Rebondir vers le marché du travail après 40 ans

L’association Actions Femmes Bretagne accompagne les femmes âgées de 40 ans et plus à retrouver un nouveau souffle, donner un nouveau sens ou une nouvelle énergie à leur carrière.

L’équipe bénévole de l’association Actions Femmes Bretagne – DR

La structure est soutenue par ad’missions, Amundi, le Crédit Agricole et la Fondation Orange. Sa mission est de soutenir des pépites – brillantes par définition – qui ont connues une rupture dans leur vie professionnelle. Premier parcours professionnel, période d’inactivité liée à un licenciement, burn-out, déménagement, interruption pour élever leurs enfants, “les motifs de rupture sont nombreuses, notamment pour les femmes” c’est ce qu’explique Daniel Bouvier, bénévole au sein de l’association en même temps qu’il en est le secrétaire.

Cette association a été créée en 2022, à la suite d’une autre, et a depuis lors accompagné 40 femmes sur le chemin du retour à l’emploi avec un taux de réussite important. “Sur le bassin Ille-et-Vilaine, le marché de l’emploi est très dynamique, c’est une chance car cela permet de proposer aux pépites que nous accompagnons un rebond, avec le choix” explique le secrétaire de l’association.

Les accompagnants viennent d’horizons différents, D.R.H., coach, chef d’entreprise, enseignants avec une proportion de 70 % de femmes et 30 % d’hommes.

Les bénévoles accompagnateurs au sein de l’association dont 70 % de femmes – DR

Quel accompagnement ?

L’accompagnement que propose Actions Femmes Bretagne vise à permettre à chaque femme de retrouver en elle la confiance, le pouvoir d’agir, de prendre en main sa recherche et de comprendre qu’elle est une véritable pépite pour la société” continue Daniel. Et s’il n’y a pas de guillemets autour du mot pépite c’est parce que le bénévole considère viscéralement que chacune des femmes candidate à un accompagnement comme une pépite pour la société.

Cet accompagnement se caractérise par la désignation d’un bénévole référent pour la partie individuelle (identification des points forts, des compétences, détection des envies…) et recherche du chemin. L’accompagnante et l’accompagnée se rencontrent environ une fois par mois.

Dans ce parcours initiatique, la structure propose aussi en complément des ateliers : 

  • Ateliers d’accompagnement mon image & mon réseau
  • Atelier Linkedin
  • Atelier pour les femmes créatrices d’entreprise
  • Ateliers digitaux par la fondation Orange pour utiliser les outils très demandés aujourd’hui dans l’entreprise
  • Cafés réseaux pour permettre aux femmes accompagnées de se rencontrer

Et va prochainement proposer des ateliers de codéveloppement, visant à trouver collectivement des réponses à des problématiques individuelles dans le parcours de retour vers l’emploi.

Et, à l’issue de cet accompagnement, 40 % se dirigent vers la création d’entreprise et 60 % reprennent une activité salariée. Et cela “sans frustration pour celles qui étaient dans une démarche de création d’entreprise et ont changé de chemin, car nous avons travaillé ensemble à l’étude de faisabilité du projet, parfois avec le soutien des Boutiques de Gestion ou d’autres structures. Pour ne rien forcer dans le parcours mais faire prendre conscience. Notre association est un marchepied vers l’emploi, quelle qu’en soit sa forme, pas une baguette magique pour réaliser ses projets” explique Daniel.

Les dames qu’accompagne Actions Femmes Bretagne n’ont pas un profil type. “Chaque situation est différente et fruit d’une vie différente. Certaines éprouvent une envie de création d’entreprise, d’autres de revenir au travail. La seule condition est d’être inscrite à Pole Emploi, donc d’être déjà dans une dynamique de retour à l’emploi” explique Daniel Bouvier.

Les entreprises présentes en Ille-et-Vilaine participent de la dynamique créée par l’association – DR

On s’en doute, les causes de la perte d’emploi sont multiples, licenciements, rupture conventionnelle voulue dans le cadre d’un projet construit ou contrainte pour suivre un époux ou sortir d’une situation précarisée dans l’emploi. “La plupart des dames que nous accompagnons ont un niveau d’étude élevé, il est possible que les métiers moins qualifiés soient plus accessibles alors que l’association pourrait être un formidable tremplin pour une femme qui souhaiterait améliorer sa situation professionnelle” ajoute le bénévole.

De quels moyens l’association dispose-t-elle ?

Pour ses d’action, l’association s’appuie sur ses partenaires et… Sur les bonnes volontés de ses membres. Elle est présente à Vanne, Rennes, Saint-Brieuc et le sera très prochainement à Saint-Malo, preuve s’il en fallait une, que le retour vers l’emploi est une vraie question en Ille-et-Vilaine. Faut-il y voir un contrecoup de l’effet COVID-19, qui a amené beaucoup de personnes vers l’ouest de la France ?

Dans tous les cas, l’objectif est clair, être un acteur de proximité et offrir aux femmes dans le besoin des rencontres physiques.

Evidemment, les femmes aidées le sont gracieusement dans le cadre d’une charte.

La difficulté est réelle” ajoute Daniel “pour simplement trouver une salle de réunion dans une ville, car notre implantation géographique est multiple et les élus locaux ont du mal à arbitrer entre les nombreuses demandes.

Quels engagements ?

On pourrait imaginer que les dames accompagnées soient uniquement consommatrices des ressources et des services de l’association. Pour pallier à cela, la structure a mis sur pied une charte de fonctionnement bi-partite entre la personne accompagnée et la structure, qui valorise les engagements des uns et des autres (assiduité, ponctualité, volonté, inscription dans la démarche, …) et qui correspondent peu ou prou à ce que demande le monde de l’entreprise pour des femmes qui, parfois, l’ont quitté de longue date.

La structure, elle, s’engage à fournir des moyens à la personne accompagnée, à un secret absolu quant à son action envers elle.

C’est d’un contrat moral de confiance et de conscience qu’il s’agit, pas d’un contrat légalisé.

Quelle démarche pour une femme désirant de l’aide ? 

Un seul canal pour demander un accompagnement, le site internet de l’association, https://actionsfemmesbretagne.bzh/. Après qu’elle se soit inscrite en demande, la pépite est recontactée par la présidente qui la rencontre au cours d’un premier atelier pour évaluer les projets.

Puis, au cours d’une réunion des bénévoles, un compte rendu est fait pour chaque femme et un bénévole désigné ou volontaire, selon les compétences des uns et des autres.

Ce bénévole est et restera référent pour la pépite accompagnée durant tout son parcours, y-compris lorsqu’il pourra faire appel, ponctuellement, aux compétences d’un autre membre de l’association..

Pour Daniel Bouvier “en réalité, se faire aider, c’est résoudre 80 % des problèmes.

Pour le secrétaire de l’association, se faire aider, c’est résoudre 80 % du « problème » – DR

Et ce n’est sans doute pas vrai que dans le cadre d’un accompagnement vers le retour dans le milieu professionnel, se faire aider c’est conscientiser ses difficultés et commencer à chercher, inconsciemment des, ses, solutions.

C’est avec le recul des années et de l’ancienne structure qui avait, elle, accompagné plus de 500 femmes, que Daniel Bouvier parle avec modestie mais précision de cette démarche efficace et novatrice, dans un monde du travail en pleine mutation et dont les contours futurs sont encore particulièrement flous.

L’Abandon de l’Aide Médicale d’Etat … une grave erreur ?

En 2022, les recettes de la branche maladie de la Sécurité Sociale proviennent de 11,3 millions de cotisants. Les caisses primaires d’assurance maladie de la Sécurité Nociale ont décaissé 221,6 milliards d’euros nets qui se répartissent à 43 % dans la médecine de ville, 40 % les établissements de santé (hôpitaux, dispensaires…), les, 17 % restants se répartissent dans d’autres domaines, dont les charges de fonctionnement, l’aide médicale d’état ou les fonds d’intervention régionales. Ces chiffres sont en provenance directe du gouvernement (consultables sur https://www.securite-sociale.fr/files/live/sites/SSFR/files/medias/DSS/2023/Chiffres%20cles%20de%20la%20DSS%202022.pdf)

Dr Mathilde Chouquet, vice-présidente de l’association ReAGJIR – DR

En zoomant, notamment au regard du récent débat sur le budget de la sécurité sociale mêlé bien opportunément à celui sur l’immigration (on se demande en quoi ils sont liés), on se rend compte que l’Aide Médicale d’Etat, que la candidate RN aux dernières élections présidentielles considérait comme “injuste à l’égard d’un tiers des Français qui n’arrive pas à se soigner” (source : BFMTV-RMC interview face à Jean-Jacques Bourdin, 12 Janvier 2022)” coûte entre 0,7 et 1 milliard d’euro au budget de l’état (source : institut Montaigne) et concerne moins de 400.000 personnes en France.

C’est au Dr Mathilde Chouquet, établie à Rennes en Ille-et-Vilaine et vice-présidente de l’association ReAGJIR (Regroupement Autonome des Généralistes Jeunes Installés et Remplaçants) que j’ai demandé des éclaircissements sur cette mesure, après que l’association ait communiqué sur le remplacement de l’AME par l’AMU, qu’elle considère telle “la perte d’un le moyen donné aux professionnels de santé de poursuivre leur devoir déontologique: prendre soin de tous, sans distinction”.

La structure est particulièrement sensibilisée à la question de l’AME. En effet, dans le désert médical qui commence à s’étendre dans toutes les régions de France, les jeunes médecins sont ceux qui prennent en charge, en premier, les personnes dans les plus grandes souffrances. Y compris, donc, ces “sans-papiers” comme on les nomme pudiquement, mais qui ont néanmoins eu maille à partir avec les paperasses des CPAM pour bénéficier de cette aide.

Contrairement au fantasme largement répandu” commence la vice-présidente “le bénéfice de cette aide médicale d’état n’est ni automatique, ni systématique. Moins de 50 % des patients qui pourraient bénéficier de cette aide en font la demande; pour de multiples raisons, qu’il s’agisse de méconnaissance ou de difficultés linguistiques.

Il faut dire que les conditions d’octroi de cette aide sont particulièrement exigeantes : 

  • Ne disposer d’aucun titre de séjour régulier en France
  • Percevoir moins de 800 € par mois (sauf pour les mineurs)
  • Ne pas avoir être demandeur d’asile (un autre dispositif existe dans ce cas)
  • Renouveler chaque année la demande d’AME, qui peut être refusée
  • Nécessiter des soins qui ne font pas partie de la liste établie par l’Article R251-3 du Code de l’action sociale et des familles.

En d’autres termes … être en bonne santé au moment de la demande !

L’association ReAGFIR millite activement pour un accès égal aux soins pour toutes et tous – DR

Souvent” poursuit le médecin “les personnes exilées ne sont pas en excellente santé eu égard à leur parcours. Les pathologies les plus courantes sont des psychotraumatismes liés d’une part au parcours migratoire, d’autre part à ce qui au vécu qui a donné naissance à ce parcours. Sur l’ensemble de la population migrant dans notre pays, ce sont environ 10 % qui le font pour des motifs médicaux. Et sur ce – faible – pourcentage, seuls 66 % bénéficient de l’aide médicale d’état. »

L’étude de l’IRDES de décembre 2023 (https://www.irdes.fr/recherche/questions-d-economie-de-la-sante/284-une-analyse-des-consommations-de-soins-de-ville-des-personnes-couvertes-par-l-aide-medicale-de-l-etat.pdf) est particulièrement révélatrice d’une situation dans laquelle les malades dépositaires de cette aide ne sont pas de surconsommateurs de soins ni de médicaments. La fameuse “Carte vitale qui fait le tour du foyer SONACOTRA” est purement et simplement un mensonge. En 2018, le bénéficiaire de l’AME a “coûté” en moyenne 1.138,8 € là où le bénéficiaire de la Complémentaire santé solidaire non contributive (CSS-NC) a fait dépenser 1.219,1 € au budget de la France. Soit un total, pour l’année 2022, d’environ 1.2 Milliards d’Euros, sur un budget, rappelons-le, de 221,6 milliards d’euros. C’est donc environ 0,5 % du budget de la sécurité sociale universelle qui est consacrée à celles et ceux qui, après avoir fui guerres, famines, persécutions et tortures sont venus trouver refuge en France.

Le passage d’une aide médicale d’état à une aide médicale d’urgence restreindra les possibilités à ces patients de bénéficier d’un suivi médical absolument nécessaire à la mise sur pied d’une démarche de santé globale”. D’autant que rien dans le projet de loi ne prévoit que les consultations de médecine générale ne soient couvertes. “C’est un service minimum de santé qui est mis en place, foulant du pied le principe égalitaire d’accès aux soins et cantonnant celles et ceux qui n’ont pas ce bénéfice aux urgences des hôpitaux, déjà saturées” poursuit le Dr Mathilde Chouquet.

Dit plus simplement, les consultations pour des pathologies bénignes ne seront plus prises en charge, ce sont donc autant de foyers d’infections qui vont s’installer dans les conditions de salubrité déjà déplorables qui font le lit des personnes exilées en France.

Le message passé est fortement négatif” poursuit le Docteur “Pour les gens pauvres même Français qui pourraient eux aussi se voir, à terme, embarqués dans la lame de fond que constituerait ce passage de l’AME à l’AMU.

Que faire alors ? D’abord, ne pas céder aux sirènes des économies faciles, car c’est de cela qu’il s’agit. Ensuite, contacter nos députés pour leur rappeler les principes de Léon Blum et de 1936 puis ceux du Conseil national de la Résistance de créer un pays fait de solidarités et de bienveillance, pour toutes et tous.

Vous avez dit médecine à deux vitesses ?

Capital filles aide les jeunes femmes à passer le cap du Baccalauréat

Capital Filles est une association de type loi 1901, créée par Orange en 2012, en partenariat avec les ministères de l’Éducation nationale et de l’Enseignement supérieur. Elle se donne pour mission d’aider les jeunes femmes d’origine modestes ou de milieux sociaux défavorisés dans les années qui entourent la reine des épreuves scolaires en France, le Baccalauréat.

Henda Ben Atig, marraine au sein de l’association Capital Filles

Henda Ben Atig est une marraine. En langage Capital Filles, c’est elle qui prend par la main une élève issue d’un milieu défavorisé et l’accompagne, tout au long de son année de terminale et jusqu’à son bac +1. Cet accompagnement pluridisciplinaire vise plusieurs buts. Aider ces jeunes femmes à “trouver leur voie”, disposer d’un modèle de réussite (la marraine). “Recadrer et remettre sur les rails lorsqu’il faut le faire” ajoute Henda ben Atig.

Manager de Projet informatiques pour orange, Henda possède un bac +5 en biologie. Elle est aussi titulaire d’un Master 2 en management des systèmes informatiques. Autant dire que les études, elle connaît. Pour autant, sans projet clair dans la tête de la filleule, peu de chance de succès, la lancinante question “Pour quoi ? “vient souvent casser l’élan et l’impulsion.

C’est pour cela que l’association, fondée par Stéphane Richard et aujourd’hui présidée par Élizabeth Tchoungui prend des jeunes femmes volontaires et candidates à cet accompagnement. C’est à dessein donc qu’Henda consacre du temps dégagé d’Orange pour intervenir, dans des lycées pour présenter le programme et ses objectifs.

Le credo de l’association est simple, les filles sont capitales dans l’entreprise !

La marraine” explique Henda Ben Atig “ouvre sa disponibilité à l’étudiante, mais pas uniquement. Elle lui ouvre aussi un carnet d’adresses interne à l’entreprise partenaire et aux contacts dont dispose la marraine. Elle se positionne, c’est un élément primordial dans le parcours, comme un référent de succès et de réussite pour ces jeunes femmes qui, souvent, manquent de ces modèles dans leur environnement familial ou personnel”.

Une fois l’accompagnement achevé, la jeune fille n’est pas laissée seule face à son destin. Le lien de sororité qui s’est créé entre la marraine et sa filleule perdure, au-delà de l’association et il n’est pas rare, comme l’explique Henda Ben Atig “qu’une jeune accompagnée donne régulièrement des nouvelles à sa marraine”. Preuve s’il en fallait qu’un parcours main dans la main sera toujours plus efficace qu’une course en solitaire ! 

Pour rejoindre le programme, “les candidates renseignent un document traitant des attentes de l’accompagnement, indiquent si elles ont un projet professionnel ou pas. Et l’équipe Capital Filles choisit sa filleule. Une première rencontre au sein du lycée à une journée marraine / filleules est ensuite planifiée, dans un environnement connu, de tous les binômes.” C’est ainsi, que se met en route un partenariat entre la filleule et sa marraine.

Les rencontres suivantes se tiennent à rythme adaptatif avec un plan d’action, définition du projet et travail sur le CV et la lettre de motivation. Puis le binôme travaille à rechercher d’éventuelles lacunes et des solutions pour les combler.

Il arrive souvent que les jeunes filles aient des projets professionnels qui soient assez inaccessibles, eu égard à leurs compétences notamment” commente la marraine. “Dans ce cas, mon rôle est aussi de faire prendre conscience de cette impossibilité à la jeune femme et de creuser autour de ses passions et de sa vie pour y trouver un creuset bouillonnant d’idées qui n’ont pas été exploitées”.

C’est certainement là la puissance de cet accompagnement. Soulever, sans a priori ni filtre social le couvercle des vies toutes plus passionnantes les unes que les autres et y déceler ce qui fera vibrer l’étudiante. “Souvent”, constate l’accompagnatrice “nous sommes face à un schéma de reproduction sociale. Issues de situations sociales fragiles, les jeunes filles n’osent pas se projeter dans du grand. C’est notre rôle de les y aider. Autrement, ce sont des compétences gâchées !

Capital Filles ne s’appuie sur aucune méthodologie ou aucun principe précis. La structure se limite à la sélection des candidates et la création des binômes. Ensuite, c’est la personnalité de la marraine et celle de la filleule qui créeront un rythme et une méthode de travail. Les parents ne sont pas nécessairement impliqués dans l’accompagnement, même si, comme l’explique la marraine “Des jeunes filles ont invité leurs mamans à la cérémonie des 10 ans de l’association capital filles.

Cérémonie des dix ans de l’association Capital Filles, en 2022

Là où certains verraient pour les entreprises partenaires un vivier de futures salariées, Capital Filles met un point d’honneur à ce que les accompagnatrices aient des échanges réguliers entre elles, quelle que soit leur entreprise d’appartenance. Ces rencontres viennent enrichir les cursus des façons de faire ailleurs.

Élizabeth Tchoungui entourée des marraines et de leurs filleules lors des 10 ans de l’association

Mon Objectif et celui de toutes les marraines” conclu Henda “est de dire aux jeunes filles que j’accompagne qu’on peut rebondir si on se trompe, et que rien n’est jamais perdu”.

Vous pouvez suivre les actions et l’actualité de l’association sur son site internet, capitalfilles.fr

BD : « La Chauve sourit », pour continuer d’apprendre, tout en s’amusant !

L’annonce d’un cancer, particulièrement chez les femmes, est un traumatisme. La vie qui s’en suit n’est évidemment pas facile, avec de nombreux examens, traitements de chimiothérapie et moments difficiles. La situation devient encore plus pénible quand l’entourage, sans s’en rendre compte, décharge son stress et son inquiétude sur la personne malade.

C’est de tout cela dont Caroline Le Flour parle dans son livre “La Chauve Sourit”, illustré avec brio par Gaëlle Le Louet. Le cancer est un compagnon d’infortune rendu encore plus inopportun qu’on ne fait que devenir, en l’occurrence, une cancéreuse en cessant d’être femme dès le diagnostic posé.

Caroline Le Flour

Pourtant, si au cours de l’enfance nous étions, femmes comme hommes, sensibilisés à l’existence de ces cancers, à la mortalité qui peut être réduite par les examens possibles et par la nature de ces maladies, malades comme proches pourraient prendre cette nouvelle avec plus de distance et de recul.

Ne vous attendez pas à rire à toutes les pages. Ne vous attendez pas non plus à pleurer, l’autrice est une warrior, elle est passée par le burn-out, le cancer la fécondation in vitro et la déclaration d’infertilité. Que lui manquait-il ?

Gaëlle Le Louet

La présence rassurante d’un ami, d’un amant ou d’une personne silencieuse et attentive qui ne juge pas et sait apporter les mots justes peut être bénéfique.

Et il est compliqué à trouver cet ami.

Pour certaines, il s’agira du conjoint, pour d’autres il s’agira des médecins là où certaines préféreront des groupes de parole. Au même titre qu’il n’y a pas un cancer, il n’y a pas un accompagnant. Il y en a autant que de malades.

Ce livre, pimpant et féminin – allez, osons le mot, « girly » – à souhait est à mettre entre toutes les mains, notamment masculines. En tant qu’homme, j’y ai appris des choses que ni l’école ni la société ni nous, journalistes, n’avions jamais abordé. Non, tous les corps ne sont pas prédisposés aux cancers. Non le cancer des ovaires n’est pas un cancer invisible et forcément mortel. Non, le cancer du sein ne signifie pas perte de féminité. Non, la perte des cheveux n’est pas un sujet tabou. Non, Non, Non.

Tuer les préjugés, voilà la première utilité de ce livre. Les tuer dans l’oeuf, pour redonner à celles et à ceux – car il ne s’adresse pas uniquement aux femmes, bien au contraire – qui sont touchés, l’espoir qu’on se peut de donner lorsque le couperet tombe.

Oui, ce livre est à la fois émouvant, remuant et motivant.

On n’en ressort pas indemne. Au même titre qu’on ne ressort sans doute pas indemne d’un cancer ni d’un parcours de vie tel que celui de Caroline Le Flour.

On ressort grandi de “La Chauve sourit”, grandi d’un sourire, grandi d’un regard différent sur l’autre et grandi de l’espoir qui, jamais, ne disparaît lorsqu’apparait “LA” maladie.

La Chauve Sourit, écrit par Caroline Le Flour, illustré par Gaëlle Le Louët aux Editions Trédaniel

Dossier 4/4 : Chirurgie de l’obésité, miroir aux alouettes de la perte de poids

Depuis plus d’une dizaine d’années maintenant, des solutions chirurgicales plus ou moins invasives sont proposées aux malades atteints d’obésité. Ces méthodes offrent une solution mécanique à une pathologie complexe qui mêle à la fois des soucis hormonaux, psychologiques, alimentaires et comportementaux. Loin des clichés du summer body, voyage au cœur des malades du surpoids.

Savez-vous comment perdre 20, 30, 40 ou 80 kilos en quelques semaines seulement ?

L’auteur en 2014
Le même auteur, en 2016

La méthode existe, elle est simple. Elle consiste à rendre inopérante une portion importante de votre intestin (environ 1,50 mètre pour un by-pass gastrique). Ou encore de réduire la taille de votre estomac à celle d’un pot de yaourt. Définitives et ultimes, ces méthodes sont efficaces. Sur le court terme, il n’y a pas de choix, le corps se trouve chamboulé, la malabsorption – dans le cas du by-pass – ou la sensation rapide de satiété – dans le cas de la sleeve gastrectomie – feront disparaître les kilos en trop comme neige au soleil.

Reconnaissance du statut de maladie

Le surpoids, l’embonpoint, les kilos en trop … Longtemps, notamment en France, être rond a été synonyme de bien-être et de confort matériel. Notre culture judéo-chrétienne autant que gastronomique nous a amenés à honorer la nourriture. “Termine ton assiette”, “Il vaut mieux faire envie que pitié”, “Un gros c’est gentil”. Toutes ces injonctions au poids ont fixé l’image d’Epinal du gros heureux, bien portant, fortuné et qui a réussi, depuis des centaines sinon des milliers d’années.

Il aura fallu attendre les années quatre-vingt-dix pour que le surpoids soit d’abord vu comme vecteur de maladies. Atteintes cardiaques, articulaires, perte d’autonomie. C’est d’abord par les conséquences que les pouvoirs publics ont abordé la question. Il s’agissait de réduire le poids pour qu’il ne pose plus de problèmes. Donc la santé physique uniquement.

L’évolution du regard médical sur le poids aura fait que d’une conséquence, l’obésité est devenue une cause à traiter. Sont apparus alors des régimes tous plus inutiles les uns que les autres. Dukan, hyper ceci ou hypo cela, protéiques, à faible indice glycémique, les marchands de bonne santé en tube auront tout essayé pour faire maigrir la population. Avec, le plus souvent, un vrai succès, à court terme. Les premiers kilos facilement perdus – aux alentours de la dizaine – il fallait s’attaquer au fond des choses.

Les malades stagnent sur la balance avec seulement ces quelques dizaines de milliers de grammes en moins sur la balance et des centaines d’euros en moins sur le compte en banque, abandonnent la méthode miracle. Le corps se venge et, là où dix kilos ont été perdus, il en reprend vingt, au cas où.

Le mode famine de notre organisme

C’est la découverte de ce mécanisme dit du mode “famine” qui aura été déclencheur des évolutions spectaculaires des chirurgies bariatriques. L’organisme humain sait s’adapter aux petites quantités d’aliment. Lorsque peu de nourriture lui est fournie, il apprend à stocker ce qui lui servira pour survivre. D’où la stabilisation rapide du poids après les premiers kilos perdus (l’âge d’or de la perte de poids dure environ 2 ans) et une reprise rapide et importante des kilos lors du retour à une alimentation conventionnelle.

Ce mode famine est un des résultats des disettes qui ont, autrefois, frappé l’espèce humaine. Les années “sans” (mauvaises récoltes, maladies dans les troupeaux…), les corps de nos ancêtres se satisfaisaient de ce qui leur était donné pour survivre.

La différence majeure avec la période actuelle est que nous sommes entrés dans une ère de disponibilité alimentaire quasi-permanente. Les fast-foods comme certains restaurants traditionnels sont de plus en plus souvent ouverts 24 / 24, nos réfrigérateurs sont pleins de victuailles et l’industrie alimentaire a su nous offrir des aliments toujours plus riches en goût, donc en nutriments pas toujours sans conséquences sur notre santé. La disponibilité de nourriture, le plus souvent de la junk food, est rendue presque instantanée avec des solutions de livraison à domicile de hamburgers, de pizzas et autres aliments riches en calories là où il fallait, avant, faire l’effort – aussi minime soit-il – de se déplacer au restaurant.

Le sucre, désigné ennemi numéro un, a détrôné le sel dans la composition de notre alimentation. Le gras est venu apporter moelleux et longueur en bouche. Les édulcorants donnent bonne conscience et maintiennent l’appétence pour la douceur ingurgitée.

Et le cycle s’entretient, se répète et engendre des prises de poids lentes mais insidieuses.

L’obésité, qu’on qualifie de morbide, de faible ou de simple, est définie par l’Organisation Mondiale de la Santé comme un indice de masse corporelle (IMC) supérieur à 30. Cet indice correspond au poids divisé par le carré de la taille, exprimé en kg/m. Inconvénient de l’IMC, sa valeur n’est significative que pour la personne concernée par la mesure. En effet, elle ne fait pas de distinction entre le poids du muscle, celui des os et celui de la masse grasse que comporte l’organisme du sujet.

