue par l’Académie française.

Journée mondiale de lutte contre l’endométriose : Une proposition de loi pour mieux prévenir et lutter !

Souvent ignorée, douloureuse et source de graves complications sur la santé des femmes… l’endométriose est aujourd’hui encore en France, une pathologie diagnostiquée trop tardivement. Le député Éric Pauget et la sénatrice Alexandra Borchio-Fontimp ont déposé une proposition de loi commune visant à prévenir et lutter contre cette maladie méconnue qui touche plus d’une femme sur dix dans notre pays.

Des professionnels de la santé au grand public, l’endométriose est une pathologie gynécologique qui sou re encore d’un grand manque de reconnaissance alors qu’elle touche une femme sur dix. Silencieuse, cette pathologie invalidante qui se traduit par de vives douleurs peut menacer gravement la fertilité des femmes.

Avec un retard de diagnostic moyen de sept ans, l’endométriose engendre parfois des complications lourdes et coûteuses qui pourraient être évitées par un meilleur dépistage.

C’est face à ce constat que les deux parlementaires antibois, le député Éric Pauget et la sénatrice Alexandra Borchio-Fontimp ont chacun déposé une proposition de loi commune à l’Assemblée nationale et au Sénat instaurant un parcours de prévention, de dépistage et d’accompagnement de l’endométriose. Cette proposition de loi qui a été élaborée en concertation avec la présidente de l’association EndoFrance.

Au delà des mesures de reconnaissance de cette maladie déjà engagées par des parlementaires français, ce texte propose desormais :

– À 15 ans, une consultation médicale gratuite et obligatoire de sensibilisation et de prévention de l’endométriose, qui pourra être accompagnée d’un examen gynécologique facultatif nécessitant le consentement de la mineure et de son tuteur légal.
– À 21 ans, une seconde visite de prévention sur la base du volontariat.

– Une prise en charge intégrale des consultations et examens de prévention de l’endométriose ainsi que des soins de cette maladie.
– La gratuité des pilules contraceptives prescrites dans le cadre de l’endométriose.
– Un module de sensibilisation à la prévention l’endométriose durant la formation des

futurs médecins.

Estimée à 75 millions d’euros, cette mesure permettrait de faire considérablement chuter les dépenses de soins liées à cette pathologie, dont le coût avoisine les 750 millions d’euros par an. Et au delà du simple aspect financier, c’est avant tout la santé des Femmes et le droit de l’enfant pour chaque famille qui est en jeu.

Les journalistes sportives, montent au filet !

Laurie Delhostal, journaliste sur Canal+ et et Mejdaline Mhiri rédactrice en cheffe du magazine Les sportives viennent de lancer le FJS, un collectif de Femmes Journalistes de sport, qui veut faire bouger les lignes. Pour que les femmes soient mieux représentées dans les médias sportifs.

Parce qu’à l’instar de Marie Portolano, journaliste sur Canal+ et réalisatrice du documentaire « Je ne suis pas une salope, je suis une journaliste » ou Clémentine Sarlat, qui se dit écœurée par ses ex collègues masculins du service des sports de France Télévision, elles sont nombreuses dans le milieu a vouloir faire évoluer les mentalités et faire bouger les lignes avec en point de mire, de rendre les femmes plus présentes dans le sport et moins discriminées.

Elles sont juste compétentes ! De six consœurs au bureau de l’association, elles sont passés à 150 signataires d’ une tribune publiée dans le quotidien Le Monde dimanche pour lutter contre leur invisibilisation et le sexisme subit dans les rédactions : « Les femmes représentent seulement 10 % des 3.000 journalistes sportifs, selon l’UFJS (union des journalistes de sport en France) » nous explique Mejdaline.

Textos, propositions déplacées, harcèlement sexuel ou moral, toutes évoquent des situations vécues au sein des rédactions des médias sportifs. « Cela ne peut plus durer, continue Mejdaline, notre objectif a venir va être de quantifier ce type de situation pour mieux faire évoluer les mentalités« .

Outre la création d’un annuaire, l’association prévoit également d’intervenir activement dans les écoles et auprès des grands décideurs. Avec le haschtag #OccuponsLeTerrain lancé sur les réseaux sociaux, les journalistes sportives changent de braquet pour changer le regard de la société.