L’OMS estime que, depuis 1975, le nombre de malades de l’obésité a été multiplié par trois. En trente ans, 650 millions de personnes – dix fois la population française approximativement – sont touchées par cet état. Parmi eux, 38 millions d’enfants de moins de 5 ans sont  en surpoids ou obèses.

Les conséquences de l’obésité sont connues. Maladies coronariennes, cardiaques, articulaires, dépression, cancers ne sont que quelques-uns des résultats les plus visibles des maladies qui touchent les gros.

La reconnaissance de l’obésité en tant que maladie remonte au début des années 2000. Jusqu’alors, elle n’était vue que comme une conséquence de la suralimentation et du manque d’activité physique. Jamais, avant cette période, personne ne se posait la question des causes de la maladie en elle-même.

Traiter la conséquence en ignorant la cause 

Mauvaise éducation alimentaire, traumatismes du jeune âge, hérédité, pauvreté sont autant d’axes de travail que la santé a pris en main. Et ces dix dernières années, les solutions à base de chirurgie sont devenues les seules méthodes de prise en charge des malades. Omettant au passage, le plus souvent, les autres aspects. Il fallait répondre à la prise de poids avec une méthode qui apporte des résultats rapides.

En omettant les autres causes de la maladie, les acteurs de la santé préparaient les patients à une désillusion violente. Ne traiter ni l’aspect psychologique ni l’aspect social revient à dire aux malades qu’on leur propose une solution qui va les amener rapidement dans un nouveau corps. Avec de nouvelles habitudes, de nouveaux vêtements (que certains ne pourront pas se payer), de nouveaux médicaments à prendre à vie (dont la majorité n’est pas prise en charge par le système de santé), de nouveaux réflexes à acquérir… Tout cela après 24 ou 48 heures passées à l’hôpital. 

Le sport et l’activité physique sont une solution « miracle » pour l’entourage médical comme proche

Et en quelques mois seulement.

La perte de poids est un traumatisme

La diminution rapide du poids affiché sur la balance est une récompense énorme pour le gros. “Enfin” pense-t-il. Enfin, effectivement, il rejoint la normalité. Il retourne dans la moyenne, parfois un peu trop bas d’ailleurs. Il peut, donc, se permettre de cesser tous les régimes qu’il a testés, les pilules miracles et autres astuces vestimentaires. Le gros ne l’est plus. L’humain qui se cachait dans ce corps trop lourd, trop encombrant, trop gras n’existe plus. Il faut, à 30, 40, 50 ou 70 ans découvrir un nouveau soi-même. Un nouveau style. Une nouvelle dimension corporelle. Le gros doit, en quelques mois, réaliser le travail de toute une vie.

Pendant que l’aspect change, la personnalité évolue. Le caractère du gros change aussi. Il n’a plus besoin d’être un “passe-partout”, il a aujourd’hui droit au chapitre et il doit apprendre à équilibrer ses interventions.

S’il est en couple, dans plus de la moitié des cas il divorcera car la cellule qui existait était fondée sur un état qui a disparu. Et l’autre, qui n’a pas perdu le poids, n’a pas suivi le rythme rapide des bouleversements que connaît le malade.

Le traumatisme de la perte de poids est une violence inouïe trop souvent oubliée dans les brochures qui proposent ces traitements chirurgicaux.

Redécouvrir son image

L’ex-gros aura tendance à devenir autocentré. Il se prend souvent en photo, demande l’avis des autres sur son apparence. Il s’essaye à de nouveaux styles vestimentaires, de nouveaux sports, de nouvelles pratiques de vie, qu’elles soient de couple ou extraconjugales.

Le rapport à la nouvelle image passe par une sur-exposition à soi-même, à la recherche d’une nouvelle identité

La découverte de l’image est un plaisir jusqu’au jour où l’ancien obèse découvre que ce corps, si longtemps haï, a été déformé par la chirurgie réalisée. La peau du ventre qui tombe, les cuisses qui n’ont plus de fermeté. Les paupières décharnées. Et le froid, la découverte du froid, dont la couche de graisse précédemment présente isolait.

Le poids perdu engendre une déformation de la peau

Ce sont les premiers désagréments qui apparaissent après quelques mois. La pression sociale existe toujours, car le monde n’a pas changé sauf dans le corps du gros. Le “Reprends en un petit peu, tu peux te le permettre”  a remplacé le “Je comprends, tu fais attention à ton poids”. Ni l’une, ni l’autre de ces invectives ne sont gentilles ni compatissantes. Elles sont, l’une comme l’autre, les stigmates d’un système basé sur la consommation à outrance. Et l’ancien ennemi de la balance accepte ces injonctions à faire “comme tout le monde”. Manger comme tout le monde, reprendre une part de gâteau. Ajouter un peu de mayonnaise dans les frites. Boire un petit peu plus sucré qu’avant.

L’apprentissage d’une nouvelle alimentation est nécessaire

Le cerveau gagne toujours la bataille

Insidieusement, le cerveau a compris qu’il ne recevait plus autant de calories qu’il en avait reçues des années durant. Il active alors le mode famine auquel il ajoute une intelligence impressionnante d’analyse.

Chacun sait qu’il y a plus de calories, à volume égal, dans de la salade verte que dans des frites. Que pensez-vous que le cerveau favorise et demandera à la main d’appréhender ?

Il est particulièrement difficile d’expliquer, pour un gros, cette réaction. Car il ne la contrôle pas. Il ne s’agit pas d’une question de volonté – en déplaise aux nutritionnistes – ou de manque de sérieux. C’est le parcours de vie, les raisons qui ont amené l’enfant, l’adolescent qu’était l’adulte gros qui sont à traiter, pas son poids instantané.

La bataille entre le gros et son cerveau est longue et périlleuse. S’il n’est pas accompagné, s’il n’a pas les alliés nécessaires, psychiatres notamment, il est certain de perdre la partie.

Les traumatismes de l’enfance, le vécu, les messages véhiculés par la famille, par les médias, par l’école comme par les amis conditionnent, c’est aujourd’hui une certitude, l’adulte en devenir. La génération en cours est le fruit des enfants de la seconde guerre mondiale. Ces enfants ont connu le manque de nourriture et ont transporté avec eux – cela se comprend sans aucune difficulté – les valeurs que le conflit leur a imposées. C’est donc tout naturellement que nos parents nous ont enseigné cette vénération de la nourriture. Ajoutez des facteurs génétiques évidents (certains stockent plus que d’autres, c’est ainsi), une propension psychologique à créer ce que certains appelleront un coussin, une ceinture ou une muraille entre le gros et les autres. Vous aurez confectionné le gâteau de l’obésité.

Un Combat quotidien

Peu importent les injonctions des médecins, des nutritionnistes ou des chirurgiens après les opérations. Une fois que la machine à reprendre du poids a été enclenchée, rien ne peut en arrêter la marche, sinon comprendre ce dont le malade de l’obésité se protège.

Et accepter que ce combat, au cours de chaque repas, ne soit peut-être finalement qu’une maladie physique.

En 2022, la reprise de poids est évidente

Dossier 3/4 : Regard sur le corps gros, la vision de l’anthropologue

Le corps gros

Ghislaine Gallenga est une chercheuse, professeure des Universités à Aix Marseille Université, Ethnologue, Anthropologue et travaille au sein d’une UMR (Unité Mixte de Recherche du CNRS) à l’IDEMEC (Institut d’ethnologie méditerranéenne européenne et comparative).

Sa spécialisation en tant qu’anthropologue est celle du changement. En s’immergeant dans le poste de travail des sujets de son étude, Ghislaine Gallenga se met “à la place de ceux dont elle parle”. Ainsi, pour ce qui a trait à l’obésité, est-elle en train de préparer un BTS de Diététique, pour avoir le regard d’un nutritionniste sur la question.

Aussi étonnant que cela puisse sembler, aborder le regard sur le gros – l’obésité est l’appellation médicale du surpoids – sous l’angle du changement nécessite de prendre en compte le fait que la prise, comme la perte, de poids est un changement majeur du corps, pour celui qui le porte (“le gros”) comme pour celles et ceux (“la société”) qui l’entourent.

Cette approche, qu’on pourrait résumer par “être gros est un changement”, Ghislaine Gallenga la travaille en regardant, c’est son métier d’anthropologue qui le veut, le passé et le présent. Elle ne saurait prédire l’avenir, même si certaines réalités sont bel et bien visibles, notamment en ce qui concerne la paupérisation des classes les plus pauvres face à la nourriture.

Economiste de formation, Ghislaine Gallenga apporte sur l’analyse anthropologique dans la cité le regard de l’économiste, mettant en rapport l’entreprise, le sujet et l’environnement dans le commun, pour amener des propositions de politiques publiques qui visent à minimiser les impacts de l’obésité sur la santé.

Enfin, comme elle l’explique elle-même, Madame Gallenga travaille plus sur “le corps gros que sur l’obésité, qui est une définition médicale”.

Qu’est-ce que l’obésité ?

L’obésité est, selon Ghislaine Gallenga, une construction sociale et historique qui s’est installée au fur et à mesure du temps. Il aura fallu attendre 1997 pour que l’Organisation Mondiale de la Santé considère l’obésité comme une maladie et ce n’est qu’en 2000 que c’est devenu une épidémie.

Le catalyseur long a été le renversement récent des perceptions autour de l’obésité.

Au moyen-âge, le manque de nourriture encensait les corps gras et gros, signes de bienséance

Ghislaine Gallenga explique les épisodes de l’histoire du corps gros en se basant sur l’historien Georges Vigarello : “Au Moyen Âge, le corps gros est valorisé car il est synonyme de richesse et d’abondance. En effet, à cette époque, seules les personnes aisées avaient accès à de la nourriture convenable. Etre gros, alors, constituait le marqueur social d’une certaine réussite, d’un statut. A la renaissance, la société prend conscience que les gros ne peuvent faire certaines choses, essoufflement, manque de mobilité, morbidité plus importante commencent à entrer dans les esprits comme étant des conséquences de ces corps gros. Et, au XIXe siècle, les compagnies d’assurances mettent en place le principe de l’Indice de Masse Corporelle pour établir des statistiques de mortalité des personnes à couvrir.

Pour autant, c’est en 1701 que l’obésité est définie dans le champ médical.

Maladie de civilisation

On pourrait parler de maladie de civilisation” poursuit la chercheuse “due en effet à une alimentation trop grasse et sucrée. Mais c’est un raccourci insuffisant car l’obésité est plurifactorielle, elle renvoie systématiquement sur la mollesse, le laisser-aller, le non-contrôle. Sa présence rappelle la nécessité, l’injonction presque à la maîtrise du corps et de l’ensemble. Il faut être l’entrepreneur du soi, gouverner et diriger son corps. La société demande dynamisme et vitesse, elle est bâtie contre la sédentarité.

Aujourd’hui, les employeurs sont sensibilisés à la grossophobie car beaucoup de travail a été mis en place pour contrer les discriminations. “Néanmoins” poursuit-elle “Certaines entreprises ont installé des salles de sport, on y transpose le dynamisme sportif sur le dynamisme professionnel. D’une manière générale, on pense que le gros est responsable de cet état.

En elle-même, l’obésité n’a pas de coût. Ce sont les comorbidités (articulations, diabète, maladies cardiovasculaires …) qui représentent un coût pour la société. Par la faute de l’anormalité du gros, il coûte de l’argent à la société, il demeure montré du doigt en tant que victime et auteur de son état.

Pourquoi devient-on obèse ?

On ne devient pas obèse” ajoute l’anthropologue “il faut un diagnostic d’obésité pour que la personne concernée accepte son état.” Avec une vision qu’il faut élargir au-delà de notre prisme d’Ouest-européens. Dans certaines régions (notamment au Maghreb), l’embonpoint est encore bien vu. Ou encore, en Mauritanie, le gavage des femmes, pour qu’elles prennent du poids, est encore pratiqué.

Le niveau social n’est pas un indicateur fiable de l’approche de l’obésité, c’est le niveau de vie qui tend à montrer que l’obésité est dominante dans les classes basses de la société.

Politiques publiques et lobbys

Les individus sont aujourd’hui soumis à des doubles contraintes et des injonctions paradoxales, il faut à la fois consommer et être mince, donc dans la décroissance. Les politiques publiques (la “taxe soda” par exemple) se heurtent à l’opposition dure des lobbys dans une société néolibérale qui travaille, dès l’enfance, à formater et créer le goût et des appétences pour le sucré ou le gras.

« Le regard sur l’obésité masculine est plus violent que le regard sur l’obésité féminine, même si elle est mieux tolérée, car on questionne la masculinité à travers la nourriture. Bien manger, c’est pour les hommes forts et costauds. 

Le porno connaît aussi sa tendance “feeders” qui veut que la femme ne soit qu’un corps récipiendaire d’une quantité énorme de nourriture.

Enfin, les “fat acceptance“ laissent penser que la prise de poids est une prise de pouvoir sur son propre corps et donc d’un succès.

L’obésité est peuplée d’idées contre-intuitives

Les Troubles du Comportement Alimentaires, le plus souvent à l’origine de l’obésité, sont aujourd’hui identifiés dans leur mécanisme, addiction, circuit de récompenses.

Dire qu’il faut “bouger, faire des régimes … C’est grossophobe et discriminatoire” pour la spécialiste.

« Bouge toi et tu perdras du poids », ou comment culpabiliser un enfant dés sa prime enfance dans la gestion de sa nutrition. (Wikipedia/Wsiegmund)

Les chirurgies de l’obésité sont un “mieux que rien” mais, seules, elles ne suffisent pas. “Il est impératif qu’un suivi global soit mis en place avant, pendant et après la perte de poids. Sans quoi, passé la période de lune de miel d’environ deux années au cours de laquelle la perte de poids est presque automatique, les addictions vont revenir. Le plus souvent à la nourriture, car c’est la plus facile à obtenir, mais souvent aussi à d’autres activités qui vont de nouveau donner au cerveau sa dose de plaisir. C’est alors que le jeu, l’alcoolisme, l’orthorexie ou les drogues ont leur chance de s’imposer” ajoute Ghislaine Gallenga.

Un nombre important de bouleversements se produisent dans la vie des opérés, on connaît une augmentation des cas de divorces, tentatives de suicide, dépressions nerveuses. Les personnes qui subissent des opérations de l’obésité restent des “obèses minces” toute leur vie, explique-t-elle.

La nostalgie de l’âge d’or

Longtemps encore après l’opération et la perte de poids, l’ex-obèse conservera certains réflexes comme le réglage du siège de voiture, la taille des vêtements … Et une fois qu’il aura terminé la période de lune de miel va s’installer la nostalgie de l’âge d’or. Le besoin de retrouver l’équilibre qui préexistait avant l’opération, quand l’obésité était présente.

Dossier 1/4 : L’été arrive, il faut penser au body summer ! 

Si vous faisiez ne serait-ce qu’un effort pour perdre ce ventre !

Le voilà, le fameux marronnier du printemps. Mesdames, Mesdemoiselles et souvent Messieurs, vous êtes gros, bien trop gros.

Grosses et grosses, faites un effort. Mangez de la salade de chou arrosée de jus détox et, croix de bois, croix de fer, vous entrerez dans du 34.

Voilà l’été

L’injonction saisonnière à préparer l’été pour exhiber un beau corps sur la plage, doré à souhait, en pleine forme et en pleine santé entre en jeu.

Vous êtes, nous sommes, responsables en intégralité de notre corps. Si nous prenons du poids, c’est par notre faute. Si nous en perdons, c’est grâce aux régimes que magazines, publicités et autres nous recommandent.

De l’hyperconsommation alimentaire à l’hyperconsommation pour se désalimenter ne sortira jamais qu’une seule chose, une prise perpétuelle de poids, incontrôlée et de plus en plus incontrôlable.

J’aperçois le soleil

Devinez au bénéfice de qui ? 

Ce dossier sur l’obésité vous montrera, par les exemples et les interventions de spécialistes ce qu’est cette maladie (car c’en est une) et quels sont les effets pervers de ces régimes aléatoires dans une société où l’efficacité, l’agilité, le self-control et l’arrogance ont pris le pas.

Et les dieux sont ravis

Prêts pour votre body somme mort ?

Bon été, avec Brillante Magazine, le premier qui ne vous conseillera jamais de maigrir !

Dossier 2/4 : Les traitements chirurgicaux de l’obésité

Comme chaque année, la chasse au Summer body est ouverte … méfiance (Flickr/We Are Social)

Les solutions pour accompagner le traitement de l’obésité par voie chirurgicale sont de deux grandes familles. Les sleeves gastrectomies proposent de réduire volume et forme de l’estomac. Les Bypass gastriques, eux, opèrent en empêchant l’absorption par le corps de certains nutriments qui ont amené à la prise de poids.

Comme le rappellent les médecines anciennes, le corps est une machine formidable basée sur de nombreux équilibres. Ces équilibres sont nutritionnels, psychologiques, sociaux et endocriniens.

Cécile Betry est médecin spécialisée et chercheuse en nutrition. Elle alerte sur les dangers des régimes amaigrissants, qui sont à risque de perte de muscle et de développement de troubles du comportement alimentaire. Ses travaux de recherche portent actuellement sur la mesure de la masse musculaire grâce à des méthodes innovantes (intelligence artificielle et données massives en santé) afin d’optimiser le diagnostic de la dénutrition et de la sarcopénie. Elle a également publié des articles sur la chirurgie bariatrique et ses complications.

Elle mène des recherches dans les domaines annexes à l’obésité, la diabétologie, la nutrition et l’endocrinologie, en plus de sa pratique hospitalière et de son titre de Maître de conférences des universités.

Rares complications alimentaires

Dans son travail sur la dénutrition, Cécile Betry explique “il y a peu de complications à proprement parler alimentaires. La plupart des patients comprennent bien la nécessité de modifier son alimentation car la mécanique interne a évolué. Le geste opératoire en lui-même est maîtrisé aujourd’hui, et les cas de sténoses ou de fistules sont rares.”

Cependant, comme l’explique l’enseignante, “les complications de la chirurgie bariatrique sont parfois découvertes sous un angle neurologique ou psychiatrique. Souvent éloignées de l’acte chirurgical en lui-même de durées qui peuvent se compter en années.” Ce qui rend leur détection et le lien de causalité bien plus compliqué à établir pour des médecins généralistes qui n’ont pas été formés, dans leurs cursus, aux problématiques de chirurgie bariatrique. Le taux de patience en “errance médicale”, est supérieur chez les personnes opérées que chez les personnes qui ne le sont pas.

Là où les choses se compliquent, c’est que “le suivi postopératoire n’était pas valorisé par la sécurité sociale jusqu’à maintenant, ce qui est en train de changer. Alors que le suivi préopératoire était imposé par la sécurité sociale. Le patient candidat à une chirurgie de l’obésité doit rencontrer de nombreux spécialistes avant que ne soit octroyé le feu vert de l’opération.” ajoute Cécile Betry.

Accès compliqué et démotivant ?

L’accès à la chirurgie bariatrique est assez compliqué d’accès” commence la spécialiste. “En moyenne 3 à 6 mois avant la première consultation avec un médecin pour ce sujet en particulier, avec un parcours total qui s’étale sur environ 18 mois. Ce temps préopératoire est extrêmement profitable au patient pour commencer les rééquilibrages alimentaires avant le coup de bistouri.” continue-t-elle.

Comme partout sur le territoire, des inégalités existent. Il est aujourd’hui bien plus rapide et simple de se faire opérer à Lyon qu’à Paris, selon les associations de patients.

Chirurgie bariatrique et accompagnement psychologique

L’obésité est une maladie complexe, personne ne sait expliquer pourquoi certaines personnes deviennent obèses et d’autres pas, à alimentation similaire. 

On évoque souvent des traumas dans les histoires de vie” selon la spécialiste qui voit là “une réponse simple à une question complexe.” 

C’est l’un des objectifs du parcours préopératoire que de comprendre pour quelle raison la personne a pris du poids. Déterminer les comportements obésogènes comme les mal-être.

Un avant et surtout un après

La détection des addictions est l’un des aspects les plus complexes” selon la spécialiste. La nourriture peut être utilisée à visée réconfortante. “Et si on ne peut plus utiliser la nourriture dans ce cadre-là, report d’addiction avec augmentation du risque alcoolique, y compris à large distance de la chirurgie.” conclut-elle.

La psychiatrie de ville apporte un soutien et une écoute aux patients, que les soignants hospitaliers n’ont plus le temps d’offrir. “Souvent, la problématique de l’alimentation est peu abordée par les psychiatres. Les TCA (Troubles du Comportement Alimentaire) font peur à la fois au corpus psychiatrique et au corpus généralistes car ils présentent des implications borderline entre les deux domaines. On retrouve donc des patients qui n’obtiennent de réponse ni d’un côté, ni de l’autre, après leurs chirurgies.

Le patient idéal de la chirurgie bariatrique ? 

Selon la chercheuse, le corps n’est pas fait pour perdre du poids. Certaines personnes ont pris du poids à un moment de leur vie pour différentes raisons identifiables (repas d’affaires, traditions familiales …) et ont un poids stabilisé, sans trauma persistant ni identifié. Ces personnes sont les candidats parfaits à une chirurgie qui sera l’outil qu’il manquait à leur gestion du surpoids. “Mais ils ne sont pas la majorité des opérés” , ajoute-t-elle.

Quid de la déformation des corps ? 

Dans de nombreux cas d’opérations, les patients conservent une insatisfaction de leur corps. On assiste à de nombreuses difficultés de perception de l’image corporelle par rapport aux attendus parfois non exprimés ou, pire, fantasmés. La réappropriation du corps est une chose, le manque ou l’absence d’imagination du corps à venir en est une autre. Et la médecine ne sait pas accompagner vers cette transformation, par nature incontrôlable a priori.

Mettons-nous au summer body !

Par chance” commence le médecin, “le rééquilibrage alimentaire prend aujourd’hui un peu le pas sur les régimes miracles. On peut cependant perdre du poids très rapidement, c’est possible, c’est ce à quoi on assiste d’ailleurs lorsque des patients sont en réanimation ou hospitalisés pour une longue durée. Ce poids est toujours repris lorsqu’il est perdu sous la contrainte, car le cerveau a une mémoire du corps précédent et va envoyer des messages pour retrouver le corps précédent, celui de la fin d’automne !

L’image et l’injonction à la minceur existent toujours, seule les méthodes évoluent (Flickr/orangemania)

Surtout “en perdant du poids rapidement, on perd muscle et graisse. Ce qui conditionne la survie de l’espèce, c’est la quantité de muscles. Le cerveau va envoyer des messages pour reprendre du muscle. Et on va reprendre du gras avant de reprendre du muscle.” conclut l’enseignante.

Valeur et signification de l’IMC

Cet indice a été défini par les compagnies d’assurances pour estimer le risque des personnes couvertes. C’est une approximation en médecine. On a besoin d’être capable d’estimer la quantité de muscles d’un patient. L’obésité se définit donc sur une approximation. Attention, ce n’est pas un mauvais indice, il n’indique pas le risque d’obésité pour une personne donnée” explique l’endocrinologie qui ajoute “l’obésité peut être métaboliquement saine. Certaines personnes sont en “bonne santé” en ayant un IMC important.

Le vrai calcul doit se baser sur l’évaluation de la quantité de muscles, la quantité et la localisation de la masse grasse. Graisse viscérale dangereuse, tout comme la graisse aux cuisses et hanches.” explique la spécialiste. Mais, encore une fois, ceci n’est que généralité, chaque personne est différente, et quelque bourrelet ne signifie pas une obésité ni un IMC anormal.

La culture culinaire en question

On a pour coutume de dire qu’en France “on mange bien, bon et gras”. C’est, selon ce qu’explique la spécialiste relativement faux.

La tradition culinaire française n’est pas mauvaise en elle-même (Flickr/Paull Young)

« Le mode de vie à la française c’est le côté gourmet et ce n’est pas en faveur de l’obésité. C’est prendre du plaisir à manger. On est à l’écoute de faim, de satiété. Quand on n’a plus faim, on n’a plus faim, c’est ce que permet la structure de nos repas. Entrée légère, plat, fromage et ou dessert viennent apporter la quantité censément nécessaire d’aliments et de nutriments à notre corps pour être en bonne santé.

Le danger apparaît lorsque se met en place ce qu’on appelle la faim hédonique. On ne mange alors plus par faim mais par envie. Ce n’est plus l’estomac qui crie famine, mais le cerveau” ajoute la chercheuse qui insiste sur le fait qu’il existe une “controverse quant au fait que les produits gras transformés pourraient engendrer de l’obésité, amenant à une situation dans laquelle la nourriture ne comble pas, ne comble plus, la faim.

Et après l’opération ?

Les lendemains ne sont pas tous sombres pour les personnes qui ont connu une chirurgie bariatrique. “Si un certain nombre d’études montrent des patients perdus de vue, on sait aujourd’hui qu’il y a moins de mortalité chez les opérés que chez les non opérés.” complète la spécialiste.

Une difficulté existe néanmoins, les messages de refus de chirurgie sont de plus en plus difficiles à entendre par les patients qui voudraient du “fast-régime” sur commande.

Quel avenir pour nos enfants dans ce monde de gros ? 

Le Body Summer n’est ni une bonne idée, ni un objectif. Les différents spécialistes rencontrés, les échanges et les témoignages rappellent tous que l’équilibrage alimentaire est, à l’instar des mathématiques ou de l’histoire de France, une notion à appréhender dès l’enfance pour créer des adultes qui consommeront de l’alimentation en conscience et en connaissance de leurs besoins.

S’alimenter mieux s’apprend et, y compris dans des périodes de forte augmentation des prix comme nous la connaissons actuellement. Un kilo de haricots verts, en conserve comme frais, ne coûte pas plus cher qu’un repas au fast-food du coin. S’il ne s’agit surtout pas de priver de l’un au  bénéfice de l’autre, il s’agit de répartir en conscience les occurrences de l’ensemble des apports alimentaires qui composent notre assiette.

Abandonnez, abandonnons cette idée du Body Summer et du corps parfait. Car il n’existe pas, car les corps sont tous différents et aucun n’est difforme. Car se maltraiter pendant 3 semaines est la garantie de mettre en place une machine mortifère et génératrice de prise de poids et qui, en bout de chaîne, ne servira qu’à enrichir les marchands de régimes.

Manger bien et manger sain, c’est aussi respecter le rythme biologique des saisons. Si les tomates, les courgettes et autres cucurbitacées poussent en été, c’est pour nous apporter l’eau dont nous pouvons avoir besoin à cette saison.

Les arbres à hamburgers poussent toute l’année, il est peut-être temps de se poser les bonnes questions … 

Caroline Madjar, de l’actu des stars au roman noir avec Le Regard du Hérisson

Née à Paris il y a quelques dizaines d’années, Caroline Madjar est issue d’une famille de journalistes. Elle exerce aujourd’hui en tant que rédactrice en chef chez Cover Media, depuis Londres. Le Regard du Hérisson, aux éditions « Auteurs du Monde », sera disponible en librairies le 24 février 2023.

Le métier de journaliste a pour particularité, notamment, d’obliger le rédacteur à la vérité, seule et unique. Le travestissement, la déformation ou encore la manipulation de cette vérité est une faute, grave, qui remettrait fondamentalement en cause l’éthique personnelle de l’auteur de ces changements. C’est aussi ce qui fait que le public, les lecteurs, accorde ou non sa confiance à un média ou à un autre.

C’est donc depuis la capitale Britannique qu’elle a accepté de nous parler. Non pas de son métier. Enfin si, mais d’une facette bien fréquente mais rarement assumée par les journalistes, la brûlante envie de pouvoir raconter une histoire façonnée de toutes pièces.

Le regard du hérisson, de Caroline Madjar
Le regard du hérisson, de Caroline Madjar

Habituée à parler des stars et de musique – des sujets bien plus profonds et en prise avec la société que le simple côté show-business qu’on imagine – Caroline est une multipassionnée, un peu touche à tout, comme les gosses des années quatre-vingt qui ont vu défiler sous leurs yeux tant d’évolutions et de révolutions qu’ils ont une soif de tout essayer. C’est ainsi que, parmi ses cordes, la journaliste explique « Parfois, je passe des disques, à l’ancienne, qui craquent et qui sautent. » Pour parler des mix qu’elle prend plaisir dans quelques pubs londoniens.

Parler des stars sans fard

Pour Caroline, « parler des stars, ce n’est pas que le côté jet-set bling-bling. J’aime informer, quel que soit le sujet et si, aujourd’hui, on parle plus facilement de l’endométriose par exemple, c’est parce que certaines vedettes telles que la chanteuse Lory s’est exprimée publiquement à ce sujet. Encore, Kim Kardashian ne fait pas qu’une émission de télé réalité, elle milite aussi pour une réforme de la justice carcérale aux États-Unis« .

Caroline Madjar à Londres -
Caroline Madjar photographiée à Londres, par Paul Gallagher – ©PaulGallagher

Et parce qu’elle aime mots et lettres, la rédactrice en chef s’est lancée dans l’écriture de son premier roman. Il sort le 24 février et s’appelle « Le regard du Hérisson« . Le raccourci serait facile de se dire qu’en faisant marcher les relations, un journaliste un petit peu connu a toutes les portes ouvertes pour faire un roman et puis voilà. C’est l’inverse qu’a vécu Caroline Madjar qui explique « Un livre demeure un produit de consommation et l’éditeur a besoin de gagner de l’argent pour faire fonctionner son entreprise, au même titre que le libraire. Informer c’est un métier, écrire des livres, je ne le vois pas comme un métier. Je voulais créer mon univers et mon sujet. Les possibles sont infinis dans les romans, mais il y a une nécessité de sens, de codes et des impératifs éditoriaux différents de la presse« .

Pourquoi créer une dystopie quand on en a assez dans l’assiette ?

Le roman Le regard du Hérisson est un roman réaliste. A mille lieux de la tendance dystopique actuelle (à croire que l’actualité est si vide et creuse qu’il faut inventer les choses), le premier roman de mon amie – car je vous dois cette vérité – Caroline est réaliste dans sa forme. Il démarre sur un crime dans le quartier des Batignolles à Paris, se poursuit dans le Londres de Camden pour s’achever à l’île d’Yeu. « Les rues, les bars, les pubs et les paysages que je décris existent réellement » insiste l’autrice, « je n’ai rien eu à inventer. Les lecteurs pourront, s’ils en ont envie, aller retrouver les lieux dont je parle, car ils sont réels » explique celle à qui Anne Rice a donné envie d’aller découvrir la Louisiane.

Le Dublin Castle, cité dans le livre, est un pub qui existe réellement à Londres
Le Dublin Castle, pub Lodonien

Dans son livre, Caroline Madjar met des morceaux d’elle-même. La musique a une large place, la gastronomie aussi.

Un crime, whatelse ?

Pour faire simple, deux femmes ont été retrouvées tuées dans le quartier des Batignolles, affreusement mutilées par un tueur qui leur volait les yeux. C’est sur cette base que démarre le roman de Caroline. La commissaire enquête, les rideaux s’écartent comme pour mieux voir celui ou celle qui est le tueur ou, pire, qui sera la prochaine victime. Hélène, une libraire, déterminée à relancer le commerce de son père, refuse la peur et continue son œuvre quotidienne. Survient un troisième homicide et, alors, les plans de tous les protagonistes sont bouleversés. Absolument tous.

Il faut lire les 320 pages de ce roman pour comprendre toute l’histoire. Se laisser partir sur de fausses pistes. Se perdre et faire demi-tour dans des chemins de campagne, jusqu’à obtenir la vérité. Pas avant.

Un livre à l’ère des réseaux sociaux ?

Caroline aurait pu, comme cela a déjà été fait, publier un blog en ligne avec ses textes, éventuellement payant. Ce faisant elle aurait sans doute brûlé une étape cruciale, la relation presque charnelle qu’il peut exister entre un lecteur et un livre.

C’est en militante que l’habituée des réseaux sociaux (son compte Instagram @caromadjar et son site https://carolinemadjar.com/ sont ses outils du quotidien) a choisi de passer par une maison d’édition, par des libraires et par du vrai papier pour sortir son ouvrage. Et aussi pour se prouver, comme si c’était nécessaire, qu’elle était capable de le faire. Capable de sortir un bouquin, se faire conseiller, apprendre, être corrigée, relue, critiquée jusqu’à l’épreuve finale, le « Bon à Tirer » ferme et définitif.

Elle a peur, Caroline. Mais c’est trop tard, aléa jacta est. Le sort est jeté, le livre est déjà arrivé dans les points de vente. Le regard du Hérisson, qu’il soit ou non un succès littéraire (il n’y a pas de raison qu’il ne le soit pas) est et restera le livre qu’elle a écrit.

« Aller à la rencontre des gens qui ont voulu venir à la rencontre de mon livre« 

Pour la suite, Caroline aimerait « aller rencontrer celles et ceux qui sont venus rencontrer son livre. Ou même ceux qui se seraient amusés à sur les lieux que je cite, ce serait très drôle« . En tout cas, c’est bel et bien de l’humain, du concret, sans chatbot ni intelligence artificielle qu’espère l’autrice.

« Je voudrais que mon livre voyage. Il y a des lieux précis où se passe l’action. Tu lis un livre pour voyager, si ça te donne envie de découvrir un lieu, c’est bien. » Ajoute-t-elle, fière et timide à la fois. Fière qu’au moins une personne, au sein de la Maison « Auteurs du Monde » ait apprécié sa plume. Timide, car on ne se refait pas.

Lorsqu’on lui parle de la suite du regard du Hérisson, c’est avec l’éclat des passionnés dans l’œil que Caroline Madjar répond « Le tome 2 est prêt, peut-être. »

L’objectif, à court terme, de Caroline Madjar, simplissime « Aller à la rencontre de mes lecteurs. Ça me fait peur et c’est attractif. Tu écris pour être lu et aller à la rencontre des gens qui t’ont lu. C’est comme un rêve éveillé en somme !« 

Souhaitons à Caroline Madjar que Le Regard du Hérisson soit – il le sera – un succès de librairie et qu’il donnera envie à ses nombreuses lectrices et lecteurs d’aller s’accouder au « 3 pièces cuisine » de croiser Amy Winehouse et les Gallagher au « Dublin Castle » avant d’aller regarder rentrer les pêcheurs à Port Joinville.

Les lieux cités dans le livre Le regard du Hérisson existent bel et bien
De vrais lieux cités

Le Regard du Hérisson, aux éditions « Auteurs du Monde », dans toutes les librairies dès le 24 février 2023. En Attendant, n’hésitez pas une seconde à suivre Caro sur Instagram (@caromadjar) et la découvrir un petit peu plus sur son site https://carolinemadjar.com/.

Caroline est avant tout une belle personne, possédant sa propre personnalité, ses goûts et ses opinions.

Elle possède un réel talent de journaliste et c’est seule, à force d’échecs et de succès qu’elle est devenue, aujourd’hui celle qu’elle est.

Ce livre, son premier livre, est comme elle, brillant, fougueux et explosif !

Charlotte Mery, lorsqu’une femme parle des courses au large

Le milieu de la course au large a beau se féminiser de plus en plus, les livres qui traitent du sujet des courses au large font toujours la part belle aux hommes. Ainsi, ce sont plus de 60 % des livres édités sur le sujet, qui sont écrits par des hommes. Rencontre avec une autrice que rien ne prédestinait à présenter sa vision des courses au large.

Charlotte Méry, Maman, Autrice et Navigatrice
Charlotte Mery – Tout droits réservés

Savez-vous qui mieux qu’un spécialiste peut parler d’un sujet ? Celle ou celui qui le pratique par passion, au-delà des difficultés, des traditions ou des héritages familiaux qui vous prédestinent dès l’enfance.

Lorsque l’amour s’en mêle

Charlotte Mery est de ceux-là. Née en Mayenne – bien loin de la mer donc – elle est tombée amoureuse d’un beau britannique, ami de l’un de ses cousins, qui avait pour particularité de suivre des études d’architecture navale. Autant dire qu’à l’âge des premiers émois sentimentaux, le raccourci est rapidement fait. Elle a aujourd’hui deux enfants – une fille de 10 mois et un garçon de 2 ans et demi.

C’est à 14 ans que Charlotte découvre le métier d’Architecte Naval, loin de la mer de laquelle elle est déjà éprise. Elle se lance alors dans la navigation nautique pour mettre en place la stratégie qui lui permettra de dessiner des bateaux.

Un parcours de compétitions et de hasards

Inscrite aux championnats de France UNSS de son lycée, elle parcourt les bourses aux équipiers pour trouver des bateaux à bord desquels naviguer de par le globe. Décidément liée au hasard et aux coïncidences, c’est au cours d’une soirée en boîte de nuit qu’elle rencontre la championne de France de 470, Cassandre Blandin, qui, parce qu’elle est grande, lui demande si “des fois, elle n’aurait pas envie de faire du bateau ? ».

Commence alors pour la future autrice une course acharnée à l’apprentissage : “Je naviguais trois jours par semaine et il y avait beaucoup de compétitions, quasiment chaque week-end” explique Charlotte.

Charlotte Mery sur le pont, seule, d'un bateau
Charlotte Mery seule sur le pont de son bateau

Impatiente, c’est elle-même qui le dit, Charlotte achève tant bien que mal ses études puis se lance, en 2017, dans le circuit de la course au large, avec la classique mini-transat. Au fond d’elle, elle sait bien, comme elle l’explique qu’elle “ ne veux pas en faire un métier car le haut niveau apporte beaucoup trop de contraintes sur la vie personnelle.

Les défis avant le reste

Charlotte recherche de l’aventure et du feeling. En toute chose, elle ne se donne jamais à moitié, y  compris en écriture. Son précédent livre, “Le Vendée Globe de Mam” qui explique aux enfants et à ceux qui le sont restés ce qu’est la course au large, elle l’édite elle-même car elle sent qu’elle a des choses à dire mais pas encore de nom pour en attirer un grand de l’édition.

Le Vendée Globe de Mam, premier livre de Charlotte Mery

C’est avec romantisme et humanité que Charlotte se lance, avec le concours des éditions Glénat, dans la rédaction de son second livre “Une histoire des courses au large”. Ainsi qu’elle le dit “Ce livre n’est pas un livre de l’Histoire de la course au large. Il faudrait être bien prétentieux pour parler de l’intégralité des courses existantes tant elles sont nombreuses. Et, surtout, je n’ai pas pratiqué toutes les courses, donc j’ai choisi l’aspect romantique et humain des courses que je connais”.

Et ce romantisme déborde dans la manière que Charlotte Mery a d’écrire. Si la technique et la compétition ne sont jamais très loin, l’humain, les sensations et les désirs des individus sont bien présents à chaque page. C’est ce qui différencie Charlotte de ses confrères auteurs et autrices, elle n’a pas de long CV maritime qui aurait pu déformer son rêve.

Il y a encore de l’humain dans la course au large

En 2022, selon Charlotte : “Il y a toujours autant d’humain et d’humanité dans la course au large, seulement le caractère même de cette humanité a changé. Les skippers sont des compétiteurs, tout est compté, tout est calculé et au service de la performance. Les bateaux sont de plus en plus difficiles à faire marcher.

Ici s’arrête la comparaison car, parmi ses modèles, Charlotte évoque Tracy Edwards, qui ouvrit la « voix » et la « voie » aux femmes dans le monde des skippers dans les années quatre-vingt-dix.

Tracy Edwards, la femme qui ouvrit la course au large aux Femmes
Tracy Edwards a ouvert la voie de la grande course au large aux femmes (Crédit : Royal & Sunalliance)

Selon Charlotte : “Il y a, aujourd’hui de plus en plus de femmes qui naviguent, c’est presque devenu normal. L’imaginaire collectif (les sponsors, le public…) par contre, n’est pas encore totalement prêt à voir une femme skipper.” Charlotte d’expliquer alors qu’un de ses partenaires s’est étonné devant elle, sans aucune discrétion ni délicatesse qu’une femme puisse faire de la voile, alors même qu’il connaissait l’objet de leur rencontre. 

Dans le circuit en lui-même, Charlotte ne rencontre pas de misogynie particulière. “Du moins, pas plus qu’ailleurs”, pondère-t-elle. Entre marins, pas de remarque ni de critiques sexuées.

Ce sont les proches qui, dans son cas, ont eu du mal à se dire qu’une femme était capable. Il faut dire que, venant d’une famille de garçons, Charlotte a dû jouer des coudes pour s’imposer !

Se faire confiance et s’écouter avant tout

Pour Charlotte, la principale qualité dont une femme doit faire preuve, quel que soit son métier : “est de se faire confiance. Elle doit s’écouter et ne pas écouter les autres. Surtout, ne pas porter attention aux commentaires sur les réseaux sociaux. Chacun sait ce qui est bon pour lui ou pour elle. Et personne n’est mieux placé que lui-même pour connaître son propre écosystème.

Pour l’exemple, Charlotte compare une course au large avec son expérience de la maternité : “Avant l’accouchement, tout le monde nous dit comment faire. On nous explique comment on doit se comporter avec le bébé, comment le tenir et l’éduquer. Devenue Maman; on sent presque instinctivement comment s’y prendre, comment bien faire. Il ne s’agit pas de dire qu’on n’a pas besoin des autres. On a, dans tous les domaines, besoin de soi et de son expérience en premier lieu.

De l’impossibilité d’être à la fois maman et navigatrice

Dans sa conception à la fois de la maternité et de la navigation, Charlotte ne se projette pas comme menant les deux métiers de front. Elle nous explique donc : “Je navigue dans les livres. Je ne vogue plus, ça ne me manque pas du tout. J’ai énormément skippé pendant une dizaine d’années. J’ai préféré arrêter car je n’envisageais pas d’être maman et navigatrice en même temps, j’admire celles qui y parviennent. Je m’amuserais aujourd’hui plus sur un petit bateau que sur un bateau avec gros équipage.”.

Mais le parfum de l’Iode n’est jamais loin de la plume de Charlotte “On prévoit de partir en famille quand les enfants auront une dizaine d’années pour faire un tour de l’atlantique. En attendant, j’ai d’autres livres en vue, autour de la jeunesse notamment. Et je planche sur un roman qui parlera de la mer, de la course au large et de la place quel a femme y trouve. Ou pas.


C’est bel et bien l’Humanisme et le Romantisme qui pilotent la vie de Charlotte Mery. Si sa maternité a mis entre parenthèses sa vie maritime, c’est avec des parenthèses douces et confortables et, surtout, choisies et acceptées en toute conscience. Charlotte Mery n’est pas dans le modèle du choix stéréotypé, souvent rencontré par les nouvelles mères, entre leurs carrières et leurs enfants.

Et si on apprenait enfin à dire Non ? 

Dans un monde positiviste et optimiste à l’extrême, le non semble être devenu une arme de destruction massive. C’est pourtant, en tant qu’enfant, l’une de nos premières réponses à toutes les demandes. Stéphanie Lautecaze propose de retrouver l’usage de ce “Non” trop souvent oublié et pourtant si simple à prononcer !

Stéphanie Lautecaze – Droits réservés

Oui, j’avoue. Et vous aussi d’ailleurs, nous avons le “oui” facile.

Stéphanie lautecaze a 47 ans et habite dans le sud-ouest de la France. Ancienne directrice des ressources humaines de grandes entreprises françaises, dont Veolia, elle a été amenée à fermer trois sites importants, notamment en France.

Dire non, tout simplement

Cette maman d’une petite fille de 5 ans est revenue en France du Liban en 2019. Elle est titulaire d’une licence en psychologie et adepte de la gestalt-thérapie, qu’elle résume par “une approche globale de la personne, de son environnement, son mode de vie, sa position et sa posture.”

La fonction RH est une fonction à Burnout !

De manière pas si surprenante que cela, notre discussion démarre sur un constat que dresse Stéphanie Lautecaze “Les métiers RH, et notamment la direction des ressources humaines, est un métier particulièrement propice au burn-out. Le Directeur des Ressources Humaines, souvent coincé entre des demandes financières d’un côté et humaines de l’autre ne sait pas ou ne sait plus dire non aux uns ni aux autres et prend sur lui les fruits de décisions qui ne sont pas les siennes”.

Selon l’ex-DRH, en France, il y a “6 millions de burn-out chaque année, dont 2.5 Millions de burn-out sévères (qui induiront des difficultés à reprendre le travail un jour). C’est un coût de 80 milliards d’euros dans la santé mentale et pour l’économie du pays” continue-t-elle.

La question qui vient à l’esprit est de tenter de comprendre le cheminement qui a amené Stéphanie Lautecaze à passer de l’autre côté du miroir, passant de la ressource humaine à la relation humaine ? 

Elle nous explique “Pour parvenir à accompagner des personnes, il faut avoir vécu. Vécu l’entreprise, vécu la pression, vécu les sensations et vécu le mal-être qui peuvent exister dans les grandes entreprises.” “Je voulais depuis longtemps » poursuit-elle “à la fois accompagner des humains et aller vers l’entreprise.” Sortie d’école de commerce, elle cherche sa voie dans ce dilemme et arrive à la conclusion que la fonction RH est la plus proche de la psychologie pour elle. C’est donc ainsi qu’elle approchera pour la première fois le monde de l’entreprise.

Rapidement peu à l’aise dans ce qu’on lui demandait à l’époque, elle crée plusieurs plateformes (psy, sophrologie, coaching) qui, toutes, tendent à rappeler que l’humain est apte à l’acceptation comme au refus. C’est d’ailleurs un des credo de la plateforme “Je dis Non !”

Le message le plus compliqué” selon Stéphanie Lautecaze “est à passer aux entreprises. Autoriser les salariés à dire Non, c’est autoriser la remise en cause de la hiérarchie quasi patriarcale en place. Cela passe par une remise en question des échelles de valeur et de compétences dans l’organisation”.

Pourquoi ne dit-on pas non ?

Nous avons peur de décevoir et de nous opposer à la demande de l’autre. “Très souvent, cette crainte est liée à notre histoire et à des croyances que nous avons construites tout au long de notre vie. En entreprise par exemple, si l’un dit non, un autre dira oui et sera mieux vu” explique la coach. C’est d’autant plus présent chez les femmes qu’on a déformées à dire oui très tôt: “Oui pour faire la bise au monsieur”, “oui pour mettre cette jolie robe rose”. Un lavage de cerveau qui démarre dès l’enfance en somme ! 

L’élan vers le non, vers ce refus, nécessite à la fois soutien et mouvement d’ensemble. “L’exemple inspirant en ce moment de ce qui se masse en Iran en est la preuve flagrante. Les femmes sont nombreuses et sont soutenues par des hommes. C’est à ces deux conditions que le refus peut se mettre en place et, potentiellement, gagner la bataille.” 

Le soutien est le premier pilier du “dire non” ajoute la spécialiste qui continue “Il est important de disposer d’une béquille sur laquelle appuyer ce refus en étant certain qu’elle ne cédera pas. »

La déconnexion d’avec soi-même

Selon Stéphanie lautecaze “Il existe une catégorie de personnes qui ne sentent pas qu’elles veulent dire non. Déconnexion d’avec les sensations et les choix, il faut ralentir énormément  le rythme et la fréquence des demandes avec ces personnes pour qu’elles aient le temps de sentir ce “non et de le dire” sans culpabilité..

L’absence trop répétée de “non”, et donc l’impact physiologique de cette acceptation presque pathologique sont aujourd’hui connus et reconnus, sur certains cancers notamment. Les malades, inconsciemment, acceptent la maladie comme étant un état contre lequel elles ne peuvent absolument rien, y compris se battre, quand bien même le combat serait perdu d’avance.

Le non et le rapport aux autres, égoïste ? 

En opposant un refus, on court le risque d’être taxé d’égoïsme. “Que je préfère appeler égotisme. Etre centré sur soi, sur ce qu’on veut, ce qu’on ne veut pas, ce qui nous fait du mal … “ explique Stéphanie Lautecaze. Cela permet de rappeler que ce “non” n’est pas un mal vis-à-vis de l’autre, mais un bien vis-à-vis de soi.

Il est possible de refuser sans agressivité

Dans ses formations, la spécialiste s’est rendu compte de la nécessité de beaucoup de mises en scène pour aider à aller vers le non. “Il est important de comprendre que colère et violence sont des émotions différentes, qui expriment des choses diamétralement opposées. L’une est la rupture pure et simple de la communication, alors que l’autre est, au contraire, une ouverture de cette communication.

Le non qui dit oui”, mythe ou réalité ?

C’est ce que j’appelle l’autoroute.” explique la thérapeute. “Quand on prend l’autoroute, on dit oui par réflexe. Ne voulant pas décevoir l’autre, on ne nous a jamais appris à dire non. C’est une réponse réflexe, pas pensée.” Il est, selon l’expérience de Stéphanie lautecaze, “important aussi d’apprendre à dire non à son thérapeute, à refuser certaines demandes de celui-ci qui peut, volontairement “pousser le curseur très loin. J’ai vu par exemple de thérapeutes demander volontairement des sommes colossales pour un suivi, pour montrer au patient qu’ils auraient dû dire non à ce moment précis, car leur conscience était claire, la somme est trop élevée.

Comment un homme peut-il différencier le “oui autoroute” du “oui pensé” ?

La femme qui veut exprimer ce nom doit, rapidement, affirmer au moins physiquement le refus qu’elle oppose à telle ou telle situation ou proposition. Par exemple, en reculant sa chaise de la table, en s’éloignant de ce partenaire, elle marque une distance plus propice à l’expression d’un nom.” « J’ajouterais » explique Stéphanie “qu’en cas d’abus sexuel, la société voit les hommes comme des violeurs par défaut. Il faut plus de justesse et de finesse et que chacun apprenne à prendre le temps, prendre son temps et ne pas céder aux dérapages que la société moderne nous offre.(tinder, meetic …).« 

Les outiks modernes, instantanés, sont propices à des oui qui veulent dire non

Les responsabilités, ainsi, sont vues croisées, la femme reprend confiance en elle et en sa capacité, son droit, de refuser quelque chose. Il n’y a pas plus de “méchants hommes” que de “femmes faciles”, simplement un biais cognitif de communication qui a amené les uns à ne plus savoir décoder le non, les autres à ne plus savoir l’exprimer.

La plateforme “Dire non ça s’apprend” ? 

Elle est financée par les entreprises qui y inscrivent leurs salariés.” explique sa fondatrice.

L’Inscription individuelle sur le site jedisnon.fr permet de payer des sessions en ligne avec des thérapeutes.

Nous avons fait le choix de ne travailler qu’avec des thérapeutes qui ont appris à dire non et qui expliquent à leurs futurs patients comment ils ont appris à le faire.

Ensuite, les rendez-vous se font via une interface en ligne, puis les paiements à la séance, au thérapeute directement.

Il n’y a pas de nécessité, pour les personnes en demande d’aide, de s’inscrire pour chercher, trouver ni choisir un thérapeute, ni pour recevoir le lien et pour le paiement à celui-ci. Les tarifs sont ceux fixés par le spécialiste, sans intervention du site..

Et Stéphanie lautecaze de conclure: « Le choix est le maître mot du site et du fonctionnement. Apprendre à faire autrement, selon les contextes, les lieux et les situations pour s’adapter aux messages passés aux personnes en demande.”

http://www.jedisnon.fr

Quand une globe trotteuse décide de créer sa vie autour de sa passion

Elinor après 8h  mushing par -35 °C
Elinor après 8h de mushing par -35 °C

Faire de sa vie un rêve et de son rêve une réalité. Ce mantra aux relents de diabolo menthe, certaines et certains ne font que le répéter.

Certains n’en font qu’une partie de leur CV.

Et d’autres construisent leur vie autour de ce but. C’est le cas d’Elinor Zucchet, qui nous parle de la façon dont elle a concilié rêves de voyage et réalité matérielle de la vie.

Et si vous laissiez tout tomber pour aller vivre votre rêve ? Faire le tour du monde en auto-stop, aller élever des chèvres dans les Andes ou vivre dans une tribu Masaï, nous sommes nombreux à caresser ces envies d’ailleurs et d’autre chose. Force est de constater que, souvent, le quotidien nous rattrape et les factures à payer, les contingences de chaque jour tout comme les obligations – plus ou moins contraintes – de la vie moderne nous font accepter ces sacrifices.

Aventure, vie et galères en vue

Sauf à avoir construit sa vie autour de ces objectifs de liberté et de vie alternative, comme l’a fait Elinor Zucchet, qui partage avec nous son parcours d’aventure, parcours de vie et, parfois, de galère.

Elle a 39 ans aujourd’hui, pas d’enfant et un couple construit avec un autre nomade des temps modernes, c’est depuis Sitges (Espagne) qu’elle nous parle. Elinor a suivi un parcours relativement atypique dès le début de sa scolarité d’adolescente. “Cette passion est née de mon premier voyage à l’étranger en solo.” Explique la voyageuse. “C’était un voyage scolaire à Londres – grand classique – et pendant que les autres passaient leur temps à jouer ou à faire les ados, je ne pouvais m’arrêter de regarder les paysages, les panneaux routiers différents et les habitudes si surprenantes que je découvrais.

Soutien Familial primordial

L’environnement familial d’Elinor lui permet d’envisager des voyages avec un peu plus d’aisance que les familles moyennes, une chance pour elle qui n’en demande pas plus “J’avais la volonté d’aller aux USA. Le financement du voyage a été découpé en cadeaux de Noël et d’Anniversaire. Je mettais de l’argent de côté pour y parvenir. C’était un investissement familial pas uniquement matériel, j’ai eu avant tout le privilège de naître dans une famille qui a compris l’importance des voyages et des langues dans le développement d’une personnalité.