Pour soutenir ou adhérer à l’association des FJS : https://www.helloasso.com/associations/association-des-femmes-journalistes-de-sport

Ces femmes qui tiennent tête à Trump

Connu pour sa misogynie et son racisme, Trump n’a pas su essuyer la vague féminine de candidates aux élections.. Revers de bâton.

Trump se retrouve face a une résistance de femmes qui se transforment en activistes hyperefficaces par nécessité, réunissant des centaines de manifestantes en un rien de temps grâce aux réseaux sociaux. Les jeunes, plus généralement, se réapproprient la politique. Elles appellent à la résistance.

La maire de Seattle, Jenny Durkan, s’est adressé aux médias pour la première fois depuis plusieurs jours accompagnée de la chef de la police Carmen Best pour évoquer la situation dans l’East Precinct, la «Capitol Hill Autonomous Zone» et les menaces du président Trump à Seattle.

La maire a également assuré aux Washingtoniens qu’il n’y avait aucune menace imminente d’invasion militaire américaine, comme le président Trump l’a Twitté.

Elle a déclaré que la menace était non seulement importune, mais illégale. Durkan a également déclaré que le président avait brossé un faux portrait de ce qui se passait à Capitol Hill. « Ce n’est tout simplement pas vrai », a-t-elle déclaré. « Recueillir et exprimer légalement les droits de premier amendement,… n’est pas du terrorisme. »

« Le droit de contester l’autorité et le gouvernement est fondamental pour qui nous sommes en tant qu’Américains », a ajouté Durkan. « Ecouter la communauté n’est pas une faiblesse, mais une force. »

Jenny Durkan, Maire de Seattle

A Washington, D.C., la maire Muriel Bowser a quand à elle attiré l’attention la semaine dernière après qu’elle eut peint une section de la 16e rue près de la Maison Blanche avec les mots « Black Lives Matter » en jaune vif et renommée une section de la rue Black Lives Matter Plaza vendredi.

Bowser et Trump au cours des derniers jours ont été impliqués dans une dispute sur l’augmentation de la présence militaire à Washington. La maire a clairement indiqué qu’elle voulait que des troupes militaires hors de l’État quittent la capitale nationale. Dans une lettre adressée vendredi au président, Bowser a fait valoir que l’application de la loi supplémentaire « enflammait » et « augmentait les griefs » des personnes protestant contre le meurtre de George Floyd par la police.

Le président Trump a vivement critiqué la maires de Seattle Jenny Durkan et le gouverneuree de Washington Jay Inslee pour leur gestion des grandes manifestations contre le racisme en Twittant : « Reprenez votre ville MAINTENANT. Si vous ne le faites pas, je le ferai. »

Durkan et Inslee « sont tous les deux raillés et joués », a déclaré Trump mercredi après que les manifestants aient établi une « zone autonome » dans une rue de Seattle où ils s’étaient affrontés plus tôt avec la police.

Durkan a riposté avec son propre Tweet : « Rendez-nous tous en sécurité. Retournez dans votre bunker », faisant référence au fait que Trump a été emmené dans un bunker de la Maison Blanche à la fin du mois dernier lors de manifestations à Washington, DC.

Elle a ajouté le hashtag #BlackLivesMatter, signalant son soutien à ceux qui manifestent contre le racisme et la brutalité policière.

Muriel Bowser, Maire de Washington DC.

Iran : trois femmes détenues politiques entament une grève de la faim

Trois femmes ont entamé une grève de la faim dans la prison de Qarchak en Iran pour protester contre les conditions déplorables dans lesquelles elles sont détenues.

Les prisonnieres, Sakineh Parvaneh, Soheila Hejab et Zeinab Jalalian ont entamé une grève de la faim ces derniers jours pour protester contre le traitement inhumain infligé par les autorités pénitentiaires, les peines de prison inéquitables et le non-respect du principe de la séparation des détenus par le type et la durée de la détention.