En Alaska
En Alaska

Selon la globe-trotteuse, “Le système scolaire français n’étant pas très flexible, j’aurais aimé faire quelque chose au niveau des sciences et de la biologie, donc un domaine scientifique. En parallèle, je voulais étudier les langues, donc un domaine littéraire. C’est malheureusement impossible en France. Je me suis lancée dans du littéraire là où je pense que j’aurais aussi pu m’éclater encore plus dans la biologie animale.” regrette-t-elle.

Sortie du lycée, Elinor part pour 6 mois aux USA où elle rêve de retourner après un stage de surf à 15 ans. “Mes parents ne pouvaient pas payer les frais d’une université aux USA, nous avons trouvé une alternative dans un lycée au sein d’une famille d’accueil. J’ai donc à la fois travaillé et étudié durant ce semestre aux Etats-Unis.

Revenue des USA, avec un projet plus mûr, Elle se lance, malgré la mauvaise presse d’un certain tourisme de masse qu’elle considère mal géré, dans une formation « Master en European Tourism Management » au sein de l’IUP de Chambéry. Ces études l’amènent à faire des stages en République dominicaine, six mois en suède et six autres mois en Espagne.

Trouver ou créer des opportunités

Etudes terminées, Elinor part s’installer à Barcelone à la recherche d’un boulot, où vivait son amoureux d’alors. Elle trouve aisément un premier travail en tant que réceptionniste dans un hôtel. Elle quitte cet emploi et travaille durant 8 ans pour une agence française de séjour linguistique à l’étranger, gravissant les échelons doucement mais sûrement au sein de la structure.

Le hasard ne faisant rien sans raison, Elinor se blesse gravement dans un accident. Plusieurs mois d’immobilisation, des idées et de l’imaginaire plein la tête. Elle retourne dans un bureau, mais s’y sent trop à l’étroit. A cette époque précovid, le télétravail n’a pas la reconnaissance qu’on lui a donnée aujourd’hui. C’est donc frustrée et en manque de voyages que celle qui pose rarement son sac à dos cherche un moyen de concilier mobilité et revenus financiers.

Elle s’accorde un mois de vacances en Scandinavie, pour faire le point et, surtout, remettre en route sa machine à voyager. “Disposant de pas mal de cordes à mon arc, je me suis penchée sur la traduction et la rédaction web” explique Elinor, consciente que le marché du travail en Espagne lui permettrait, dans tous les cas, de rebondir en cas d’échec.

Une agence suisse de séjours linguistiques contacte Elinor pour travailler avec eux  à de la rédaction/ traduction d’articles. Elle permet à cette agence d’apporter un morceau de culture française à son offre.

Établie en tant que Freelance, en 2 ou 3 mois Elinor parvient à vivre correctement de son activité professionnelle, en multipliant les contrats et les petits travaux. C’est après 3 ou 4 années de tout-venant qu’elle a décidé de lever le pied et de devenir un peu plus regardante sur les travaux qu’elle réalise.

Sous les aurores boréales, Elinor et son conjoint à Lofofen
Sous les aurores boréales, Elinor et son conjoint à Lofofen

Aujourd’hui, avec mon conjoint nous sommes devenus des digital nomades qui ont un chez eux. Nous aimons avoir un nid douillet comme les Européens.” ajoute la rédactrice.  “Si nous adorons partir, nous aimons autant revenir aussi.”

C’est sans doute sur ce point que la notion de digital nomadisme (la capacité de travailler depuis n’importe quel point du globe) se différencie de l’Amérique du Nord. Jusqu’au COVID, aux Etats Unis, près de 20 %  de la population déménage chaque année, contre à peine 10 % des foyers français.

Le Nord ou rien !

La suite est logique. Elinor multiplie les voyages et se focalise sur les régions arctiques. Tombée amoureuse pour la Laponie Suédoise, Elinor change du tout au tout, de son mode de vie à ses destinations de vacances, tout sera teinté d’aurores boréales et de nuit polaire dans sa vie.

« On me traitait de folle lorsque j’allais dans ces régions. Alors qu’il y a une magie et une poésie dans les zones arctiques. On est dans l’apogée du sauvage en Europe. Notre continent  est aujourd’hui très développé et peuplé et rares sont les occasions de se retrouver face à soi-même. Et, contrairement aux idées reçues, lorsqu’on est bien équipé, les températures négatives ne sont pas du tout un problème ! » termine la voyageuse.

Son étoile du berger, ce sont les aurores boréales et la nuit polaire. “Ces phénomènes inconnus sous nos latitudes trop basses créent des couleurs toujours changeantes. S’il ne fait jamais vraiment ni nuit, ni jour, le ciel se pare en permanence de nouvelles teintes émouvantes. Quant aux aurores, ce sont des manifestations de la magie de l’univers. Des particules, venues du soleil, créent cette danse magique dans la voûte céleste.

La magie des aurores Boréales comme ici à Finnmark
La magie des aurores Boréales comme ici à Finnmark

« La culture scandinave me convient« , ajoute-t-elle. « C’est une fusion permanente avec la nature et, à l’opposé de l’image qu’on en a, si elle est très cosy en hiver, les gens vivent énormément dehors et une vraie vie sociale et de plein air existe dans ces pays froids.« 

Avoir plusieurs cordes à son arc

Aujourd’hui, Elinor mixe les métiers ; Rédactrice, elle propose des services de traduction, de tourisme ou encore de photographie des zones visitées. C’est la multiplicité des compétences qui donne à cette femme la sécurité de toujours rebondir. Comme elle l’explique “si un pays entre en crise, il faut savoir partir et ouvrir une autre destination pour toujours être dans le haut de la vague, sans donner l’impression qu’on fuit ce pays mais en offrant une autre de ses compétences, ailleurs” conseille-t-elle aux futurs nomades.

Le COVID a été une vraie leçon pour les entreprises

Selon la travailleuse nomade “Je comprends que les entreprises aient des craintes quand elles n’ont jamais testé le télétravail ni le nomadisme. Mais lorsque de bonnes relations sont en place entre entreprise et salarié, travailler depuis n’importe où n’a aucune importance. Les entreprises devraient établir des objectifs avec les salariés plutôt que de marquer à la culotte chacun, avec la tradition industrielle de la pointeuse à l’entrée de l’usine.

Pour Elinor, “le moment est idéal pour se lancer dans l’emploi nomade. Les esprits ont été bouleversés par la crise sanitaire et les entreprises ont enfin compris l’impact qu’avaient les déplacements sur la qualité du travail de leurs salariés. Lorsqu’on n’a plus à se soucier de trouver une nourrice, passer des heures de transport en commun ou dans les embouteillages, on est mieux dans son travail et plus efficace.” A condition d’être rigoureux et de savoir ériger les barrières entre vie professionnelle et vie personnelle, évidemment.

Etre une femme ailleurs dans le monde ?

En tant que femme, je n’ai pas l’impression d’avoir rencontré beaucoup d’obstacles. J’ai toujours voulu des environnements de travail internationaux. Cela ouvre l’esprit des personnes qu’on rencontre.” explique Elinor. Amenée à travailler tant avec des supérieurs hiérarchiques hommes que femme, la rédactrice a conscience que les personnes qu’elle côtoie sont comme elle, ouvertes d’esprit et en avance de quelques années sur la pensée dominante, ce qui facilite les échanges.

Etre une femme Européenne implique de ne jamais oublier nos privilèges
Etre une femme Européenne implique de ne jamais oublier nos privilèges

Une chose est certaine, dans la majorité des cas, on rencontre des gens bien partout. Il faut juste avoir un peu de bon sens et être prudente où que l’on se trouve. Mais il n’y a pas de mieux ou de moins bien, du moins dans les régions que j’ai pu fréquenter” insiste Elinor.

Responsabilité des écoles

Selon la voyageuse, en France et en Europe du Sud “L’école ne crée pas des esprits assez autonomes pour proposer aux futurs adultes de se faire leurs carrières. Le système scolaire ne laisse pas assez de place pour le think out of the box.” commence-t-elle.

Si on sait aujourd’hui que le système nordique fonctionne, les pays du sud de l’Europe continuent d’appliquer les mêmes recettes. “J’étais très créative en France lorsque j’étais enfant, mais le système scolaire m’a coupé les ailes dans cette créativité. Il suffit de comprendre comment avoir de bonnes notes et d’appliquer la méthode, pas de montrer ce dont on est capables.  Dans les pays du nord, la place est laissée à la créativité. Les notes, par exemple, ne sont jamais définitives et une place est laissée à la négociation et la discussion avec les enseignants lorsqu’un élève n’est pas satisfait de la notation obtenue.

La place des femmes dans le tourisme 

Elinor n’a constaté aucune différence de traitement entre hommes et femmes dans les pays du nord où, selon elle “le monde du travail est plus juste et inclusif”. Il n’est que deux pays dans lesquels elle a pu remarquer une choquante différence, Dubaï et certaines îles d’Indonésie. “Par exemple, mon ex-conjoint ne parlait pas anglais à Dubaï et, partout, on m’a ignoré en regardant l’homme, attendant qu’il prenne l’initiative et qu’il pose les questions. A l’hôtel par exemple, nos passeports ont été retenus à la réception. J’ai appelé un grand nombre de fois sans effet là où il a suffi à mon partenaire un seul appel pour que les passeports nous soient restitués.” De là à parler de l’impact religieux, Elinor refuse de passer le pas “On est plus ici dans une question complexe d’éducation, de politique et d’individualités que face à une question religieuse” contraste-t-elle.

Etre une femme en 2022

Dans nos sociétés occidentales” commence la jeune femme “on n’a pas trop à se plaindre malgré tout. J’ai souvent tendance à me dire qu’il y a nettement pire ailleurs. Ayant voyagé avec notamment des gens venant d’Iran, je me rends compte de la chance que j’ai. Il faut continuer de lutter pour nos libertés mais on a fait des progrès incroyables en peu de temps. On a beaucoup de bonnes choses dans nos pays, il ne faut pas oublier ça. Les réflexes doivent venir autant des hommes que des femmes.” répond Elinor.

Par exemple, la fameuse question des enfants est souvent posée, sans avoir en tête que certains couples ne peuvent tout simplement pas avoir d’enfants. “La blessure peut être douloureuse pour ces personnes” ajoute Elinor. 

Au féminisme, faut-il ajouter l’empathie ?

A Saint-Malo, le Festival Regards Croisés met en avant les talents des personnes handicapées !

Afiche du Festival Regards Croisés, à Saint-Malo

Créée en 2006, l’association l’Hippocampe s’est donné pour mission d’accompagner l’inclusion des personnes en situation de handicap. Inclusion professionnelle comme sociale, ce sont les outils artistiques et culturels qui sont utilisés.

Mireille Malot est présidente de l’association. Rapporteuse sous le gouvernement de Lionel Jospin d’un document sur l’aide humaine à l’intégration scolaire des élèves handicapés qui aboutira, notamment, à la création de 1 000 postes d’Auxiliaires de Vie Scolaire (AVS).

Mireille Malot, présidente de l'association
Mireille Malot, présidente de l’association Hippocampe

En parallèle, Mireille Malot œuvre au quotidien à ce que les enseignants soient de mieux en mieux formés à l’accueil des élèves en situation de polyhandicaps.

Le festival Regards Croisés, organisé par l’association, se tient chaque année dans la ville qui a vu partir des marins, dont certains en situation de handicap, traverser l’atlantique à bord de gigantesques bateaux, là où certaines entreprises partenaires de ces mêmes bateaux demandent des subventions pour aménager un escalier ou une salle de pause et les rendre accessible aux personnes en situation de handicap.

D’autres priorités sans doute ou politique marketing ?

Une femme discrète et efficace

Quoi qu’il en soit, nous avons voulu faire la connaissance de cette discrète présidente, détentrice de la Légion d’honneur (2021) et de l’ordre national du mérite (2004).

Elle-même maman d’une enfant polyhandicapée (Louise, aujourd’hui âgée de 40 ans), atteinte du syndrome de Rett, elle ne connaît que trop bien dans son quotidien de mère, de militante associative et de femme les difficultés qui parsèment le chemin vers la scolarisation, puis l’emploi des personnes différentes.

La création des AVS a permis d’accompagner, à l’époque, des enfants en rupture sociale. Rescolarisés, ces enfants ont passé le bac, obtenu des qualifications et des titres universitaires” explique la présidente “Puis, lorsqu’il s’est agi de passer du monde scolaire au monde professionnel, ils expliquaient toutes et tous voir les portes se fermer dans les entreprises”. Bref, une génération d’handicapés diplômés venait de voir le jour, sans espoir d’accéder à l’emploi à court terme.

Le handicap n’empêche pas le talent

C’est alors qu’est née l’idée d’un événement qui allait exposer au monde de l’entreprise les compétences et les savoir-faire de ces personnes au sein des structures de toutes tailles qui leur avaient donné leur chance. « C’est, aussi, de mettre un coup de projecteur pour dire telle ou telle entreprise a osé, pourquoi pas la vôtre !” ajoute la présidente.

Depuis 14 ans que se déroule le festival Regards Croisés à Saint Malo, au sein du Palais du Grand Large, les choses se déroulent presque toujours de la même façon. Présentation des courts métrages aux scolaires et collégiens le jeudi, dîner de gala le jeudi soir au cours duquel les entreprises achètent leur table et invitent clients, fournisseurs ou salariés pour exposer leurs réussites comme leurs potentiels avec ces travailleurs autrement capables.

Un job dating en cours de festival

L’originalité de ce festival réside dans le fait qu’entre les petits fours le jeudi après-midi, les entreprises qui connaissent actuellement des difficultés de recrutement sont présentes pour rencontrer ces travailleurs en recherche d’emploi. Dans tous les domaines, depuis le luxe jusqu’aux hautes technologies. Pour éviter le « social washing », les recruteurs ne sont pas informés du type de handicap qui touche les candidats. Chacun a donc sa chance même si, évidemment, certains emplois demeurent inaccessibles à certains types de handicaps.

Le Jib Dating est un rendez-vous aussi majeur qu'inattendu du festival

La journée du vendredi est celle du festival à proprement parler. Les courts métrages (6 minutes au maximum) doivent soit être mis en scène soit être réalisés par une personne handicapée. Pour le reste, le format est libre, pour autant qu’il s’agisse de raconter leur vie au travail. “La finalité” explique Madame Malot “est de montrer leurs capacités à travailler”.

Dominique Farrugia président du jury 2022

L’édition 2022, première post-crise sanitaire, sera présidée par Dominique Farrugia, humoriste bien connu mais aussi travailleur lui aussi autrement capable, touché qu’il est par la sclérose en plaques depuis de nombreuses années.

Dominique Farrugia sera le président de l'édition 2022 du festival Regards croisés
Dominique Farrugia, président de l’édition 2022

Il sera à la tête du jury Adultes. Un second jury, composé de jeunes, vient croiser son regard. C’est là que réside l’ADN de ce festival pas comme les autres, confronter des regards différents sur une question qui nous concerne toutes et tous.

L’entrée au festival est gratuite. Pas de tapis rouge ni de montée des marches mais de l’acceptation, de la tolérance et de la différence. Les animations sont nombreuses pour les personnes présentes, depuis des représentations artistiques jusqu’à des activités ludiques (poterie ).

Le vendredi est la journée des projections et des délibérations. Et l’occasion de moments de grandes émotions pour les participantes et les participants.

Remise des récompenses du Festival
La remise des récompenses est toujours un moment d’intense émotions

Implication locale forte

La présidente de l’association insiste sur le fait que le festival s’ancre localement dans la vie de ces personnes autrement capables. Ainsi, une partie de l’argent que rapporte la vente des tables du dîner de gala ira au bénéfice de la région de Saint Malo, “chapi chat’po”  et “Mer lib”. 


Chapi Chat’po propose de valoriser l’inclusion de jeunes en situation de handicap mental et cognitif. Elle propose à ces jeunes de participer à un food truck qui propose, le temps d’une soirée ou d’un moment familial, de nourrir les convives. Tous les plats et tout le service sont menés par ces travailleurs différents.

Chapi Chat'pot propose à des personnes atteintes de handicaps mentaux de gérer un food truck et d'organiser des prestations de traiteur
Chapi Chat’pot propose à des personnes handicapées de participer à une aventure de Food Truck, en Bretagne

De son côté, est une association Dinardaise qui propose aux personnes handicapées un accès à la mer et à ses vertus au moyen d’un bateau adapté, L’Intouchable. L’association propose une expérience qui a pour but de mettre en exergue les vertus thérapeutiques et pédagogiques que le monde marin peut apporter à toute personne en situation de handicap.

Mer Lib propose à des personnes présentant tous types de handicaps de découvrir la mer
Mer Lib permet à toutes les personnes handicapées de découvrir les plaisirs de la mer, en Côte d’Emeraude.

Une autre route

Cette quatorzième édition du festival Regards Croisés est une opportunité supplémentaire de montrer qu’une autre approche du handicap demeure possible. Des champions tels que le skipper Damien Seguin (qui sera parti traverser l’atlantique quelques jours plus tôt), le nageur Philippe Croizon ou l’acteur Alexandre Jollien sont la preuve que si le handicap n’est qu’une caractéristique de la personne, il ne constitue en aucun cas la personne.

Regards Croisés en résumé

Le festival se tiendra pour sa quatorzième édition les 17 et 18 novembre 2022. La journée du 19 novembre est réservée aux ESAT qui ont pris part à l’organisation et la tenue de cet évènement. Encore une preuve que, lorsqu’on fait l’effort, les valides peuvent laisser leur place à celles et ceux qui ont besoin d’un peu plus d’attention.

Le Festival se déroule au palais du Grand Large, à Saint-Malo en Ille-et Vilaine.

Entrée gratuite le vendredi toute la journée.

https://www.festivalregardscroises.com/

The sorority propose à ses utilisatrices de ne plus jamais se sentir seul(e) face à un danger ou un risque d’agression

Ruelle sombre, piste de danse, couloir d’immeuble, festival…. Les endroits où les femmes comme les minorités de genre sont de potentielles proies sont nombreux. La solution idéale serait assurément que les agresseurs cessent leurs méfaits – et que les pouvoirs publics aient les moyens de les faire cesser. En attendant, ce sont des produits numériques tels que The Sorority qui proposent des solutions en cas de mise en danger de la vie d’autrui.

Priscillia Routier-Trillard, fondatrice de l’application

A 35 ans, Priscillia Routier-Trillard est mariée et a cessé de travailler pour un grand groupe industriel. Cette maman de deux garçons, qui a elle aussi subi le harcèlement de rue, a porté plainte.

Aprés deux burn out, Priscillia a eu l’idée de créer l’application dont nous parlons aujourd’hui lorsqu’enfin, un médecin lui a simplement répondu « Je te crois ». Ces 3 mots ont fait germer dans l’esprit de « The sorority » qu’il fallait inverser la tendance. Une personne victime de violences doit être crue, par les autorités notamment.

Croire les victimes

Croire la femme pour ces agressions et ce qu’elle ressent. Croire la femme dans les attitudes qu’elle dénonce. Croire les personnes transgenres lorsqu’elles se déclarent victimes de violences. Croire, toutes les minorités lorsqu’elles se sentent mises en danger.

Tel était le credo de la créatrice de The Sorority. Prendre le pas inverse de la trop connue “charge de la preuve”. Partir du principe que, la bienveillance était un étant naturel par défaut parmi la plupart des espèces, il allait en être de même pour les humains.

Cette bienveillance, rendue complexe par les manières dont nous vivons au XXIème siècle (grands immeubles, banlieues, campagnes, Priscillia a voulu la manifester au travers de ce téléphone que nous avons tous en poche. C’est donc par une application, “The Sorority” (disponible sur tous les stores) qu’elle a commencé en mars 2019 à mettre sur pied le développement de l’application.

Savoir que l’on n’est pas seule

Tous les inscrit(e), validés et certifiés, de l’application se géolocalisent volontairement sur une carte dès lors qu’ils lancent l’application. Dès lors, toute la communauté est informée de la présence, sans aucune limite géographique, d’une personne bienveillante” poursuit-elle.

Cette personne bienveillante peut être tant votre voisine de strapontin qu’un centre d’hébergement pour les femmes battues. L’idée est de montrer aux victimes, femmes ou minorités de genre, que où qu’elles soient sur le territoire, elles peuvent être aidées.

Au total, ce sont près de 37 000 utilisateurs aux profils certifiés qui proposent près de 3 000 lieux sûrs ou 5 776 moments d’écoute, que ce soit par téléphone ou en physique au moment de cet échange avec Priscillia.

Bien sûr, les numéros vitaux (police, Samu, SOS Violences intra familiales…) sont disponibles dans l’application.

Comment ne pas créer un nid pour prédateurs ?

La première question qui vient à l’esprit est très masculine. Une telle application peut aisément être détournée et devenir le “Tinder” de l’agression. Pour pallier cela, l’enregistrement d’un membre et sa validation (quel que soit son statut, accompagnant, accueillant, écoutant…) est conditionnée à plusieurs conditions, parmi lesquelles :

  • Etre une femme ou être membre d’une minorité de genre
  • Poster un selfie en temps réel dans l’application
  • Présenter une pièce d’identité
  • Indiquer des coordonnées vérifiables (adresse, téléphone…)
L’application propose une cartographie des personnes situées à proximité

Le profil certifié, seuls l’adresse e-mail, le nom, prénom et la photo de la personne demeurent conservés. 

Labellisés ONU Femme France, l’application ne propose que les fonctions essentielles : 

  • Visualiser le nombre de personnes présentes autour de soi à un instant donné et donc aptes à réagir.
  • Déclencher une alerte lorsqu’un utilisateur est victime ou témoin d’une agression, pour contrer l’effet de sidération. Sorte de balise de détresse, en somme.
  • Afficher sur l’écran de son téléphone un appel au secours qu’on pourra montrer à des personnes alentour.
  •  Déclencher une sirène
  • Emettre un appel aux autorités
  • Recherche de structures d’aide ou de soutien

Ces fonctions sont toutes accessibles sur l’écran principal de l’appli, permettant une utilisation facile et rapide.

En général, lors du déclenchement d’une alerte” explique Priscillia, “les victimes reçoivent en moins d’une minute plusieurs appels et plusieurs messages d’autres possesseurs de l’application. L’alerte sonore est particulièrement efficace dans une foule, car elle crée un effet de surprise de l’agresseur qui aura, alors, le réflexe de prendre la fuite.

Pourquoi ne pas juste crier à l’aide ?!!!!!!!!

On pourrait penser que le simple fait de crier “à l’aide” suffit à attirer l’attention. “En fait, les choses sont doublement compliquées, du côté de la victime comme du côté des témoins. L’effet de sidération peut et va souvent totalement paralyser la victime qui se sentira alors dépersonnifiée, comme sortie de son propre corps. Elle est, au moment de l’agression, incapable de bouger, de crier ou de se défendre” explique la fondatrice. “Les témoins, quant à eux, subissent l’effet témoin. Chacun pense que son voisin est plus apte, plus fort ou plus compétent pour agir. En fin de compte, personne n’agit”.

L’écran pour donner l’alerte

The Sorority répond à ces deux questions, la victime peut garder la main dans sa poche pour déclencher une alerte, les témoins sont plusieurs à avoir signé le pacte “moral” de venir en aide. “Souvent, le fait qu’une personne tierce s’approche de la scène violente interrompt celle-ci, sans besoin de donner des poings. Il suffit de proposer un verre à la victime pour que l’agresseur cesse son acte.” termine Priscillia.

Que se passe-t-il lorsqu’une alerte est déclenchée ?

Lorsqu’une alerte est déclenchée, elle est répercutée sur les téléphones portables des  personnes les plus proches physiquement du lieu de l’agression. En même temps que l’alerte est donnée, la photo, le prénom ainsi que la localisation précise de la victime sont transmis. 

Lorsqu’un possesseur reçoit une alarme, il sait comment agir

Les personnes qui reçoivent l’alerte peuvent contacter par appel téléphonique (via l’application) ou par chat la victime qui a déclenché cette alerte.

C’est d’ailleurs ce qu’explique Eloïse, une utilisatrice belge. Elle a été abordée par un inconnu qui, se montrant insistant, a montré à la jeune femme que cet homme était malveillant. Son témoignage, met en exergue la rapidité de réaction d’une autre “sœur” d’application, pour casser la spirale potentiellement mortifère qui s’amorcerait.*

Un effet rassurant

En dehors des cas extrêmes d’agression, l’application permet de localiser les personnes les plus proches de soi. Cette conscience de la présence d’aides potentielles est un soutien moral aux utilisatrices qui sont ainsi plus sûres que quelque chose se passera en cas de souci, pour le moins qu’une réaction aura lieu de la part d’un tiers de confiance.

Il en va de même pour tous les types d’agression. Piqûre, impression d’avoir bu une boisson au GHB ou malaise de tout type, le déclenchement d’une alerte permet aux victimes de crier “Au Secours”, y compris lorsqu’elles n’en sont plus physiquement capables.

Quel modèle économique pour cette application ?

Lorsqu’on lui parle du modèle économique de son association, la fondatrice éclate de rire. “Nous sommes une association de type loi 1901 et notre fierté est de savoir que l’application est utilisée en France, Belgique, Suisse, Luxembourg, Algérie, Maroc, Tunisie. Nous essayons d’avoir l’oreille des autorités de police et de justice pour que les interlocuteurs spécialement formés aux violences sexistes et sexuelles soient disponibles dans l’application directement, sans passer par un standard ou un autre agent. » « Mais les démarches sont bien complexes !” ajoute la fondatrice.

La Directrice Générale ajoute “Le principal est que le chemin entre la victime et son secours soit aussi court que possible.

Des évolutions à venir

L’application n’est pas encore terminée, des évolutions arrivent, parmi lesquelles on retrouvera :

  • L’intégration des associations en ping fixe
  • L’ouverture aux associations qui pourront se déclarer elles-mêmes en guise de lieux sûrs
  • Ouverture de l’application aux personnes de moins de 15 ans (limite légale  fixée par les stores)
  • Intégration des autorités en ping fixe
  • Intervenants sociaux pour la mise en place d’accompagnement sur le long terme

Lorsque disparaîtra cette application

Il serait illusoire de penser qu’à court terme une telle application disparaisse. Le besoin qu’elle couvre est millénaire et seule l’éducation à la Tolérance et à la Citoyenneté pourra la rendre inutile.

Il faudra sans doute quelques années pour qu’évoluent les mentalités et que les risques d’agression périclitent. En attendant, The Sorority est une initiative intéressante et à suivre.

Qui est sa fondatice ?

Âgée de 35 ans, Priscillia a suivi une préparation HEC. Elle a ensuite intégré l’école de commerce de Strasbourg.

Partie une année aux USA pour un échange, elle s’est découvert une passion pour la gestion de projets.

Elle a vécu deux burn-out dans sa carrière, le premier en 2013 et le second en 2019.

Elle est, aujourd’hui, naturopathe.

L’équipe des 3 co-fondateurs de The Sorority

L’association “Au bout du fil” propose d’aider à rompre l’isolement des séniors

L’association propose de prendre contact, régulièrement et gratuitement, avec nos aînés

Maladie, éloignement géographique, grand âge. Les défis du XXIème siècle sont de plus en plus nombreux pour permettre à toutes les générations de cohabiter en intelligence. Si les relations sont parfois rompues pour de multiples raisons au sein d’une famille c’est, le plus souvent, par maladresse que les contacts s’étiolent.

Le grand âge, le quatrième âge, l’allongement de la durée de vie. Toutes ces appellations masquent une réalité à double visage. Heureuse, elle nous promet de vivre plus longtemps et en meilleure santé. Malheureuse, elle nous contraint à revoir la manière dont les liens sociaux et familiaux sont établis.

Une association permet de combler une partie de ce manque

Créée en 2007, l’association de type loi 1901 “Au bout du fil” a pour vocation de rompre l’isolement des personnes qui se sentent seul(e)s, en leur proposant de recevoir un appel téléphonique amical, chaleureux, une ou deux fois par semaine. Il ne s’agit évidemment pas de pallier les manques relationnels de nos aînés mais de leur permettre de conserver des relations humaines et planifiées. Chaque semaine, l’usager des services de l’association reçoit un ou deux coups de fil, à sa guise et à sa fréquence. Ces appels sont passés par des bénévoles spécialement formés pour simplement dialoguer. 

Jean-Paul GREE, secrétaire général de l’association nous explique le fonctionnement de cette structure « Nous comptons environ 350 bénévoles, âgés de 18 à 98 ans. Cette large représentation d’âges et de catégories sociales (étudiants, actifs, retraités…) permet d’avoir une richesse d’échange avec les bénéficiaires qui enrichit les deux interlocuteurs. » Il ajoute « Chaque bénévole adhérent signe une charte par laquelle il s’engage à ne jamais entrer en contact directement ou à obtenir les coordonnées d’un usager. La mise en relation se fait automatiquement, via un automate qui distribue les appels. C’est un gage de confiance important pour s’assurer de la liberté de parole de nos usagers » termine le secrétaire général de l’association.

Carence de la société ou complément de relation ? 

La responsabilité de la société, de la famille et de l’entourage proche, est éminemment prioritaire dans le maintien des liens sociaux. Il serait trop simple de résumer l’isolement des personnes âgées à de la mauvaise volonté familiale. Charge de travail pour les uns, peur de déranger pour les autres. Distance physique (le covid est passé par là) due à la mobilité professionnelle ou charge familiale sont autant d’explications – sinon de justifications – à la difficulté de maintenir le fil avec les familles.

C’est un complément de relations, pas un remplacement de famille que propose l’association. Avec plus de 100 000 appels émis chaque année, c’est la possibilité donnée à nos aïeuls de se sentir moins dépendants des familles dans leurs relations aux autres. Ces appels sont autant de “prises de nouvelles” anonymes et confidentielles, sortes de “rendez-vous” d’échange et de dialogue.

Partenariat actif avec les institutions

L’association est partenaire avec les institutions qui gèrent, au quotidien, la vie des retraités. Elle ne traite pas, à l’instar des systèmes de télésurveillance, les urgences du quotidien. Chutes, malaises, difficultés médicales sont systématiquement redirigés vers les spécialistes ou les services d’urgence le cas échéant.

C’est un apport “novateur” dans la relation entre l’appelant et l’appelé qui initie un renouveau et casse la monotonie du quotidien des uns comme des autres. Pour éviter le syndrome de transfert, ce sont des appelants différents qui émettent les appels, manière de créer un nouveau tissu social.

Une idée issue de la canicule de 2003

C’est de l’incapacité fautive du gouvernement en 2003 à gérer la crise de la canicule et aux 15 000 morts qu’elle a générés qu’est venue l’idée de recréer, avec les outils de l’an 2000, cette association.

En 2006, Philippe Conérardy (notamment fondateur de l’association “Avec nos proches”) s’entoure à la fois de spécialistes des télécommunications et de spécialistes de l’action sociale pour monter une plateforme de parole partagée.

L’année suivante, la plateforme est techniquement au point et les grands principes sont établis pour faire de l’association “Au bout du fil” une belle histoire : 

Pour tous ceux et toutes celles pour qui chaque jour la solitude pèse un peu plus.

Pour tous ceux et toutes celles qui n’osent pas appeler, manquent de confiance, n’osent pas déranger,

Pour tous ceux et toutes celles qui reçoivent peu de nouvelles de leurs familles ou amis, pour quelques raisons que ce soient.

Un fonctionnement simple et léger

Les appels peuvent se passer entre 8 heures et 22 heures, à la guise de l’appelé. Aux horaires et moments prévus, un bénévole de l’association va prendre contact avec le destinataire pour demander de ses nouvelles, échanger sur tout ce dont les uns comme les autres ont envie ou besoin de parler. Sans jugement, sans vente et sans pression, c’est une relation humaine et amicale qui se met en place avec le temps.

Régulièrement, pour combattre la fracture numérique, des rendez-vous sont proposés en ligne, par visioconférence. C’est alors autour d’un sujet commun, proposé par l’animateur, que la discussion se crée et les échanges, souvent riches et motivants, se mettent en place entre les participants. Toujours dans le respect de l’anonymat et de la parole des uns et des autres.

L’action des bénévoles est gratuite pour les bénéficiaires. Elle coûte 8 euros par mois pour un minimum de 4 appels. Cette somme peut être prise en charge par les caisses de retraite ou la famille.

Enfin, l’association propose l’intervention, à distance par visioconférence de professionnels (nutritionnistes, sophrologues…) qui, en étant rémunérés, proposent et apportent conseils et solutions aux utilisateurs du service.

La limite du service

Ce service ne remplace ni la famille, ni les acteurs sociaux conventionnels. Aucun compte rendu d’appel, rapport d’état “moral” ou de santé n’est remis à quiconque. Il est inimaginable de s’acheter une bonne conscience en payant ces quelques euros mensuels pour prendre des nouvelles de papy et de mamy.

C’est, au contraire, un complément rassurant de libération de la parole pour les appelés. Et la possibilité donnée à la famille, qui demeure le pivot principal de la relation, d’avoir de la nouveauté à entendre, sortant de la discussion trop souvent centrée sur la maladie et l’état de santé du proche.

Pour entrer en contact avec l’association “Au bout du fil”, consultez le site internet à l’adresse https://www.auboutdufil.org/

Caroline Stevan – L’histoire du droit de vote des femmes, un combat féministe

Féminisme et droit d’expression des femmes sont intimement liés. Il ne peut exister le second sans le premier. C’est à cet état des lieux que nous invite la journaliste Caroline Stefan avec le livre « Citoyennes ! Il était une fois le droit de vote » paru aux éditions Helvetiq.

En 2022, les femmes disposent, au même titre que leurs alter ego, du droit de vote. Mais ce droit n’a pas toujours été un acquis, à l’instar de l’ensemble des possibilités offertes aujourd’hui sans distinction de sexe. Féminisme, politique et droit à l’expression se mêlent dans cet ouvrage passionnant. Les illustrations qu’il contient à la manière de « Tomtom et Nana » (Message aux plus jeunes : « pas le GPS, la bande dessinée« ) rendent « Citoyennes ! Il était une fois le droit de vote » accessible aux citoyen.ne.s autant qu’à celles et ceux qui le deviendront demain.

Illustration de la vie d'une famille et de l'injuste répartition des tâches ménagères
Les tâches ménagères réparties le sont-elles réellement en tant que charges ?

Le Livre de Caroline Stevan, “Citoyennes ! Il était une fois le droit de vote » aux éditions Helvetiq se lit à la fois comme un ouvrage d’histoire, de politique, de fiction et de projection. L’ensemble des grandes figures féminines de la politique et de l’accès des femmes à la gestion de l’Etat est rappelé de manière ludique mais précise. Ceci sans parti pris ni militantisme, tel que l’histoire le dit, tels que les faits se sont déroulés.

Qui êtes-vous Caroline Stevan ?

Je suis une journaliste Franco Suisse. J’ai passé l’essentiel de ma carrière à travailler pour le journal “le temps” puis j’ai rejoint la RTS (Radio publique Suisse) il y a 2 ans.

Xaroline Stevan, autrice et journaliste
Caroline Stevan, autrice et journaliste – DR

Depuis le premier confinement, je travaille pour le point J, dans lequel on pose une question chaque jour en relation avec l’actualité. Par exemple “pourquoi autant de prêtres pédocriminels ? –  Peut-on tout guérir avec l’hypnose ? “.  Chaque épisode dure 10-12 minutes en format podcast. Beaucoup d’invité(e)s pour alimenter ce point J. En fin de podcast, une deuxième voix intervient, un témoignage ou un point de vue dissonant.

Le 14 juin 2019 a eu lieu la grève des femmes. J’ai eu la sensation que cette journée ferait date dans les luttes féministes.

Caroline Stevan

Le 14 juin 2019, en suisse, a eu lieu la grève des femmes. Des centaines de milliers de femmes dans les rues Suisse, une marée violette a envahi les avenues. J’y étais en famille avec mes 2 filles et leur papa, j’ai eu la sensation que cette journée ferait date dans les luttes féministes. Je voulais que les enfants puissent prendre conscience du fait qu’il y a eu du chemin pour que les femmes puissent voter, parler et s’exprimer.

Mes deux filles, âgées de 8 et 12 ans, ne sont pas encore en âge de voter. Ce qui n’empêche aucunement d’avoir une conscience !

Sortir du regard très européen sur notre droit de voter

L’idée directrice de ce livre était de sortir du regard européen sur le droit de voter – de s’exprimer – dont disposent les femmes. D’autant que 2021 marquait le cinquantenaire du droit de vote des femmes en Suisse.

Le livre s’ouvre sur le portrait de 10 militantes du droit de vote des femmes, toutes de différentes cultures.

Où en est en 2022 le droit de vote des femmes ?

Partout dans le monde où les hommes votent, les femmes votent. Deux exceptions notables : le Bruneï et le Vatican. Au Vatican les choses évoluent, une femme a été nommée à la conférence des évêques et a le droit au chapitre.

Quant à l’égalité d’accès au vote, les femmes et les hommes ne sont pas empêchés de voter partout ailleurs. Par contre, c’est un aspect important qui ne signifie pas nécessairement une égalité en politique. Il y a bien moins de femmes que d’hommes aux postes de pouvoir. Et celles qui le sont ne sont jamais rattachées à des ministères régaliens. Au-delà de ces chiffres, il faut voir la manière dont les femmes sont considérées (uniquement le prénom de la femme et le nom de l’homme). A l’époque, on a bien plus décrit les vêtements de Ségolène Royal que ceux de Nicolas Sarkozy, par exemple.

Quelles ont été les difficultés majeures à obtenir le droit à voter ?

Les luttes sont convergentes et ne couvraient jamais qu’un seul sujet. Les femmes qui se sont battues pour pouvoir voter réclamaient souvent d’autres choses, lutte contre l’esclavage, pour l’indépendance… Beaucoup des opposants avaient finalement peur que les femmes qui iraient voter délaissent leur statut de femme et les tâches qui leur incombent historiquement (cuisine, foyer, ménage, enfants…). Ce sont des sujets sous-jacents à cette quête du droit de vote.

A l’époque des grands combats, les femmes demandaient à avoir accès à la sphère publique. Elles voulaient avoir une place publique dans la société. Aujourd’hui, même si la place faite aux femmes n’est pas parfaite, il n’y a plus de remise en cause des possibilités notamment politiques données aux femmes. Par contre, et c’est là un frein important à la féminisation de la fonction politique, les femmes ont toujours la politique en plus du reste. La famille (gestion du foyer, des enfants…) est vue comme un frein pour les femmes qui veulent entrer en politique.

La première ministre Néo-Zélandaise a été enceinte pendant son mandat.

Certains – autant d’hommes que de femmes – ont questionné la compatibilité d’une vie de famille avec sa fonction. Elle s’est insurgée qu’on ne pose pas cette question aux hommes.

Quel est le prochain combat des femmes ?

L’obtention d’une pure égalité de traitement entre les Hommes & Femmes

Quel est l’impact de certaines prises de position radicales de féministes sur le message féministe en lui-même ?

Certains comportements ou certaines manières de porter la lutte peuvent crisper. Et partout où il y a crispation, il y a tension et rupture du dialogue. Prenons l’exemple de l’écriture inclusive, qui me semble pourtant quelque chose d’anodin. On doit faire avec les hommes, pas contre. Pour qu’une question féministe avance, elle doit embarquer les hommes avec les femmes. Être féministe ce n’est pas être contre les hommes.

Etre féministe ce n’est pas être contre les hommes.

Caroline Stevan

En écrivant ce livre, je me suis aperçu que la gentillesse, la bienveillance ou la modération ne fonctionnent pas toujours. Les suffragettes, au Royaume Uni, ont compris très tôt que cela ne marchait pas et qu’il fallait aller vers plus de radicalité. Leurs méthodes, provocantes et parfois violentes, ont été efficaces. Il peut falloir passer par du plus dur. Il faut se poser la question de ce qui est ou n’est pas radical selon l’air du temps. La radicalité doit toujours se mesurer à l’aune d’une situation immédiate.

Enfin, il ne faut pas mettre toutes les féministes dans le même panier, il peut y avoir des crispations différentes. Il y a autant de féminisme qu’il y a de féministes.

En cette année présidentielle, croyez-vous en la possibilité d’une Présidente de la République en France ?

J’espère qu’on est prêts. La société a évolué et il y a toujours des femmes candidates. On va vers ce chemin-là.

En Suisse, nous avons trois conseillères fédérales qui sont présidentes à tour de rôle. Donc, dans la confédération, nous allons avoir une femme présidente.

Et, pour un pays conservateur comme le mien, c’est un très bon signe !

Pour la France, la question n’est pas « va-t-on y arriver ? ” mais “quand va-t-on y arriver ?”.

Pour autant, d’Edith Brunschvicg à Nadia Jai, les femmes sont à des postes de responsabilité. Qu’est ce qui bloque cette avancée ?

On va cantonner les femmes à des postes “moins valorisants” (secrétaire d’État, conseiller, ministère rattaché…). Même ministres, elles vont être systématiquement positionnées sur des fonctions perçues comme plus féminines.

Il existe aussi un phénomène de cooptation, on promeut ses semblables, les hommes soutiennent les hommes.

Il faut aussi changer le regard des électeurs et des électrices sur ce que sont certaines fonctions ministérielles. Il n’est pas plus féminin d’être à la culture ou à la santé qu’être à l’économie ou la défense !

Il faut aussi changer le regard des électeurs sur ce que sont certaines fonctions ministérielles. Il n’est pas plus féminin d’être à la culture ou à la santé qu’être à l’économie ou la défense !

Caroline Stevan

Les choses se jouent sur le terrain pour le concret et dans les esprits pour la représentation.

Quel accueil a reçu votre livre ?

Un excellent accueil ! Je suis ravie, j’ai eu quelques séances de dédicaces qui ont fini trop tôt. Le public était très varié (femmes plus âgées en suisse, jeunes filles très militantes, des papas, des familles…).

Au début du livre, j’imagine une scène dans laquelle un enseignant définit la règle de vie. Les garçons ont tous les droits dans l’école, les filles n’ont aucun droit. Une sorte de métaphore d’une société dans laquelle les femmes ne pouvaient pas voter.

Une enseignante qui a lu mon livre a rejoué la scène dans son établissement. Pendant une semaine elle a favorisé les filles (filles assises avant les gars, encouragements, bonbons en cas de bons résultats…)

La semaine suivante, elle a inversé les rôles.

Après ces 2 semaines d’expérience, les enfants ont bien compris la métaphore. Lorsqu’ils étaient dans le groupe défavorisé, c’était difficile et ils s’en sont plaints. C’est lorsqu’ils seront, les unes comme les autres, devenu(e)s citoyens qu’il faudrait analyser leurs comportements.

L’éducation (scolaire, familiale, culturelle, environnementale…) est une clef majeure dans l’évolution des choses.

Quels espoirs pour le féminisme ?

Je termine le livre en souhaitant qu’il disparaisse. Il joue sur deux terrains. De grosses luttes et des chantiers concrets (égalité salariale par exemple) sont en cours.

Puis une couche très insidieuse, de l’ordre de la culture et des stéréotypes, a fait son apparition qui recrée les stéréotypes. Par exemple, les Lego « Friends » (que le packaging destine plus aux filles qu’aux garçons) sont plus faciles à assembler que ceux des garçons et mettent en scène de jolies maisons avec des spas.

Dans les années soixante-dix / quatre-vingt, sur les publicités Lego, les filles et les garçons assemblaient une fusée et le slogan disait : « Les enfants construisent l’avenir !« .

On est ici sur des choses qui peuvent sembler des détails, sur des photos dans les catalogues de jouets de Noël par exemple mais en réalité, on recrée du sexisme dans de nombreux domaines.

Je veux un féminisme de fond, un éveil des consciences. Il faut dresser un constat de tous ces « détails » mis bout à bout. Travailler sur ces “détails” beaucoup plus pernicieux. C’est un travail bien plus long et moins visible.

Je veux un féminisme de fond, éveil des consciences.

Caroline Stevan

Et, à chaque « entorse », il faut dénoncer aux institutions. Les hot-lines, numéros verts, saisines… Existent et doivent être, par la force des choses, déplacées vers ces nouveaux terrains de féminisme.

En Suisse, les “bureaux de l’égalité” tiennent une veille et sont à l’écoute des alertes de la population.

En France, la saisine du défenseur des droits est le seul moyen d’alerte, il n’est pas proactif. Il faut utiliser les moyens mis à la disposition par les États pour promouvoir une véritable égalité.

Auteur    Caroline Stevan
Illustration    Elina Braslina
Editeur    Helvetiq
Date de parution    03/09/2021

Relations sexuelles pendant le sommeil, il s’agit bien d’un viol ! 

Il semble que le principe du consentement libre et clair ne soit pas connu de certains avocats. Maîtres Karim Laouadi et Merabi Murgulia, défenseurs d’un violeur aujourd’hui condamnés, s’étonnent du jugement qui frappe leur client.

En 2014 puis en 2017, Babacar, âgé aujourd’hui de 36 ans a, par deux fois, eu des relations sexuelles avec des femmes pendant qu’elles dormaient. Ces femmes étaient, à chaque fois, sous l’emprise de l’alcool et de drogue, selon nos confrères du journal Le Parisien.

Campagne de prévention du viol

Passons sur le fait que l’une des deux victimes était mineure au moment des faits, le juge l’a sans doute pris en compte dans l’appréciation du crime.

Le consentement est défini dans le dictionnaire comme l’ “action de donner son accord à une action ou à un projet.” Juridiquement parlant, “le consentement à un acte sexuel est le fait, pour deux personnes, d’accepter de manière non-équivoque d’avoir un rapport sexuel ensemble.”

Surprise des avocats

Les avocats de ce criminel s’étonnent, dans les colonnes du Parisien : “Notre client continue de clamer son innocence” ont-ils réagi ”Comme trop souvent, en matière d’infractions sexuelles, la seule parole des plaignantes suffit pour condamner un homme à huit ans de prison.

A croire qu’ils n’ont pas conscience de ce qu’est l’état de sommeil.

Le Centre d’investigation et de recherche sur le sommeil de Lausanne (Suisse) explique avec clarté (https://www.chuv.ch/fr/sommeil/cirs-home/recherche/reves-et-conscience) : “Toutes les nuits, quand nous nous endormons, notre conscience subit des changements remarquables. (…)  A d’autres moments de la nuit, la conscience peut totalement disparaître, typiquement, mais non exclusivement en sommeil profond en début de nuit.

En des termes plus adaptés à la justice, lorsqu’on s’endort, on déconnecte le cerveau du monde extérieur et on le connecte avec son monde intérieur.

On ne peut donc pas, lorsque l’on dort, avoir un comportement d’accord ou d’acceptation de quoi que ce soit. C’est la raison, par exemple, qui fait qu’on doit être éveillé pour signer un chèque de paiement des émoluments dus à un avocat.

L’accusé reconnaît les relations sexuelles

En outre dans cette histoire l’accusé reconnaît les relations sexuelles. Il est qualifié, par nos confrères du Parisien d’“habitué des soirées branchées de la capitale, consommateur régulier de cocaïne.

Nous sommes donc, ici, face à un accusé qui prend de la drogue, qui a des relations sexuelles avec des femmes alcoolisées et droguées. Et qui dorment.

La prise de quelque substance que ce soit ne change rien à la caractérisation du viol

Les faits sont là, cet homme a profité d’un état de faiblesse de ces femmes pour avoir des relations sexuelles avec elles. Il les a forcées à ces relations sexuelles pendant qu’elles étaient endormies.

Il les a violées.

Les viols en soirée

Le Collectif Féministe Contre le Viol, représenté par Maître Rongier, déclarait à la sortie du Tribunal : “Le viol en soirée dans un contexte alcoolisé, souvent minimisé, a été reconnu et sanctionné à la hauteur de la gravité des faits. C’est une avancée dans la lutte contre les violences sexuelles et sexistes.

L’association s’est portée partie civile dans ce procès.

Il est une évidence à rappeler : le fait qu’une personne consomme de la drogue, de l’alcool en toute conscience et en toute lucidité n’autorise pas de fait encore moins implicitement de rapport sexuel. Au contraire, l’humanité et l’empathie naturelle de l’être humain devraient faire en sorte que le comportement (masculin comme féminin) par défaut, soit alors protecteur et secourant.

Peine légère

La peine qu’il reçoit en réparation de son crime est bien légère. Ce sont huit années de prison auxquelles le violeur est condamné, là où les textes condamnent à quinze années d’emprisonnement les violeurs.

Les attendus de ce procès ne sont pas encore disponibles, mais il est certain que les circonstances auront été jugées atténuantes eut égard au crime commis. A commencer par le fait que ces femmes avaient absorbé alcool ou drogue, consciemment, avant d’être violées. Sans doute aussi le fait qu’il n’ait pas été fait usage de violence ou de menace a-t’il pu influencer cette procédure de jugement.

Dans tous les cas, les deux victimes devront se contenter d’une demi-mesure dans la réparation du crime qu’elles ont subi.

Les commentaires des avocats de l’accusé ne viendront pas alléger cette douleur.

« Bonjour à tous, c’est Mélanie ! Retrouvez-moi désormais sur #TikTok. À très bientôt ! 🇫🇷 » – Décryptage

Melanie en compagnie d’un bon ami pose pour un selfie

Melanie, vous ne la connaissez sans doute pas plus que moi. Elle a un petit succès sur les réseaux sociaux depuis qu’elle poste des vidéos de son quotidien. Phénomène montant des réseaux, comprenons qui sont ces inconnues aux publications simples.

Je dois le reconnaître, j’ai un compte Tik-Tok. Et un compte Instagram et un compte Facebook. A 45 ans passés, je pense être dans la moyenne haute des vieux adultes connectés.

A mon grand désarroi, il aura fallu que ce soit l’ado de la maison (elle a 19 ans, votera pour la première fois en avril 2022. Elle a un compte Instagram, un compte Snapchat, un compte Tik-Tok, un compte Telegram et elle démarre doucement ses études supérieures) qui me parle, au détour d’un Mac Donald’s rapidement avalé de Méline. Ce compte, typiquement Breton “présente la vie normale d’une nana qui s’occupe de ses chats” m’explique l’ado.

Transcendant appel à la curiosité, je lui demande de me montrer ce compte si extraordinaire. Fière comme un bar tabac (J’assume) elle s’empresse de me montrer une ou deux vidéos de Mélanie.

En effet, elle semble super sympa Mélanie sur ces vidéos. A tel point que j’ai envie de vous les décrire une de ces vidéos. Après tout, si une inconnue parvient à attirer les bonnes grâces de mon adolescente, je devrais y arriver moi aussi !

Une simplicité palpitante

En arrière-plan de la vidéo, des bouteilles d’alcool posées au sol. Ces bouteilles sont visiblement entamées, comme chez une personne normale qui a récemment fait une petite fiesta. Si on s’amuse à zoomer, on peut reconnaître quelques alcools. Sans doute un whisky avec la collerette orange, une bouteille de Malibu probablement et une de gin. 

Bref, Mélanie a fait la fête.

Chez elle, Mélane a des bouteilles d’alcool

Dans le bar de Mélanie, une photo posée à la va-vite. Probablement un souvenir familial, photo de son papa (Jean Michel) et de sa maman (Paule).

Peu importe la décoration en fait.

Sur les premières images, Mélanie est accroupie et elle tend la main, en signe de secours et d’assistance, tout en parlant à quelqu’un : “On ne mange pas ça, hein” dit-elle.

Bon, c’est surprenant de tendre la main tout en interdisant, mais après tout, je ne sais pas ce vers quoi elle tend la main.

Fin de la première seconde de vidéo.

Le cadreur de Mélanie pivote le téléphone qui a servi à faire la vidéo vers la gauche (plus je regarde ses vidéos, plus je la sens à gauche, Mélanie). Ce vers quoi elle a la main tendue, c’est un joli sapin de Noël, très traditionnel, presque un peu tristounet. Elle tient à la main ce qui m’a d’abord fait penser à un fil barbelé pour n’être, en fait, qu’une guirlande lumineuse de Noël.

Un chat bien effrayé sur une branche

Et il y a un chat,caché dans ce sapin. Ce chat semble bien effrayé. Il se trouve alors à un endroit dont il ne sait pas trop s’il peut y être en sécurité ou non. Cette main tendue est-elle là pour la douceur d’une caresse ou pour la dureté d’une réprimande ?

Ce chat, je l’imagine comme une personne qui aurait passé des jours à conduire et qui, un beau matin à l’aube, se retrouve perdue sur une plage. Images façon Claude Lelouch, Anouk Aimée et Jean-Louis Trintignant sur la plage de Dauville un matin de décembre. En l’occurrence, Jean-Louis s’appelle Kerhillio, le nom d’une plage dans la baie de Quiberon.

Le chat de Mélanie

Le mal du Pays, sans doute. J’ai oublié, Mélanie a quitté sa Bretagne natale pour vivre dans les Yvelines.

Cette attendrissante scène entre un chat et son humaine (c’est l’expression consacrée dans les vidéos de chats sur Tik-Tok pour parler des propriétaires de félins) me rappelle Maître Corbeau sur son arbre.

Suit une poignée de secondes pendant lesquelles on voit ce pauvre félin se débattre sur les branches bien souples de cet arbre de Noël.

Là, une question me taraude l’esprit. Si le félin est parvenu à monter sur ces branches tout seul, c’est qu’elles sont suffisamment solides et rigides pour qu’il parvienne à y prendre appui. Les chats sont des êtres intelligents (et populaires sur les réseaux sociaux) qui ne s’aventurent que rarement dans des endroits d’où ils ne sauraient pas repartir. On n’imaginerait pas un chat, par exemple, se laisser enfermer dans une remorque de semi-remorque alors qu’il ne sait pas ni vers où il va, ni comment il va survivre en cette destination inconnue.