La prisonnière politique Zeinab Jalalian a entamé une grève de la faim depuis le samedi 20 juin pour exiger son transfert à la prison centrale de la ville de Khoy, dans la province de l’Azerbaïdjan occidental. La détenue kurde de souche, qui a été transférée de la prison de Khoy à la prison de Qarchak le 10 mai, avait récemment annoncé qu’elle entamerait une grève de la faim dans les prochains jours si elle n’était pas transférée à la prison de Khoy. Cette prisonnière politique a récemment été diagnostiqué du Coronavirus mais est détenue dans la salle de quarantaine de la prison de Qarchak sans accès à des soins médicaux.

Le 16 juin 2020, un militant des droits de l’homme basé à Téhéran a publié sur sa page Facebook les informations concernant le transfert de Zeinab Jalalian à la prison de Qarchak. «Malgré son infection par le coronavirus, les conditions de son emprisonnement n’ont pas changé. Même lorsqu’elle a été emmenée à l’hôpital pour subir un test de dépistage du coronavirus, elle a été maintenue menottée, y compris pendant l’examen. Elle a envoyé des lettres à de nombreuses autorités, mais personne n’a prêté attention à sa situation difficile », a-t-il écrit.

Zainab Jalalian, qui vient d’une famille kurde à Maku, dans le nord-ouest de l’Iran, est en prison depuis 13 ans.

Soheila Hejab, une autre prisonnière politique, a également entamé une grève de la faim depuis le 16 juin pour protester contre sa détention à la prison de Qarchak à Varamin et contre le refus des autorités de la transférer à la prison d’Evin.

Soheila Hejab a été violemment arrêtée par les agents des Gardiens de la révolution après avoir assisté à une audience devant la cour d’appel le 23 mai. Elle a été arrêtée pour la première fois en janvier 2018 à Shiraz pour «rassemblement, collusion et propagande contre le système». Elle a été arrêtée de nouveau le 6 juin 2019 par la Revolutionary Guard Intelligence Organisation et emmenée à la prison d’Evin où elle raconte avoir été si violemment battue par des gardiens de prison qu’elle a dû être emmenée à l’hôpital. Cependant, elle a été renvoyée en prison avant tout traitement.

Le 14 mars, Soheila Hejab a été temporairement libérée sous caution lourde. Le 18 mars, un tribunal présidé par le célèbre juge Mohammad Moghiseh l’a condamnée à 18 ans de prison pour «propagande contre le système», «formation d’un groupe de défense des droits des femmes» et «appel à l’organisation d’un référendum pour modifier la Constitution». La Cour d’appel a maintenant confirmé la peine.

La prisonnière politique Sakineh Parvaneh est également en grève de la faim depuis le 25 mai pour protester contre sa peine de cinq ans d’emprisonnement et sa détention illégale avec des prisonniers reconnus coupables de crimes violents.

Le tribunal révolutionnaire de Téhéran a condamné la prisonnière kurde à cinq ans de prison et à deux ans d’interdiction d’appartenir à des groupes politiques. Elle a récemment été battue par plusieurs criminels en prison.

Ils l’ont pris pour cible après que des responsables de la prison du quartier 3 de la prison de Qarchak les aient incités à la malmener.

Sakineh Parvaneh vient d’une famille kurde de la province de Khorasan, dans le nord-est de l’Iran. Elle a été transférée au quartier des femmes de la prison d’Evin après la période d’interrogatoire.

En mars 2020, la prisonnière politique a été transférée au quartier des femmes à Evin, où elle a griffonné des slogans anti-régime sur les murs et pour laquelle elle a été punie. Elle a ensuite été envoyée à la prison de Qarchak.

Plusieurs cas de mauvais traitements épouvantables ont été signalés à la prison de Qarchak.

L’installation est un élevage de poulets désaffecté qui détient des prisonniers dans des conditions surpeuplées et insalubres, sans accès à l’eau potable, à une nourriture décente, aux médicaments et à l’air frais. Connu pour ses conditions de vie «inhumaines», l’établissement était destiné à emprisonner des criminels de droit commun, mais le pouvoir judiciaire l’a également utilisé pour détenir des militants et des dissidents. De nombreuses informations ont fait état d’agressions à l’encontre de détenus à la fois par d’autres détenus et du personnel pénitentiaire, ainsi que d’une consommation de drogues et de maladies infectieuses.