Elle est de plus en plus sympa cette vidéo. Du coup, viralité oblige, Mélanie aussi est de plus en plus sympa. A mes yeux comme aux yeux de mon adolescente et des 270 000 autres teenagers (j’ai définitivement grandi dans les années quatre-vingt-dix) qui ont liké cette vidéo.

Entre les secondes 13 et 17 de ce court-métrage, Mélanie tend la main vers son chat de manière un petit peu plus autoritaire. Bien sûr, elle ne maltraite pas l’animal. Elle fait montre de l’autorité dont a besoin tout humain qui souhaite sortir un tiers d’une autre race d’une situation dans laquelle il (l’étranger) s’est mis alors qu’il n’était pas réellement autorisé à le faire.

C’est exactement le cas de ce chat qui n’avait sans doute aucune permission pour monter dans les branches de ce joli sapin de Noël.

Vers la quinzième seconde, un sent une pointe d’agacement dans l’attitude de Mélanie. Elle a la main vers le bas et les doigts tendus au contact de l’animal. On pourrait penser qu’elle va le saisir pour le sortir de ce mauvais pas mais il est évident que l’amoureuse à la fois des chats et des sapins de Noël (tradition apparue au XVIe siècle en Allemagne) sait que le résultat serait catastrophique. Non seulement risquerait-elle de blesser l’animal apeuré mais, en plus, elle réduirait à néant les efforts qu’elle a mis dans l’érection récente (il n’y a quasiment pas d’aiguilles aux pieds du sapin. Soit Mélanie est une fée du logis, soit le sapin a été mis en place pour la vidéo, je ne sais pas trop) de ce sapin de Noël.

Bref, de Maîtresse douce et gentille, on sent bien que Mélanie passe vers un niveau d’autorité dont on ne penserait pas cette gentille femme capable du haut de ses presque 304 000 abonnés.

Est-ce ce qu’on appelle la main de fer dans le gant de velours ? Je ne sais pas.

Mélanie tente bien de récupérer son chat

Seconde 17, on entend Mélanie hausser le ton et menacer l’animal par un “Sors, sors”. Pour un peu, on se sentirait devant une église que des policiers voudraient investir pour en déloger des migrants. Les invectives d’août 96 devaient aussi contenir du “sors, sors”, parfumé d’un peu de lacrymo.

Les goûts et les modes ont bien évolué en 30 ans.

Zoom avant vers le félin. A la seconde 20, on entend Mélanie déclarer “tant pis, il est installé. Il ne bouge pas.” C’est étonnant qu’elle abandonne déjà, Mélanie, elle me fait presque pitié là.

Force doit rester à l’état et à la police, sacrebleu !

Mélanie, au secours !

Mélanie, je t’en conjure, ne laisse pas cet animal sur cette branche !

Il va se blesser et abîmer ce si joli sapin de Noël que ta colocataire et toi avez construit. Tu dois défendre le territoire contre l’invasion de ce félin, tu dois ramener ordre et discipline dans ton salon.

Mélanie, au secours ! » C’est ce qu’entendent crier les fans de cette vidéo. C’est peut-être aussi ce que pense l’animal, après tout il ne fait que chercher du confort et de l’assistance alors qu’il se sent bien en danger.

Le regard du chat est d’ailleurs de circonstance. On le sent craintif quant à sa situation pour le moins instable. Ensuite l’autorité venant de cette main qui, quand elle n’a plus besoin des ronronnements besogneux du félin, va le repousser l’inquiète.

Le regard effrayé du chat de Mélanie

La vidéo s’achève sur un gros plan du visage animal, sur l’air de “All I want for Christmas is you” par la chanteuse aux origines bigarrées (vénézuélienne et afro-américaine par son père, irlandaise par sa mère) Mariah Carey.

Elle est douée Mélanie, je vais m’abonner à son compte. Pas vous ?

Remettre en contexte

Cette jolie vidéo est un exercice de style remarquable. Elle contient tout ce que les réseaux sociaux aiment : 

  • une véritable personne dans son environnement
  • un animal aimant et innocent, star des réseaux sociaux qui plus est
  • un chat dans une situation cocasse
  • un intérieur « normal » avec une vie banale
  • des restes de vie – les bouteilles d’alcool
  • une musique de circonstance
  • peu d’actions 
  • des actions courtes et brèves
  • des messages subtilement distillés ici et là

Quels messages Mélanie peut-elle bien avoir envie de nous faire passer ?

Voici le lien vers la vidéo de Mélanie https://vm.tiktok.com/ZM8cc4UQj/ sur le réseau social TikTok.

Pardon, de Marine… Marine Le Pen, renommée Mélanie pour l’occasion.

Marine Le Pen en compagnie d’un bon ami pose pour un selfie

Sur cette photo, Marine Le Pen pose à gauche (décidément) de Ruuben Kaalep, suprémaciste blanc assumé néonazi, homme politique estonien.

Marine Le Pen est, depuis quelques années, dans un exercice de dédiabolisation du parti fondé par son père, Jean-marie Le Pen.

Il faut rappeler que le fondateur du Front National a notamment qualifié les chambres à gaz de “détail de l’histoire”, entre autres sorties très contrôlées. Certes, la façade du château a été repeinte. Le parti de La Celle-Saint-Cloud s’appelle maintenant Rassemblement National, mais il n’a pas changé son message. Seule son image, notamment auprès des jeunes, a évolué.

Cet exercice trouve son accomplissement ici. Le message que passe cette vidéo est celui d’une femme « normale » dans un environnement banal. Cette femme a des préoccupations normales et a une vie normale.

Bref, la normalité dans tout ce qu’elle a de plus dangereux.

De plus stigmatisant et de plus excluant de l’anormal. Celui qui n’a pas ce beau logement propret en colocation. Celui qui n’a pas cet arbre de Noël bien chrétien. Celui qui n’a pas ce joli chat.

Cet autre que nous sommes tous dès lors que nous ne sommes pas dans la norme, c’est lui, uniquement lui que cette vidéo pointe du doigt. C’est sous son menton que la main tendue de la candidate se pose pour lui rappeler qui est force et autorité.

Il n’y a pas d’altérité dans cette vidéo, malgré la tentative. L’altérité nécessite que l’autre soit accepté dans toutes ses caractéristiques et ses différences. C’est l’altérité à la façon de Platon.

Ce que nous propose Marine Le Pen ici, c’est la lecture grecque de l’autre. Celui qui n’est pas de la cité est un non-citoyen et s’il ne parle pas la langue, c’est un barbare.

L’occupation des réseaux sociaux pour la campagne des élections présidentielles à venir va être un élément de victoire déterminant. Le candidat pathétique “Z” l’a compris et ne se prive pas de faire participer une cohorte de comptes pour porter sa parole.

Marine Le Pen lui doit énormément d’ailleurs, il a décalé de plusieurs cases la position de la candidate vers un terrain bien plus acceptable et propre sur lui.. Ou l’extrême droite glamourisée et banalisée.

Sans épine sur le sol.

Latifa Ibn Ziaten, femme parmi les mères

Souvent cantonnée au personnage de mère ayant perdu un enfant, Latifa Ibn Ziaten est bien davantage que la victime collatérale du terrorisme est de la violence. Il nous a semblé utile, à quelques mois d’une échéance électorale majeure, de parler avec la femme qui incarne le mieux, en France, la notion de pardon.

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Pour beaucoup, Latifa Ibn Ziaten est uniquement la maman du soldat tué par un terroriste en 2012, porte-parole à la fois du pardon et de la résilience.. mais qui se cache derrière cette mère à jamais blessée ?

Latifa, qui êtes-vous ? 

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Je suis une femme Marocaine née à Tétouan. À l’âge de 40 jours, j’ai quitté le Maroc pour rejoindre l’Espagne, où je suis restée jusqu’à 9 ans.” commence Madame Ziaten. “Le couple que formaient mes parents battait de l’aile et, à cette époque, la société marocaine acceptait mal le divorce. Ma Grand-mère, notamment, mettait énormément de pression pour qu’elle demeure en couple malgré tout. C’est donc sous la double menace d’un mari mal-aimée d’une part et d’un entourage familial assez peu bienveillant qu’elle a fait le choix d’immigrer, avec ses 4 enfants, pour un pays inconnu, du jour au lendemain” justifie-t-elle.

Remariée en Espagne, Madame Ziaten mère aura un cinquième enfant. Tombée gravement malade, elle devra retourner au Maroc pour trouver quelqu’un qui pourrait s’occuper de la fratrie. À son décès, c’est tout naturellement le père naturel des enfants qui va en récupérer la garde : “Ma mère décède au moment de Noël et nous retournons vivre chez mon père naturel. Il m’interdit l’école et me traite comme la bonne à tout faire de la maison. Je voulais devenir enseignante ou avocate, il m’a empêchée de réaliser mes rêves” poursuit Latifa qui décide de revenir vivre chez sa grand-mère, avec pour seul objectif de quitter ce foyer insupportable.

À 17 ans, Latifa se marie. Choc dans la belle famille, vie difficile sans loisir ni distraction. C’est à 18 ans qu’elle quitte le Maroc avec son époux et s’installe à Rouen (Seine-Maritime). Confrontée à une nouvelle langue – Latifa ne parle pas encore le français – et une nouvelle culture, l’immigrée comprend que dans la France de la fin des années 60, elle est celle qui allait devoir s’assimiler : “Je voulais m’adapter et aller vers les gens. J’avais en tête qu’étant celle qui est venue, c’était à moi de changer et de me fondre dans le moule de ce nouveau pays”. Coup de chance ou hasards des attributions de logement, elle rencontre un voisinage qui l’aidera à vivre et devenir la femme qu’elle est en 2021 : “Mes voisins d’alors étaient des personnes extraordinaires que je n’oublierais jamais. Ils m’ont aidé à sortir de chez moi, à vivre tout simplement. En plus de m’aider à parler et à écrire le français, ils m’ont appris à faire du vélo, à aller faire des courses et à me sentir libre dans le pays des Droits de l’Homme. Je les ai perdus de vue avec le temps, 40 années ont passé depuis, malheureusement”.

Je voulais construire ma famille

Les lois Pasqua sont en place en France et interdisent aux femmes de couples immigrés de travailler. C’est par contrainte plus que par choix que celle qui voulait plus que tout respecter son pays d’accueil doit travailler au noir. Elle fait des ménages tout en retournant étudier. Avec un objectif en tête : “Je voulais bâtir ma vie, construire ma famille.

Alors que son entourage la décourage de le faire, Latifa passe son permis de conduire et l’obtient. Achat d’une camionnette, elle part vendre des fruits et des légumes sur les marchés normands avec l’aide de ses enfants. Épuisée à la fois par des horaires contraignants et par des revenus aléatoires, celle qui doit en plus s’occuper du foyer (on ne parlait pas encore de charge mentale dans les années 70) préfère aller travailler en usine, obtenant des horaires et un revenu plus stables.

Un de ses enfants lui parle de “ces dames qui font à manger dans les écoles”. Toujours prête pour une nouvelle aventure, la rouennaise dépose sa candidature en tant que femme de service à la mairie de Rouen. Elle est embauchée par l’administration locale. Le hasard faisant bien les choses, elle bénéficiera d’une promotion au moment du départ à la retraite de la cuisinière.

« Ne t’en fais pas, on mangera à la marocaine ! »

Moment totalement improbable dans la magie de l’existence de cette femme “Je ne savais pas faire la cuisine française” nous explique Latifa avec cet intarissable bonne humeur “j’ai dû improviser ! » « Ma chef, à qui j’ai expliqué cette crainte, m’a répondu ‘Ne t’en fais pas, on mangera à la marocaine’« . Grand bien a pris aux deux femmes. Les enfants mangent ce que la cuisinière leur propose et semblent aimer. C’est avec son étonnante capacité à apprendre qu’elle découvrira les habitudes alimentaires françaises au fil du temps. Quinze années passées comme cuisinière à la mairie de Rouen, puis une dizaine d’années supplémentaires après le passage en “liaison froide”. La cuisinière qui prenait plaisir à préparer de bons petits plats aux enfants passe à l’industriel.

Survient un accident domestique, première rupture dans la vie de Latifa. Elle perd son coude gauche et se retrouve dans l’incapacité de porter les barquettes alimentaires. Recasée au musée des beaux-arts de Rouen en tant que surveillante et agent d’accueil, c’est dans un éclat de rire que Latifa nous explique son fonctionnement, toujours aussi intelligent, alors “Je ne connaissais ni les œuvres exposées ni les peintres. Je faisais mine de mal comprendre les questions des visiteurs pour les rediriger vers mes collègues, tout en écoutant les réponses de ceux-ci et en apprenant les tableaux et leurs auteurs”. Restée durant deux années à ce poste, Latifa ajoute une corde à son arc, l’art pictural.

La vie de Latifa va être bouleversée

Pour Latifa, la vie s’arrête vers 16 heures, un dimanche, sur les contreforts du magasin Le printemps. Son fils, Imad, a rendez-vous pour la vente d’une moto sur un parking proche de Montauban. Le militaire français est froidement exécuté d’une balle en pleine tête.

La Latifa d’aujourd’hui n’est plus la même” commente la maman devenue orpheline de son fils “Imad avait quelque chose en lui. Nous avons voyagé ensemble avec une telle complicité que certains pensaient que nous étions mariés l’un avec l’autre. Nous étions tous les deux totalement fusionnels. Imad était un garçon remplit de rire, de vie et d’espoir. Il avait plein d’idées et aimait son métier, il a voyagé à travers le monde sous l’uniforme et a dégusté ce monde et la famille. La famille était importante pour lui. Il témoignait de tout ce qu’il vivait. La famille était au cœur de sa vie.” continue Latifa.

Imad m’a laissé un vide énorme, que je remplis du bien pour les autres.” explique la femme blessée.

Latifa n’a que deux options, s’effondrer ou rebondir. Seule cette seconde alternative est acceptable pour celle qui a connu bien des galères dans son existence. Mais pour cela, il faut trouver une énergie, de vie : “Mon énergie, c’est Imad, mon fils [Latifa parle alors au présent, NDLR.]. Mon fils, c’est un garçon qui était ma moitié. Il savait détecter si je n’allais pas bien au simple timbre de ma voix. Il me connaissait et je le connaissais. J’ai 5 enfants, et chacun est différent. Ils sont comme mes doigts, on a besoin de tous ses doigts pour vivre. Aujourd’hui, toute ma force, c’est d’aller vers l’autre et de donner de l’importance aux gens. J’ai envie de donner de l’espoir aux autres. Je veux aider les autres à prendre leur vie en main.” termine Latifa.

Le combat qu’a entamé Latifa ce dimanche du mois de mars 2012, elle l’a toujours eu chevillé au corps. C’est une détestation viscérale que la Femme a contre les injustices de ce monde. 

Y-compris lorsqu’elle travaillait dans le milieu scolaire : “Lorsque je travaillais dans les écoles, je me battais contre l’injustice. Lorsque je voyais un prof punir un gamin dans un couloir en le laissant seul, je le signalais. C’était injuste de l’empêcher d’apprendre, je n’avais pas peur. Ce n’est pas faire preuve de courage que de dénoncer les injustices, c’est une force de caractère. La perte de mon fils a créé une force supplémentaire en moi, je pense qu’il y a quelqu’un derrière moi qui me motive et me pousse à faire les choses.

A propos de son combat, la maman nous explique avec beaucoup de lucidité “Je suis dans un combat de paix. Je me lève et je rencontre des jeunes tombés dans cette secte.

De quelle secte parle Latifa ? 

Cette secte” commence-t-elle ”c’est un groupe de gens qui se disent Musulmans. Ils utilisent le nom de la religion pour instiller dans des esprits devenus faibles la haine et la détestation des autres.” 

Latifa précise, comme s’il était nécessaire de le rappeler en 2021 “Musulmane, je suis d’abord française, je respecte avant tout la république.

L’Islam ne demande, à l’instar de toutes les religions, aucunement de tuer ou de sacrifier qui que ce soit. C’est une religion de paix et d’amour que certains dévoient. » insiste Latifa.

Fallait-il le rappeler ? 

La famille, terreau vers la radicalisation

Je suis entrée dans beaucoup de familles de gamins qui ont dérivé. J’ai appris beaucoup de choses en les analysant.” explique la maman « Dès le début, leurs familles sont instables. La vie familiale n’est pas construite, peu importe sur quoi, d’ailleurs. Il manque des fondations, comme pour tout édifice.” 

Latifa analyse “Les parents venus de l’étranger veulent souvent reproduire le modèle de leur pays d’origine en France. Les enfants de ces familles sont livrés à eux-mêmes, car les parents ont d’autres occupations. La chance se provoque et il faut aller la chercher. La chance d’être né ou de vivre en France n’est due qu’aux droits que nous donne ce pays“ poursuit-elle.

C’est à la maison que tout débute

C’est à la maison que tout débute et il n’est pas là question de richesse ou de fortune. Tout est une question d’éducation, de dialogue et d’échange. Si on n’est pas présent à sa famille, autour d’une table avec les enfants, il ne faut pas s’étonner qu’ils aillent chercher une présence ailleurs. Il existe une confusion aujourd’hui ; l’amour, ce n’est ni un téléphone ni une tablette. C’est l’échange.

Quelle mécanique est mise en place par ces groupes sectaires pour parvenir à laver le cerveau de ces gamins que la société laisse échapper ? 

La délinquance est le fruit du rejet. Les gamins rejetés (par l’école, par les adultes, par le voisinage…)  rencontrent un recruteur de cette secte qui va leur donner un petit billet contre un crime. Ils vont d’abord garder un peu de cannabis contre quelques euros. Puis, petit à petit, les recrues étant de plus en plus nombreuses, un groupe va se former, recréant une cellule familiale. Dans ce groupe, un semblant de dialogue et d’échange existent, au service d’un objectif criminel, toujours. L’organisation de ces groupes est précise, certains les envoient faire du mal aux autres, d’autres servent à former au crime tandis que certains servent à inculquer une lecture toujours déformée du Coran. Ils agissent comme de vrais centres de formation, avec des sujets et des thèmes de formation et se repassent les élèves entre groupes” explique celle qui a, avec le temps, acquis une lecture extrêmement précise des mécanismes d’endoctrinement de ces groupes.

Le dérapage commence très tôt, sans doute à l’école maternelle

Si certains finissent par passer à l’acte, tous passeront par la case prison, souvent pour des délits mineurs. Ces détenus, Latifa les a rencontrés eux-aussi, elle en parle avec clairvoyance “Dans les prisons, je suis très triste de voir qu’il y a beaucoup d’enfants maghrébins. Il y en a de trop et je ne comprends fondamentalement pas pour quelle raison ils sont autant sur représentés. Ils ont, eux aussi, un cerveau et sont, eux aussi, intelligents. Je pense que le dérapage commence très tôt, sans doute à l’école maternelle” explique Latifa.

Si, déjà, à la maternelle, les choses ne vont pas, il n’y a pas de raison pour que cela s’améliore avec le temps. Pour autant, l’institution école fait son travail. Elle alerte et dit aux parents que les choses ne vont pas bien. Seulement, certains enseignants abandonnent trop tôt, pour de multiples raisons. C’est triste d’entendre un enseignant de maternelle dire qu’un gamin est perdu.”

Loin de l’angélisme béat, Latifa ne tire pas à boulets rouges sur les institutions pour autant “La prison est là pour rappeler les règles et insister sur la nécessité de les respecter pour la vie commune. Elle ne le fait pas et recrée les modèles de non-communication et d’exclusion qui préexistaient dans la famille. Les valeurs et les codes sont là pour le bon fonctionnement des enfants.

Pour justifier son propos, Latifa cite un exemple qu’elle a connu : “j’ai été invitée à une conférence dans un superbe foyer. Tout était neuf, de beaux meubles, de beaux locaux. Un des jeunes me demande si je veux rester manger avec eux. J’étais très honorée de cette invitation, le partage du repas est très symbolique. Je suis restée avec eux avec énormément de plaisir.” commence l’ancienne cuisinière à la mairie de Rouen.

Le repas préparé, une marmite est amenée sur une table avec des spaghettis d’un côté, de la sauce tomate de l’autre” décrit Latifa.

Ces enfants se servaient comme des animaux. Ils utilisaient tous le même matériel pour se servir. Il n’y avait aucun plaisir ni aucun amour dans la relation qu’ils avaient de leur repas, avec ce plat préparé sans partage de plaisir. Ce qui tombait de la louche sur le sol y restait, sans qu’aucun de ces jeunes ne prenne le temps d’essuyer. D’ailleurs, avec quoi l’auraient-ils fait ?

Ce comportement” poursuit Latifa “ne choquait personne, pas même le directeur. Je me suis permise de lui faire la remarque qu’ils – ces jeunes – ne pourraient jamais trouver leur place à l’extérieur de la structure avec de telles attitudes. Il n’avait jamais fait attention à ce comportement, il n’y voyait que des attitudes adolescentes m’a-t-il expliqué.

Illustration par l’exemple du fond du combat de Latifa :” il faut enseigner à nos enfants les règles. Et celle du repas est nécessaire. Les règles sont des bases communes.”

Les jeunes de ce foyer, Latifa leur a parlé au cours de ce repas aussi. “Ils ont compris que je m’adresse aux enfants qui sommeillent en eux” explique-t-elle.

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Vous mangez parce que vous avez faim, pas pour apprécier ce que vous consommez. Pensez qu’autour de la table, vous pouvez rire, parler, échanger et débattre. Le repas est un moment important.” leur a expliqué Latifa, avant de les remercier chaleureusement pour l’invitation, forme de respect donné à ces jeunes “qui n’en reçoivent que trop rarement” explique la maman.

La société, les prisons, les écoles, les foyers sont ainsi, selon ce qu’explique Latifa, responsables de cet endoctrinement mortifère. C’est obvier nos responsabilités individuelles et penser que ce méta-organisme, l’État, existe en autonomie, hors sol.

Que devons-nous, en tant qu’individus dans la société, faire pour éviter le dérapage ? 

Tout commence dans le regard” explique Madame Ibn Ziaten. “Regardez l’autre avec à la fois un sourire aux lèvres et un regard souriant. Le regard, les yeux et le visage parlent. Tout cela, c’est un contact à la fois des cœurs et des cerveaux.” continue-t-elle. “Lorsque je parle avec quelqu’un, je le regarde dans les yeux. Ils me disent s’il est sincère ou s’il est sérieux. Tout se sent dans le regard. Souvent, ces jeunes embrigadés ont un regard froid et vide qui fait peur. C’est en changeant notre regard sur cette jeunesse qu’elle changera son regard sur le monde que nous lui offrons.

La France est un pays de mixités

La relation à la Nation, à la République et au Pays ? 

Nous avons la chance de vivre tous ensemble. La France est un pays de mixités. C’est une richesse, ce sont des valeurs qui ont construit notre beau pays. Si nous arrivions à vivre tous ensemble avec nos histoires, avec nos valeurs et nos traditions, la France sera un super pays. Chacun a une petite pierre, aussi petite soit-elle, à apporter à la société. Non pas pour la rendre meilleure à sa façon individuelle, mais pour la rendre simplement plus belle dans l’ensemble.” résume Latifa. 

Et l’État dans tout ça, quelle est sa responsabilité dans la perte de ces gamins ? 

Latifa nous fournit une brillante définition de ce qu’est être citoyen : “On ne doit pas tout attendre de l’État. En France, il ne surveille pas ce que fait le peuple. C’est cette liberté qui implique une lourde responsabilité individuelle. Dans les administrations, comme on les appelle, chaque personne fait son travail aussi bien qu’elle le peut. Mais si le changement ne vient pas de la population, rien n’évoluera, l’État ne peut pas aller contre la société. Si chacun donnait une partie infime de son temps à l’autre, dans le dialogue, le partage ou l’éducation, tout changerait. Je dis et je répète à tous les Français de se réveiller, nous sommes tous dotés d’un cerveau, il faut l’utiliser pour ne pas aller vers la simplicité du prêt à penser.

Présidentielles 2022, un moment pour changer les choses

À l’approche d’une échéance électorale majeure pour notre pays, nous ne pouvions pas ne pas évoquer la question politique avec Latifa Ibn Ziaten. C’est en tant que citoyenne que nous avons souhaité receuillir son opinion. Au moins trois femmes sont, aujourd’hui, déclarées candidates à l’élection présidentielle (Nathalie Arthaud pour Lutte Ouvrière, Anne Hidalgo pour le Parti Socialiste et Marine le Pen pour le Rassemblement National).

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Que pense la combattante pour la paix, de cette féminisation possible de la plus haute des fonctions ?

“La femme a sa place aujourd’hui” commence Latifa. “La femme est pacifiste, résistante, patiente et ne veut aucunement la guerre. On a besoin d’une femme à la tête du pays, qui aurait la capacité de le gérer autrement, en étant moins dans le combat que ne l’ont été tous les hommes Présidents de la République jusqu’à maintenant.

Je suis là pour défendre cette jeunesse, lui donner la chance de vivre une belle vie

Avant de nous surprendre : ”Je suis là pour défendre cette jeunesse, lui donner la chance de vivre une belle vie.” 

Sur cette phrase énigmatique, il nous fallait des éclaircissements.

Latifa, candidate en 2022 ?

Je commence à m’intéresser à la politique.” nous explique-t-elle. “Je voudrais rentrer un peu plus en politique et travailler à ouvrir la cité. Il faut recréer la mixité au-delà du principe. Ces jeunes qui se radicalisent sont des Français, la société crée des bombes à retardement et les laisse dans la nature. Les choses commencent à changer dans les cités et dans les quartiers, c’est extraordinaire, même s’il faut garder le cap et continuer d’initier le changement” poursuit Latifa.

Je ne suis pas dans la politique, j’envoie des messages aux femmes et aux hommes qui font de la politique. Les messages sont reçus, où que je me trouve. Je suis la porte-parole de cette jeunesse que nous sommes en train de perdre et qu’il faut absolument ne plus laisser glisser” insiste la mère de famille devenue militante par la force des choses.

La politique n’a pas de lien direct avec mon combat contre cette secte. Mais je sais que si on n’implique pas les politiques, les choses ne changent pas. Je vais donc m’impliquer en politique pour travailler avec eux et faire changer les choses de l’intérieur. Il y a des lois qu’il faut changer et faire évoluer. Les lois sont trop souvent vues et vécues comme des vecteurs d’interdiction ou d’obligation, alors que la loi est avant tout une garantie de droits. Il existe des obligations qui doivent être respectées.

Mon Cœur est avec toutes les victimes 

Pour conclure, Latifa a posté, au démarrage du procès des attentats de 2013, un message appelant à ce que la justice soit rendue pour tous. Comment la mère déchirée a-t-elle le courage d’appeler à une justice à laquelle elle n’aura jamais droit ? 

Combattante au nom d’Imad ? 

La justice doit être rendue pour toutes les familles, qu’elles soient du côté des victimes comme du côté des auteurs. Mon cœur est avec ces familles, je sais par où je suis passée et je pense à elles tous les jours.

NDLR : Cet entretien a eu lieu au début du mois de septembre 2021. C’est pour éviter de faire parler notre témoin à une date clé - démarrage du procès des attentats de 2013 - que nous avons choisi de décaler la publication de cet échange.

Flashback, rire avec le féminisme


« Je me suis pris une charge avec Georges Sand ». Au moment où je termine le visionnage de de film, je m’aperçois que Google,  LE google, me propose de remplacer le nom de cette historique féministe par « sans ». Amusante coïncidence, car c’est tout le propos du film « flashback ».

Imaginez-vous transporté à travers l’histoire,  depuis cro-magnon jusqu’à Mitterrand,  à la rencontre des combats féministes et de toutes celles et tous ceux qui les ont fait. C’est cette expérience que propose Caroline Vigneaux. Pour atteindre son but, la réalisatrice utilise l’humour et la dérision, les armes les plus efficaces pour passer les messages qui, en cette vingt-et-unième année du second millénaire n’ont toujours pas été compris.

Lorsque les plateformes de VOD créent

Si vous ne voyez dans les plateformes de vidéo à la demande que de vils distributeurs de séries télévisées à binge-watcher (demandez à l’ado le plus proche, si vous ne comprenez pas vous êtes sans doute trop âgé), sans doute serez vous surpris de constater qu’après l’excellent « Fluctuat nec mergitur » de sa concurrente Netflix, Amazon a créé un vrai beau film, comme le cinéma en manque.

Le message est clair : l’ajustement ses droits, l’équilibrage des possibles sans distinction de sexe, est l’héritage de centaines d’années de combat de femmes et d’hommes qui avaient compris, avant leurs contemporains le plus souvent, que rien ne justifiait qu’on interdise quoi que ce soir au prétexte de ne pas disposer d’un pénis. Les lois les plus iniques (l’interdiction faite aux femmes de porter un pantalon) ont toujours existé et certaines (heureusement, celle ci à été abrogée en 2013) sont encore en place, en France ou ailleurs.

Film et Documentaire

Je vous incite à regarder en famille ce film qui devrait s’appeler documentaire et qui, espérons-le, sera projeté dans les écoles, en cours d’histoire comme d’instruction civique.

La distribution de ce film ne gâche rien. De grands et bons noms d’actrices et d’acteurs (Caroline Vigneaux, Issa Doumbia, Sophie Aram, Sylvie Testud ou encore Gad Elmaleh) servent, à la française,  des rôles (Marie Curie, Robespierre, Olympe de Gouges ou encore Gisèle Halimi) semblent avoir été taillés sur mesure. L’humour y est présent, dans sa juste dose et les contextes historiques, les personnages et les lieux sont tous respectés. On notera au passage la brillante prestation de Sophie Aram dans un plaidoyer qui ne l’est pas moins.

Le film se termine sur un cliffhanger et une question abyssale … que doit donc faire Charlie de sa grossesse ?

En bref, un film à voir, pour rire, se cultiver et, surtout, réviser son féminisme !

Au fait… la charge en question, elle semble avoir bel et bien lieu !

Flashback, à voir en famille sur Amazon Prime

Catherine Lyautey, Grande Maîtresse de la Grande Loge Féminine de France. Une femme au cœur de la franc-maçonnerie.

A 65 ans, Catherine Lyautey est retraitée depuis le 1er juillet “précisément” comme elle se plaît à le rappeler. Cette femme dynamique a mené deux vies professionnelles bien différentes. A ses débuts, Catherine œuvre 20 années dans le domaine de l’horlogerie bijouterie. C’est après avoir vécu de multiples agressions qu’elle décide de raccrocher. Elle entre alors au Ministère de la Recherche et de l’Enseignement Supérieur, où elle travaille en tant qu’Assistante de Cabinet Ministériel.

Catherine Lyautey c, Grande Loge Maçonnique de France

Catherine Lyautey a été élue Grande Maîtresse de la Grande Loge Féminine de France le 29 mai dernier. Pour les profanes, elle est devenue présidente de la plus grande organisation Féminine Franc-Maçonne en France et dans le monde.

L’organisation à la tête de laquelle elle œuvre aujourd’hui possède une particularité. Elle est entièrement féminine. Ses membres, à l’instar de l’ensemble de Sœurs et des Frères maçonnes et maçons, travaillent à forger leur conscience du monde et de la société. Souvent caricaturée, parfois haïe, la Franc Maçonnerie est trop méconnue pour qu’elle ne suscite pas notre attention, qui plus est lorsqu’elle est emmenée par une femme.

Parcours profane et Maçonnique mêlés

Lorsqu’on demande à Catherine Lyautey, de nous parler de son parcours Maçonnique, il est intimement mêlé à celui de sa vie profane. La Grande Maîtresse nous explique : “En 1994, après une énième agression dans la joaillerie où je travaillais, j’éprouvais le besoin ardent d’une rupture. Je sentais que la rupture professionnelle était consommée, mais je sentais aussi qu’elle ne suffirait pas. J’étais en quête de sens, à la recherche d’un chemin et d’un but” commence-t-elle. Avant de poursuivre sur son Histoire sacrée : “Je m’intéressais aux offres de développement personnel, scientologie et autres promesses de mieux-être se présentaient comme autant de réponses, mais l’esprit indépendant que je suis ne se contentait pas de ces bonimenteurs. J’étais en quête, en recherche de spiritualité. J’ai rencontré un Franc Maçon avec qui j’ai longuement échangé de ma quête. Il m’a faite parler et m’a écouté. Il a su me proposer non pas des réponses comme le faisaient la plupart des mouvements à tendance sectaire d’alors, mais d’une nouvelle démarche intime de mon horizon personnel, au travers de la Maçonnerie.” 

Ainsi, la rencontre féminine aura-t-elle été initiée par un homme. “Ce Maçon m’a proposé de rencontrer des femmes de la Grande Loge Féminine de France (GLFF)”.

Le reste, l’histoire parle pour elle-même, comme l’explique Catherine Lyautey : “J’ai intégré la GLFF au sein de laquelle j’ai été initiée. Je ne savais pas précisément qu’il existait, dans la Maçonnerie, des loges mixtes et des loges féminines. Du reste, on ne précise pas “loge masculine”, c’est curieux” commente-t-elle. “Je me suis fortement impliquée dans la vie de mon obédience. Je suis entrée au Conseil d’Administration de la Grande Loge en 2015, puis mes Sœurs m’ont rapidement sollicitée pour que je fasse acte de candidature pour devenir Grande Maîtresse, ce qui est arrivé le 29 mai dernier”.

Rapport à l’être intime de chacun

On pourrait fantasmer la Franc Maçonnerie, victime des images trop souvent véhiculées, bloquée entre des traditions séculaires et des rites occultes. Elle est une relation avec le soi intime, la recherche d’une meilleure conscience du monde et de ce qui le fait fonctionner. C’est ce que nous explique Catherine Lyautey lorsqu’on parle de l’apport que la Maçonnerie a avec l’être intime de chacune : “Pour une femme, être en Maçonnerie fournit un espace de liberté absolue, un lieu à couvert.  Les femmes sont confrontées au besoin de gérer plusieurs choses en même temps : ce qu’on appelle communément la « charge mentale ». Elles sont mamans, épouses, amantes, infirmières et comptables tout en étant pour la plupart devenues des professionnelles dans des secteurs d’activité divers.” 

La Franc Maçonnerie, vecteur de liberté féminine

La Franc Maçonnerie octroie t’elle ainsi aux femmes la liberté que la société ne leur accorde pas ? C’est ce que revendique Catherine Lyautey :

“Les femmes demeurent prisonnières des limites d’expression et de parole que l’histoire a mises en place. Être dans une loge, c’est s’accorder deux fois par mois, au cours des « tenues », un espace réservé. C’est un bastion de liberté absolue pour les femmes. « Être Franc-Maçonne », continue Catherine Lyautey, “c’est aller au plus intime de soi pour essayer d’édifier un monde meilleur. C’est aller à sa propre rencontre pour se connaître soi-même. Avant toute chose cela passe par le regard des autres. C’est cela la démarche initiatique et qui permet ensuite d’agir sur le monde”. La parole est claire, la Franc-Maçonnerie n’est pas en marge, elle s’intègre au monde actuel et ses membres sont avant tout des Citoyennes et des Citoyens.

Comment la Grande Maîtresse définit-elle la cause féminine ? 

« Les fondatrices de la GLFF avaient comme but l’émancipation des femmes à l’aide de la démarche symbolique. Nous continuons d’essayer d’être à la hauteur de la transmission que nous avons reçue, pour la rendre meilleure lorsque nous la transmettons à notre tour. La cause féminine, c’est exiger sa place de femme dans la société. C’est le dessein du travail initiatique en loge que de permettre à chaque Sœur de conquérir cette place. C’est en cela que la Franc-Maçonnerie est une Société initiatique” poursuit Catherine Lyautey.

Initiation, certes, mais comment quantifier l’apport de la libre-pensée à la cause féminine ? 

“Je ne sais pas s’il y a un apport de la Maçonnerie à la cause des femmes”, commence la Grande Maîtresse, “mais ce dont je suis certaine, c’est que chaque Sœur mûrit une réflexion qui lui est propre, elle l’apporte et la partage autour d’elle. Les Maçonnes et les Maçons ont été et demeurent amenés, comme tous les Citoyens d’ailleurs, à réfléchir sur des questions de société. La Franc-Maçonnerie est reconnu par les autorités comme « famille de pensée ». Nous tentons d’exiger toute notre place dans la citoyenneté d’une façon globale.” 

« La société est composée de la religion, aussi », c’est ce par quoi conclu la Grande Maîtresse, “La devise de la République française, Liberté, Egalité, Fraternité devrait être complétée par “Laïcité”, car, généralement, lorsqu’on parle d’absence d’un droit pour les femmes, il y a du fait religieux alentour”.

Penser, réfléchir, se remettre en question… Certes, ce sont des actions bénéfiques à l’individu et à son développement . Cependant, la discrétion volontaire sur les actions de la Grande Loge Féminine de France et de la Franc-Maçonnerie dans son ensemble en empêche la visibilité. Catherine Lyautey nous parle ainsi des actions concrètes de l’obédience qu’elle mène aujourd’hui. 

Fond de dotation « Femmes Ensemble »

“Nous avons établi un fond de dotation “Femmes Ensemble”. Il a pour objectif de soutenir toute action d’intérêt général qui vise à la solidarité, à la défense des droits des femmes et, enfin, au rayonnement des valeurs défendues par la Franc-Maçonnerie féminine. Sans prosélytisme ni publicité. » « Plus récemment” poursuit-elle “Nous avons apporté un soutien financier aux Banques Alimentaires qui ont été fortement mises sous tension au cours de la crise sanitaire que nous traversons. Un grand nombre de nos Sœurs nous ont interpellées sur les difficultés des femmes durant cette période. Encore une fois, cette crise sanitaire aura mis en exergue le fait qu’être une femme représente généralement un handicap supplémentaire lorsque les choses vont moins bien. C’est cette double peine que connaissent les femmes incarcérées, auxquelles nous souhaitons fournir du soutien matériel. 

Enfin, nous sommes partie prenante en communication et en actions chaque année à Octobre Rose en faveur du dépistage du cancer du sein chez les femmes. Individuellement, enfin, nos Sœurs sont, à titre personnel, extrêmement investies dans la vie associative et culturelle dans leurs vies profanes. Leur engagement dans l’obédience est un vecteur de confiance en elles qui fait trop souvent défaut aux femmes. Conquérir cette confiance, c’est oser aborder sa place dans la cité » termine la Grande Maîtresse.

Le Covid a accru les inégalités entre hommes et femmes

La récente crise sanitaire – non encore entièrement achevée – a certainement donné une visibilité accrue à la position des Femmes dans la société.

Qu’en pense la responsable d’une organisation uniquement féminine comme la GLFF ? 

“Les femmes représentent immanquablement la variable d’ajustement dans les crises sociales. Si, au sein de certains foyers, la coexistence imposée par les confinements a pu amener à une prise de conscience des unes et des autres sur le cumul des charges, c’est sur les femmes qu’au cours de cet épisode la société a fait peser la plus grande charge. Y-compris en télétravail par exemple, les femmes effectuent de fausses pauses, interrompant l’activité professionnelle pour aller sur l’activité ménagère par exemple. À distance, il existe une suspicion sur les femmes que les hommes ne connaissent pas. Clairement, un manager pensera qu’une femme s’occupe des enfants si elle n’est pas devant son écran, là où il pensera qu’un homme est en train de préparer un café.”

La Franc Maçonnerie est le reflet de la société

À propos de fonctionnement organique, la Franc-Maçonnerie est un ensemble d’obédiences et de loges qui, si elles embrassent des principes fondamentaux les unes et les autres, disposent d’une approche diverse de la manière d’étudier les sujets en question. Certaines obédiences seront particulièrement symboliques là où d’autres travaillent sur les rites traditionnels. Néanmoins, on peut imaginer que, moderne, la Franc-Maçonnerie ne restreint pas les possibilités d’évolution des femmes en son sein.

Qu’en est-il réellement ? 

“La franc-maçonnerie est le reflet de la société” commence Catherine Lyautey. “Lorsque vous entrez dans la Maçonnerie, vous pénétrez une association d’êtres humains. On peut parfois être déçu par un maçon, jamais par la méthode maçonnique. Il y demeure les mêmes problèmes que dans le reste de la société. Certaines obédiences [Le Grand Orient de France NDLR.] viennent de s’ouvrir à la mixité, c’est positif. Sauf que le plateau de secrétaire a quasiment systématiquement été donné à une femme. L’excellente nouvelle c’est que cela change, car les femmes n’ont pas envie de reprendre ces seuls rôles. Il ne faut pas se représenter la Franc-Maçonnerie comme hors-sol ou hors-société, elle représente une partie de la société car elle est faite de personnes, des mêmes personnes qui constituent la Cité au sens littéral du terme. »

La Grande Maîtresse de poursuivre “Dans la société actuelle, l’homme n’octroie pas sa place à la femme. Nous, les femmes, devons devenir bien plus conscientes de nos capacités que nous ne le sommes. Nous devons cesser d’élever nos filles dans ce schéma de soumission inconsciente aux hommes. Le poids des années et des traditions est immense, il faut que les femmes apprennent à déconstruire les clichés. Inconsciemment, il faut que les femmes se libèrent de ces chaînes-là. Pour y parvenir, il faut que les femmes travaillent sur elles, échangent entre elles et avancent. Il faut rappeler les messages aux femmes, remettre sans cesse l’ouvrage en question et essayer de l’améliorer. C’est en ce sens que la Loge est un endroit idéal pour travailler, individuellement et entre Sœurs sur la manière de transmettre les messages que les femmes veulent passer.”

Les femmes plus jeunes tendent à oublier les combats des précédentes

Les droits des femmes sont, aujourd’hui, largement supérieurs à ce qu’ils étaient il y a à peine 50 ans. Tout est gagné ? 

“Je me rends compte en parlant avec des femmes plus jeunes qu’elles pensent que les choses sont acquises. Les générations actuelles sont conscientes des combats qui ont été menés et remportés, tout en pensant que c’est acquis et que plus rien ne pourra régresser. C’est une erreur majeure, car il suffit qu’une crise économique arrive pour que les droits changent vers la moins-disance. Les femmes doivent perpétuellement demeurer vigilantes pour conserver les droits acquis par les générations précédentes et combattre pour ces droits. Les actions récurrentes de tous les intégrismes religieux sont la démonstration que tout peut se perdre. Vigilance, donc !”

La Franc Maçonnerie est un parcours intime

Qu’est-ce qui, en 2021, peut mener une femme à s’intéresser à la maçonnerie ?

“Il y a dans notre société actuelle florilège d’offres de coaching, de développement personnel et autre travail psychologique sur soi. Les femmes doivent être extrêmement attentives sur ce qui est proposé et s’assurer que certaines frontières ne sont pas franchies. La Franc-Maçonnerie n’offre pas de prêt-à-penser, elle est un questionnement perpétuel. La loge et le travail en son sein engendrent une remise en cause permanente de ce qu’on pensait. C’est une société initiatique. Elle apporte, je crois, une réponse éclairante à toutes celles qui se questionnent sur le monde et sur leur place en son sein, en recherche de spiritualité. C’est à présent aux Maçonnes et aux Maçons de s’extérioriser pour parler de ce qui est proposé, de ce qui se fait et de ce qu’il est réalisable d’apporter et de trouver dans la démarche Maçonnique.”

La Franc-Maçonnerie, une société pas si secrète..

La Franc-Maçonnerie est assez peu visible, c’est certainement ce qui peut engendrer cette impression de société secrète. C’est, du reste, un des principes de fonctionnement de l’organisation.

 Est-elle encore adaptée aux nouveaux modes de communication ? 

“Nous ne sommes assurément pas une société obscure ou encore secrète” rétorque Catherine Lyautey. “Nous sommes discrètes car nous représentons une association pas comme les autres, autant prendre la parole nous-mêmes pour parler de qui nous sommes. Qui mieux qu’une maçonne peut parler de la maçonnerie ?” Développe la représentante de la GLFF. « Et c’est un fait (Tout relatif NDLR), aucune association, quel qu’en soit l’objet, ne communique sur les membres qui la composent. Pourquoi la Franc-Maçonnerie française serait-elle enjointe à le faire ? »

Il faut que les femmes prennent leur place, toute(s) leur(s) place(s) !

La nouvelle Grande Maîtresse de la Grande Loge Féminine de France a-t-elle un dernier message à passer ? 

“Il faut que les femmes prennent leur place, toutes leurs places. Il ne faut pas attendre qu’on la leur laisse, elles doivent la prendre. Être Franc-Maçonne apprend à pouvoir s’exprimer, à acquérir un esprit critique La loge demeure un espace de liberté, d’écoute respectueuse et de bienveillance entre nous. Que les femmes aillent au-dehors et prennent leur place, dans toute son intégralité, sans crainte des erreurs, des railleries ou des blocages. »

Elle ajoute Une de nos pionnières disait “je suis une femme ordinaire avec une exigence en plus”.

« Nées pour surfer », un hommage aux femmes qui font le surf

Loin du cliché tenace du surfeur blond à la peau tannée par le soleil et les embruns, les femmes, font le surf et font du surf. Ce sport, si masculin, attire de plus en plus de mamans, d’exploratrices, de globe-trotteuses ou encore d’activistes qui font changer le regard du grand public et c’est tant mieux !

L’hommage que Carolina Amell rend à ces femmes est beau et émouvant.

Carolina Amell est graphiste freelance créative. Elle est tombée amoureuse du monde de l’édition et plus particulièrement des livres illustrés et de l’aspect créatif que requiert leur création. Sa sensibilité de graphiste est criante de beauté dans le livre qu’elle nous présente ici, hommage en forme d’ode aux femmes qui pratiquent le surf.

Elles sont photographes, réalisatrices, globe-trotteuses, entrepreneuses ou « mamans professionnelles » et entretiennent toutes une passion en commun, aller glisser sur l’océan. Entrer dans la vague qui donnera ce shoot d’adrénaline tant attendu, cette sensation de risque. Mesuré, certes, mais risque quand même.

Surfeuses et femmes

Qu’on ne s’y trompe pas, ces femmes engagent autant d’énergie à la pratique de leur sport que le font les hommes. Pas de protection supplémentaire, de soins ou d’artifices de sécurité, les femmes que Carolina présente prennent en réalité bien plus de risques que leurs homologues masculins. Elles mènent leurs vies de femmes, leurs vies de revendicatrices, pour certaines, et leurs vies sportives de haut – très haut – niveau.

Leur philosophie, leurs motivations, elles les expliquent en complément de splendides images, beautés réelles et charnues. Charnues comme les vagues, charnues comme la houle, charnues comme de vraies femmes, loin des clichés anorexiques d’ordinaire portés pour vendre quelque vêtement sans âme.

De grands noms au service d’une cause noble

Si ces femmes parlent et témoignent de leur passion, c’est pour délivrer un double message au sein de cet ouvrage. De front, elles soutiennent la voix de l’océan, militent pour la préservation et le respect de cet écosystème si vulnérable qui anime leurs feux sacrés. En tant que femmes, elles forcent le respect dû à toutes celles et à tous ceux qui ont osé. Osé aller dans la vague, oser saisir cette chance dont Séréna Lutton dit “Dans la vie, la seule chance qu’on a est celle qu’on se donne”.

En définitive, ce ne sont pas 36 portraits de 36 femmes ou de 36 surfeuses, que nous propose ce beau livre, touchant et captivant de Carolina Amell. Au delà du genre et des clmichés, ce sont 36 portraits d’êtres humains qui entretiennent en commun une passion.

Nées pour surfer

  • Édition Glénat
  • 22 x 28,5 cm
  • 242 pages
  • 39,50 €
  • EAN : 9782344042922

Victoria Secret à l’écoute des femmes. Entretien avec la styliste Sophie Malagola.

C’est décidé, Victoria’s Secret, LA marque de sous-vêtements féminins par excellence va, enfin, s’intéresser à ses clientes. Plutôt, nous annonce-t-elle, elle va cesser de satisfaire les hommes qui dictent ce que les femmes doivent porter. 

Après tout, il n’est jamais trop tard !

La marque de référence des sous-vêtements féminins, enfin celle qui fut la marque de référence des sous-vêtements féminin, l’Américaine Victoria’s Secret, a annoncé qu’elle allait cesser d’écouter les hommes dire ce qu’ils veulent voir les femmes porter (et donc quelles femmes ils veulent voir le porter) et accepter ses clientes dans leurs demandes, leurs diversités et leurs envies.

En outre, la marque annonce prendre pour égéries un collectif de 7 vraies femmes (Le Collecfif VS), soutenir la lutte contre le cancer du sein … Bref, redorer une image bien ternie par de nombreux scandales, de la déformation de l’image réelle des femmes à d’obscurs liens avec le pédo-criminel Jeffrey Epstein, Victoria a décidément bien de secrets à expier !

Victoria Secret

Nous nous sommes entretenu avec une styliste française, Sophie Malagola, pour mieux saisir l’évolution de l’enseigne aux défilés grandioses.

Sophie a travaillé pour de grandes marques françaises (la Redoute, Etam …) et a un regard extrêmement précis sur les évolutions, les tendances et les revirements du domaine.

Son credo ?

« Être au plus près du corps des femmes, accompagner chacune d’entre elle au quotidien

Sophie Malagola

Une marque qui a besoin de se rénover

A propos du message de Victoria’s secret, la styliste nous explique : “Il faut réellement avoir en tête pour commencer que Victoria’s Secret va mal. La marque éprouve un besoin intense de remise en question, mais elle le fait aujourd’hui avec beaucoup de retard.« 

Elle ajoute :

A la décharge du management de Victoria’s Secret, c’est une entreprise colossale, un paquebot difficile à manœuvrer. Victoria’s Secret n’est plus une marque à proprement parler, c’est devenu un nom générique. Au-delà des discours maladroits qu’on a pu entendre de la part des dirigeants de l’enseigne, le modèle sur lequel s’est bâti le succès du géant a périclité. Les gigantesques défilés ont été remplacés par d’intimes présentations à l’ambiance feutrée et, ça, les responsables de l’enseigne ne l’ont pas vu venir.

De nombreuses erreurs de communication

De gros échecs de communication, aussi. C’est ce que nous explique Sophie : “Les grosses entreprises ont tendance à oublier que leur modèle est fragile. Elles se reposent sur ce qui fonctionne et ont tendance à considérer le marché avec dédain. Victoria’s Secret a laissé faire sans réagir des reportages qui montraient les entraînements des filles avant les défilés. On se serait cru dans l’armée au point où c’était brutal et dégradant pour l’image des femmes.

Finalement, ce message de Victoria’s Secret, pinkwashing

La tendance de la féminisation et de l’attention portée aux femmes n’est pas récente, que ce soit dans le domaine de la lingerie ou ailleurs. Mais le message porté par la marque est à double tranchant, on nous explique que jusqu’alors, les femmes étaient effectivement incapables de choisir leur lingerie, car il fallait parler aux hommes. Autrement dit, c’est refouler les clientes fidèles de la marque d’une part sans jouir de la capacité à attirer celles déjà fidèles à une autre marque. On a connu une meilleure stratégie, y-compris de pink washing !” Conclut-t-elle.

Changement de paradigme dans la manière dont la lingerie s’affiche, tout va en conséquence aller mieux dans le meilleur des mondes ? 

“Il faut prendre garde à l’excès inverse qui peut arriver. Il est naturellement nécessaire que toutes les femmes soient représentées dans les catalogues, sans distinction de forme, d’âge, de couleur de peau ou d’ethnie. Mais il faut être extrêmement prudent avec les messages sous-entendus, notamment avec une représentation systématique d’une forme d’obésité. Les créateurs comme les communicants endossons une responsabilité majeure lorsque nous passons un message. L’obésité comme l’anorexie sont des maladies mortelles qui mettent en souffrance, ce n’est pas ni une mode ni une tendance Nous ne devons pas normaliser une souffrance.

Attention aux appels à l’obésité

Et de conclure “Il faut faire très attention aux modèles qu’on offre, les extrêmes sont toujours dangereux.”

Tout bien considéré, nous sommes face à un non-évènement, une simple remise des choses en perspective ? 

Depuis longtemps” explique la créatrice “on fait porter des vêtements dans les catalogues à des hommes d’âge mûr. C’est aussi, car la population vieillit qu’on n’a pas le choix. Pour présenter des produits à des femmes âgées, on va faire appel à des mannequins plus âgés. Et, par la force des choses, les corps de ces femmes seront différents de ceux que les marques utilisaient dans les années 80-90. Ceux-là étaient déjà réels et ressemblaient à de femmes authentiques. Puis est arrivé Photoshop et toutes les dérives qu’on a connu. Il a donné naissance à des femmes qui, en fait, n’existaient que dans l’imaginaire des hommes que, justement, des enseignes comme Victoria’s Secret écoutaient. Donc pas de tremblement de terre ici, juste un retour au réel. Et c’est tant mieux, car le réel est ce qui se fait de mieux dans la vie !

Sophie poursuit :

Depuis la nuit des temps, les femmes plaisent aux hommes, c’est génétique. Dire qu’on va satisfaire les femmes et arrêter d’écouter les hommes comme le fait Victoria’s Secret, c’est remettre en cause la capacité d’intelligence donnée aux femmes. Leur aptitude à choisir ce qu’elles vont porter, pour elles et selon leurs envies. Celles qui ont envie de porter du sexy peuvent le décider, celles qui veulent porter du quotidien peuvent aussi le faire. Généralement, du reste, ce sont les mêmes. La richesse véritable, la véritable révolution, c’est de s’adresser à toutes les femmes dans toutes leurs envies.

À vouloir être trop différentes, les marques d’aujourd’hui ne perdent-elles pas leur âme ?

Sophie nous explique “En effet, tout tend à se ressembler. De fameuses marques françaises ont décidé d’abandonner la communication traditionnelle et ont abandonné les classiques. Il faut respecter sa marque tout en évoluant avec son marché et les attentes de la clientèle. Parmi les basiques actuels, on sait qu’on doit utiliser et proposer du recyclé. On doit proposer du sens à sa marque. En tout, il faut nécessairement bâtir et conserver son image de marque tout en la faisant évoluer, lentement et sans à-coups. Et, en tous cas, sans feu d’artifice comme tente de le faire Victoria’s Secret !

Elle ajoute “Il faut garder à l’esprit que la population tend à vieillir et que cette génération de femmes a connu la communication à l’ancienne. Elle a besoin de retrouver dans ses marques de prédilection les codes qu’elle connaît, elle risque de se perdre autrement.

Un message à adresser aux lectrices et aux lecteurs de Brillante Magazine, Sophie ? 

En 2021 plus que jamais, une femme peut choisir d’être élégante quand elle le veut, sexy quand elle en a envie et à l’aise à d’autres moments. Il n’y a pas un type de femme et, surtout, pas un univers permanent dans les envies d’une femme. Et, aussi, qu’une femme possède l’intelligence nécessaire pour choisir ses sous-vêtements.

Et à Victoria’s Secret ?

Malgré tout, le marché de la lingerie peut adresser un immense merci à Victoria’s Secret. Leurs défilés ont donné de la visibilité à la lingerie et toutes les marques en ont bénéficié et en bénéficient encore.” À propos de la marque en elle-même, Sophie termine “On peut ne pas aimer telle ou telle marque, mais le marché dans son ensemble a profité de Victoria Secret et doit cette reconnaissance honnête.

200 nanas sur 200 kilomètres à vélos, une randonnée 100% féminine

C’est le 26 juin prochain qu’un BRM (Brevets de Randonneurs Mondiaux) d’un genre singulier va prendre le départ. 100 % réservée aux femmes, la 200 nanas sur 200 kilomètres s’élancera dans une boucle depuis et vers Pantin (Seine-Saint-Denis). Nous sommes allés à la rencontre de son organisatrice.

« 200 nanas sur 200 kilomètres« . Il fallait oser le titre et la réservation d’une compétition, les cyclistes l’ont fait.

Itinéraire de la randonnée prévue

L’Audax Club Parisien organise, le 26 juin prochain, cette randonnée originale qui partira de Pantin. Les sportives – car c’est bel et bien de sport qu’il s’agit – rejoindront Gisors avant de descendre vers Vernon. Viendront par la suite Cergy puis retour au départ, à Pantin.

Elisabeth Lavail, organisatrice de la 200 nanas sur 200 kilomètres (Photo : John Kovalsky)

L’itinéraire de 200 kilomètres doit être couru en moins de 13 h 30 pour que les compétitrices puissent valider le BRM. Mais comme le précise l’organisatrice Elisabeth Lavail “La validation de ce brevet ne doit pas représenter une fin en soi. L’idée est de passer une journée amusante et en sécurité.” Celles, donc, qui veulent aller à toute allure sont les bienvenues, les autres le sont tout autant.

Pour autant, pas de classement, juste le plaisir de faire une balade entre pratiquantes. Celles qui réussiront en moins des 13 h 30 réglementaires obtiendront le précieux sésame, les autres auront passé un moment plaisant et en sécurité entre filles.

Un principe déjà existant

L’intérêt d’une telle compétition ? C’est Elisabeth qui nous l’explique : “J’ai réellement fait un rêve, dans lequel je voyais des centaines de filles se présenter au départ et pas un seul homme. C’est une vision que j’ai eue de ce que je devais organiser. Ce n’est pas la seule ni la première course féminine. Au sein de la FFVélo (la Fédération Française de Cyclotourisme), plusieurs organisations travaillent, à l’instar de la “Toutes à Vélo” à Toulouse à ce que les femmes soient aussi présentes que les hommes. Mais il ne s’agit pas d’une course militante, je ne suis pas féministe, juste une femme membre d’une fédération. Mais toutes les filles ne sont pas adhérentes à la fédé, la dimension de loisir est une composante majeure du cyclotourisme”.

Femini-Washing de la Fédération Française de Cyclisme

Si comparaison n’est pas raison, la seconde fédération de cyclisme (la Fédération Française de Cyclisme, qui organise le Tour de France) dispose, sur son site internet, d’un espace totalement dédié aux femmes. Elle y parle de son “plan de féminisation 2018 – 2021” et des efforts qu’elle s’engage à réaliser pour combattre les agressions sexuelles faites aux femmes. Sous d’autres cieux, dans cet espace, elle annonce les événements qui, au sein des régions, sont destinés aux femmes.

Aucun événement, en 2021, n’aura lieu dans le cyclisme dédié aux femmes aux sein de la FFC. Gageons que la crise sanitaire aura empêché l’organisation de ces compétitions.

Une randonnée interdite aux hommes

Le principe de la « 200 nanas sur 200 kilomètres » veut que seules les femmes disposent du droit de s’inscrire et le droit de s’arrêter aux 3 points de ravitaillement présents sur le parcours. Les hommes peuvent naturellement accompagner les participantes et y prendre part (l’itinéraire est libre et ouvert) mais ne peuvent en aucune manière prendre part ni aux ravitaillements ni à l’obtention du Brevet. Ce qui tranche, avec les autres sorties vélos au cours desquelles, de manière générale, seules 5 à 10 % de femmes prennent part.

“L’Audax Club Parisien, club organisateur de la « 200 nanas » est une structure associative” nous explique Elisabeth. Et comme dans toute structure associative “Il a fallu que je présente mon projet qui venait proposer quelque chose de novateur. Le fait d’être une femme portant un projet féminin était vu comme un point positif au sein du club”. Et c’est exactement sur ce point qu’elle brille, l’organisatrice. Partant d’un rêve, elle a monté l’organisation, les principes et les règles d’un brevet qui compte d’ors et déjà 295 femmes inscrites sur les 200 initialement prévues.

Les Brevets de Randonnée Mondiaux sont des certificats officiels émis par le Club auquel appartient Elisabeth Lavail. Elle nous en développe le principe “C’est en 1904 que Henri Desgranges, le père du Tour de France, crée les brevets Audax Cyclistes. Il s’agissait de parcours de 200 kilomètres effectués à une vitesse de 18 Km/h sous la conduite d’un capitaine de route. Le principe demeure, sauf qu’il a acquis une forme mondiale. Aujourd’hui, ces brevets existent dans plus de 30 pays, sur les 5 continents, toujours gérés par mon club.”

Une organisation totalement bénévole

Elisabeth est brillante. Elle souhaite transmettre sa passion et son envie d’action. Bénévole, elle met énergie et motivation au service de sa passion et en profite, de manière plus ou moins volontaire, pour faire la promotion active des sports au féminin.

Clara Fortin, portrait d’une jeune navigatrice hémophile en quête de normalité

Tout sourire, rayonnante et heureuse. C’est l’image qu’on a immédiatement de Clara lorsqu’on la rencontre pour la première fois. Cette normande est bourrée de projets, d’idées et d’envies. Elle bouffe, aujourd’hui, ce quotidien que la vie ne lui a pas toujours rendu rose. Elle est atteinte d’une maladie rare chez les femmes, l’hémophilie et a subi les affres d’un corps médical encore sous informé.

“C’est à l’âge de 8 ans, alors que mon papa de 40 ans a besoin d’une intervention chirurgicale que toute la famille a été testée et que moi, j’ai tiré le gros lot”. C’est la manière dont Clara parle de cette anémie qui l’accompagne au quotidien. Elle a appris à vivre avec cette maladie génétique qui affecte aussi les femmes. “Les femmes sont vues comme correctrices du gène provenant de l’homme” nous explique Clara. “L’hémophilie est portée par le chromosome X. Les hommes dont ce chromosome est atteint déclarent invariablement la maladie. Porteuses de deux de ces chromosomes, les femmes peuvent en n’ayant qu’un seul chromosome atteint, atténuer voir corriger ce déséquilibre chromosomique.” ajoute-t’elle.

Clara, Enfant

Navigatrice et militante associative

Il faut reconnaître que cette maladie ne lui a pas fait de cadeaux à Clara. Aujourd’hui, membre active de l’AFH (association française des Hémophiles), la navigatrice a appris à dompter et mettre en place les parades contre les manifestations de cette caractéristique qui présente un impact fort sur la coagulation. Elle nous explique “Lorsqu’une personne saigne, le sang est programmé pour coaguler, former un caillot et que le saignement cesse rapidement. Lorsqu’on est hémophile, ce n’est pas le cas, le sang demeure liquide et emporte avec lui tous ses composants importants”.

Les règles, moment critique

Ce sang trop liquide demeure le même que le corps libère au moment des règles. C’est là l’une des premières difficultés que Clara a rencontrées. “Je ne compte plus le nombre de fois où, au collège, je me levais de mon siège avec les vêtements tachés de sang. De ce sang qui, en même temps, emportait le fer de mon organisme ainsi, en plus de me faire remarquer, je souffrais d’anémie” détaille Clara.

Les médecins remettent en cause les symptômes. Les gynécologues sont désarmés ou parfaitement incompétents. “On m’a proposé de cumuler pilule, stérilet, tampon et serviette” nous explique la jeune femme. À croire que le confort n’est qu’accessoire, surtout à 14 ans !

Des explications à fournir

Lors de chaque rentrée des classes, le manège recommence pour l’adolescente. “Mes parents allaient rencontrer le directeur et les enseignants, je devais être présentée comme la malade de service. Et je devais expliquer, les saignements de nez, les règles abondantes, les tâches inévitables. Je me sentais punie à la fois par la maladie et par la société qui me demandait de justifier le fait que je sois malade.” Difficile de s’assumer malade : “Je me sentais normale avec juste une particularité, c’est les autres qui me voyaient malade” conclue Clara.

Adolescence difficile donc. Et inconséquence des spécialistes de santé. Clara errera de cabinets médicaux en consultations spécialisées. “Au cours de leur formation, les professionnels de santé apprennent que l’hémophilie est une maladie masculine uniquement, un peu comme le daltonisme. Ils ne comprennent ainsi pas la violence des premières règles ni la véracité de la maladie”. Et les remèdes ne sont pas nombreux : “J’avais le sentiment d’être un cobaye à qui on proposait d’expérimenter une solution innovante, que ce soit chez les gynécologues ou les généralistes”.

Un accident gravissime

Clara ne renonce pas pour autant à son envie de vivre ce qui attise sa hargne. Elle pratique le handball à haut niveau. Jusqu’à une blessure majeure, à l’âge de 18 ans. “Je me cogne et tombe dans les pommes. Là où pour tout le monde ç’aurait été une simple bosse, ce fut, pour moi, un traumatisme crânien.” Le diagnostic médical tombe, une nouvelle fois. « Une interdiction totale des sports de contact” nous explique la sémillante athlète. “Mais je ne me voyais pas rester sur le canapé à avaler des chips” termine-t-elle. Par chance, la famille possède un voilier qui a, durant son enfance, permis à la Granvillaise de voguer les dimanches après-midi le long des côtes normandes. Cela sera par conséquent la voile.

Clara à la barre de son bateau

Clara vise haut. Elle ambitionne à la fois de réaliser la Transat Jacques Vabre, la fameuse Route du Rhum et pourquoi pas un jour, le Vendée Globe. Tout en menant tambour battant un apprentissage qui aurait certainement fait perdre la motivation au premier venu.

Au quotidien.. la maladie

Avec la maladie pour ligne de fond, la vie quotidienne a besoin d’être adaptée. Depuis l’achat de protections à foison jusqu’à la protection des angles de porte dans les bateaux, Clara adapte son cadre de vie à la maladie. Et demeure hésitante. Elle testera toutes les méthodes, la coupe menstruelle – la moins mauvaise méthode selon elle d’ailleurs – les serviettes ultra-absorbantes ou l’accumulation des solutions. Clara va vivre six années de galère, à la recherche d’une solution qui stabilisera sa jeune vie de femme et lui autorisera une vie de maman, une vie de couple. Une vie “normale” en somme !

Clara Fortin Crédits

C’est en 2017 que se dessinera une solution. Clara rencontre une hématologue qui lui propose un modèle particulier de stérilet à implant de cuivre qui bloque totalement les règles. La jeune femme passe de règles qui duraient deux semaines complètes avec parfois à peine un à deux jours de pause entre les cycles à l’arrêt total du cycle menstruel. La femme retrouve un équilibre de vie. Vie de couple, vie sociale.

Association Française des Hémophiles

Clara rencontre les membres de l’AFH. L’association est dotée d’une commission Femmes qui porte justement les questions spécifiquement féminines. Puberté, règles, mais aussi sexualité, vie de couple et grossesse sont des sujets d’étude et de travail de Clara au sein de la structure. Clara nous explique “Le regard sur les règles a évolué aujourd’hui. Ce n’est plus un tabou ni une punition biblique pour la plupart des personnes, c’est un état normal. On peut donc parler plus sereinement sans avoir l’impression de gêner son interlocuteur” explique Clara.

Éviter des années de galère

“Je veux éviter aux jeunes femmes frappées d’hémophilie les années de galère et d’errance que j’ai connues » ajoute la militante. “Je veux expliquer aux jeunes femmes ce qui les attend. Je voudrais vraiment leur éviter ces années de galère en leur fournissant les outils et les spécialistes adaptés à la question.. Les femmes doivent être incluses et comprises dans la maladie. Et pour y parvenir, il faut que la maladie soit connue. C’est la raison pour laquelle nous avons lancé, en avril dernier, la première journée mondiale de l’hémophilie, au cours de laquelle nous communiquons sur son existence et témoignons, toutes et tous, de ce qu’est l’hémophilie”.

Une vie normale, ou presque

En 2021, la vie de Clara, tend à se normaliser, ou presque. “Aujourd’hui, je vis normalement avec ma maladie” nous explique la skippeuse. “J’ai adapté ma pratique de la voile pour minimiser les blessures. Par exemple, les angles sont protégés, je porte systématiquement des genouillères ou des gants pour éviter les blessures. Au quotidien, le risque est d’oublier qu’on est malade et de prendre des risques. Heureusement ou malheureusement, le moindre bobo, la moindre coupure ou le moindre hématome est là pour rappeler au malade qu’il a cette différence en lui, c’est évident !” conclut la sportive dans un éclat de rire.

Clara & Martin, son compagnon visent une vie de couple, comme les autres, au-delà de la maladie

La vie de femme, Clara l’aborde en connaissance de cause aujourd’hui. Elle veut des enfants et vivre aussi normalement que possible. Pour y parvenir, elle doit s’assurer que les médecins qu’elle côtoie sont au courant de la maladie et en connaissent les impératifs. “Pour un accouchement par exemple, hors de question pour une personne hémophile d’avoir une péridurale.” En effet, l’aiguille est de dimension trop importante et le risque d’œdème interne comme externe trop important avec un facteur de coagulation trop diminué.

Et vient la question cruciale. Transmettre l’hémophilie à son enfant ? “C’est un risque mesuré et identifié. J’ai envie d’avoir un enfant, mais je n’ai pas encore répondu à cette question centrale. Je sais que le risque existe, c’est le point où j’en suis de ma réflexion. Je sais aussi que, dans tous les cas, je devrais prêter attention à la sur-protection de cet enfant. Je ne veux pas lui faire porter un casque dès sa naissance !” Termine-t-elle.

Clara a une philosophie positive sur sa maladie. À propos des conseils qu’elle pourrait donner à une autre hémophile, elle nous explique “On [les femmes, NDLR.] n’a pas de difficulté, juste une particularité. Il y a des adaptations et des modifications à accepter dans le quotidien pour vivre avec, ne pas se battre contre. Il ne faut pas s’arrêter à la maladie, il faut adapter ses objectifs et trouver des solutions pour avancer. Dire que les choses sont compliquées ne fait pas avancer, dire qu’elles sont particulières ouvre l’esprit.”

C’est ce que Clara a fait, avec brio d’ailleurs. Elle a de multiples projets dans son sac à dos. ”Je voudrais réussir mes projets sportifs, à commencer par la Transat Jacques Vabre cet automne et la Route du Rhum, l’an prochain. Ensuite, je mène ma barque professionnelle, je dois trouver ma place dans le monde de la course au large, que ce soit en tant que concurrente ou en tant qu’encadrante de projet. Et trouver mon équilibre de vie, affective, sentimentale. Et familiale, je veux fonder un foyer, avoir des enfants et une vie. Simplement normale.”

Le handicap n’est qu’une particularité, pas une caractéristique

S’il fallait un mot de la fin, Clara sait nous le donner : “Le handicap comme la maladie ne sont que des particularités. Il ne faut pas ranger chaque personne dans une case. La voile est un sport mécanique dans lequel tout le monde peut s’exprimer. Peu importe qu’on soit handicapé ou non. Damien Seguin a fait le Vendée Globe avec une main en moins. Médiatiquement, il est coureur avant d’être handicapé. Il en va de même avec toutes les différences, on est ce qu’on fait avant d’être ce qui nous particularise”.

Clara, nous te souhaitons bon vent !

Van Gogh : une veuve si discrète

Vincent, Théo. Il en va de certains prénoms comme de certaines pièces. A peine percevons-nous les premières notes d’une mélodie que tout un monde se crée dans nos esprits. Si l’histoire se souvient des correspondances entre les deux frères Van Gogh, elle a oublié le travail essentiel d’une femme, Jo Van Gogh-Bonder, l’épouse de Théo.

Jo van Gogh-Bonger ,Amsterdam , April 1889 (Photo:Wikipedia/Woodbury_and_Page)

Lorsqu’un marchand d’art rencontre une professeur d’anglais, que l’un vit dans l’ombre d’un frère à l’esprit fatigué et l’autre dans les traces d’une famille conservatrice, élevée dans les principes de compromis et de discrétion des protestants bataves, le mélange est extrêmement compliqué à faire prendre et à faire tenir. 

Ne ne pas faire de vague, culte familial de la discrétion.

C’est en 1885 que Théo Van Gogh rencontre Johanna Bonder, surnommée Jo. À la seconde de leurs rencontres, Théo est tombé éperdument amoureux de l’enseignante. Difficulté, elle est déjà en couple et respectueuse de ses engagements sentimentaux. Peu encline à l’impulsivité et aux décisions hâtives, elle fera patienter son prétendant durant deux années avant d’accepter sa demande en mariage.

Passionnés l’un comme l’autre de vie et des autres, le couple aime à échanger et dialoguer. Théo, notamment, s’exprime avec insistance à propos de son frère, Vincent. Le marchand d’art ne cesse de parler du caractère torturé du peintre de génie. Il sème, sans le savoir, dans l’esprit de Jo les graines d’un chemin de vie qu’elle suivra jusqu’à son décès, en 1925. Concrètement, l’appartement qu’habite le couple se remplit des lettres reçues par Théo et des toiles offertes par Van Gogh.

Théo veut un enfant. Vincent naîtra quelques mois plus tard. 

En 1890, le génial peintre décède, dans des circonstances encore peu claires aujourd’hui. Suicide ou assassinat, la vérité ne sera certainement jamais connue. La disparition de Van Gogh mène Théo dans une déchéance tant psychologique que physique. C’est en 1891 que Théo Van Gogh meurt. Il laissera en héritage à son épouse pas moins de 400 toiles et plusieurs centaines de dessins et croquis du peintre torturé. Et une importante correspondance entretenue entre les deux frères Van Gogh.

Seule, Jo part s’établir à Bussum, aux Pays-Bas, où elle envisage de fonder une maison d’hôtes. La vie culturelle y est abondante, Jo souhaite trouver l’endroit idéal pour porter la parole qu’elle sent vive de son beau-frère, malgré les recommandations d’Emile Bernard qui lui propose de laisser toutes les toiles à Paris. C’est ainsi chargée de toute l’œuvre de Van Gogh qu’elle prend la route de la Hollande.

Convaincue de la valeur du travail de son beau-frère, Jo Van Gogh-Bonder se lance dans un apprentissage du monde des Arts. Elle écume les galeries et les collections pour s’acculturer de ce monde masculin des marchands d’art. 

Portrait de Jo Van Gogh-Bonger en 1925 par Isaac Israels (Photo : Flickr/Niels)

Elle ne désespère pas devant les portes fermées, les éclats de rire ou les moqueries. Jo dépouille les correspondances entre Van Gogh et Théo. Ce dernier, organisé et méthodique, a conservé l’ensemble des lettres reçues du peintre. Van Gogh, lui, dans la folie de son art, aura été moins ordonné dans la gestion de son courrier. Peu importe, Jo s’imprègne de la peinture de son beau-frère et de ses mots. Elle conscientise peu à peu la valeur inestimable de l’œuvre que les unes et les autres constituent, inséparables. Les lettres de Van Gogh sont écrites comme il peint. Annotées et complétées, comme pour donner à ses écrits la clarté complète de ses tableaux. Ce n’est pas pour rien qu’en 1888, en Arles, alors qu’il sombre de plus en plus dans la folie, Gauguin écrit à Van Gogh qu’il est “plus doué en réalisme qu’en peinture”.

Mise en pratique du marketing artistique

Stratège, Jo se forme. A l’art, avec la lecture, notamment, du journal Belge “L’Art Moderne” qui positionne les arts comme des formes d’expression politique. Elle entretient son féminisme socialiste dans la lecture de Mary Ann Evans, pro-féministe Anglaise qui a écrit sous le pseudonyme Georges Eliot.

Ce n’est que lorsqu’elle portera en elle la conviction d’avoir atteint la compétence à aller porter la parole de Van Gogh que Jo s’autorise à aller proposer le travail du peintre. 

Cette conviction, elle va l’acquérir à la lecture scrupuleuse de l’ensemble de la correspondance entre les deux frères, lecture qui lui offrira l’outil de décodage de l’œuvre de Van Gogh. Elle comprend que les peintures et les écrits sont indissociables les uns des autres pour constituer une œuvre complète.

Elle explique, dans son journal “Il [Théo NDLR.] ne m’a pas confié qu’un enfant. Il m’a légué le travail de Vincent et la tâche de le faire connaître”. Ce journal, il aura été conservé sous clé par sa famille jusqu’en 2009. La première entrée que l’adolescente de 17 ans coucha sur le papier était annonciatrice d’une vie qu’elle voulait différente. “Je trouverais terrible de devoir dire à la fin de ma vie que je n’ai vécu pour rien, que je n’ai réalisé rien de superbe ou de noble.”

L’agent du peintre se lance. Elle va à la rencontre du critique d’Art Jan Veth. Le promoteur de l’expression individuelle, pourfendeur de l’art académique, condamne de prime abord le travail de Van Gogh. Il se déclare “repoussé par la violence pure de certains tableaux” allant jusqu’à qualifier le travail de Van Gogh de “presque vulgaire”. Comme si une telle critique n’était pas suffisante, Jan Veth a certainement peu goûté le fait qu’une femme désire pénétrer le monde de l’Art. C’est ce que laissent penser les écrits de Jo qui, dans son journal intime, explique “Nous, les femmes, sommes pour une part considérable ce que les hommes attendent que nous soyons”. Mais la stratège a décelé chez le critique un potentiel à apprécier le travail de Van Gogh, elle termine sur “Je ne jouirais pas de repos aussi longtemps qu’il n’appréciera pas son travail.”

Elle adressera ainsi au critique d’Art une sélection des lettres de Van Gogh, incitant l’intellectuel à considérer les œuvres picturales au travers du prisme de ses écrits. Intelligente, elle ne va pas sur le terrain de la critique d’Art, mais sur celui des sentiments et de l’humain. Jo remporte une première victoire lorsque Veth écrit à propos des tableaux et de l’œuvre de Van Gogh qu’il voit “l’étonnante clairvoyance de grande humilité” et qualifie Van Gogh d’artiste qui “recherche la racine lointaine des choses”. Il conclut sur une note qui atteste de la justesse de regard de Jo “Une fois saisie sa beauté, je peux à présent accepter l’Homme dans son ensemble”.

Ce succès engrangé, Jo va à la rencontre de Richard Roland Holst, un peintre, pour lui demander de l’aider dans la promotion du travail de Van Gogh. À son propos, Holst écrira à un de ses amis “Madame Van Gogh est une femme charmante. Mais rien ne m’est plus déplaisant que de remarquer une personne s’agiter frénétiquement à propos d’un sujet qu’elle ne maîtrise pas”. Elle aura gain de cause. En décembre 1892 Holst soutiendra Jo dans l’organisation de la première exposition entièrement consacrée à Van Gogh à Amsterdam.

Femme avant d’être belle-sœur, Johanna poursuit sa vie

Johanna Bonger, veuve de Théo van Gogh, avec son fils et son second mari, Johan Cohen Gosschalk (1873-1912). (Photo : Wikipedia/Thomon)

Johanna Van Gogh ne néglige pas pour autant sa propre vie. Elle fréquente le peintre Isaac Israëls qu’elle quitte, car il refuse de se marier. Ultérieurement, elle adhère au parti socio-démocrate des travailleurs Hollandais et est co-fondatrice d’une organisation travailliste et de soutien aux femmes. Puis elle se marie avec un autre peintre batave, Johan Cohen Gosschalk.

Quadrilingue (néerlandais, français, anglais et allemand), Jo n’éprouve aucune difficulté à entrer en relation avec des propriétaires de galeries et autres organisateurs d’expositions aux quatre coins d’Europe. En 1895, alors qu’elle a 33 ans, ce sont pas moins de 20 tableaux de Van Gogh que le marchand d’Art Ambroise Volard inclut à son exposition. Dans le même temps, un groupe de jeunes peintres d’Anvers demande à emprunter des toiles pour mettre en valeur leur propre travail.

Devenue experte en Art, Jo applique des principes de marketing aux expositions des créations de son beau-frère. Lorsqu’une pièce majeure est exhibée, elle est systématiquement entourée de tableaux moins éclatants. Elle parvient ainsi à proposer aussi ces tableaux. Mieux, elle instille lentement les œuvres du peintre hollandais en Europe, veillant minutieusement à la quantité des peintures exposées à un même moment. Ainsi, à Paris en 1908, alors qu’elle expédie 100 tableaux pour être exposés, elle stipule qu’un quart de ces pièces ne sont pas à vendre, créant ainsi une bronca chez les marchands d’Art. La frêle héritière hésitante de la fin du XIXe siècle s’est muée en Générale d’armée conquérante au début du XXe.

En 1905, arrive la consécration. Elle organise, au sein du Stedelijk Museum d’Amsterdam ce qui, aujourd’hui encore, reste la plus grande concentration d’œuvres du peintre de tous les temps. Elle a la sensation que le moment est venu de frapper fort. Se rappelant des difficultés des premières années lorsqu’ aucun critique n’accordait de crédit au travail qu’elle leur présentait, Jo préfère gérer l’intégralité de l’évènement. Elle loue elle-même les galeries, imprime les affiches et va elle-même acheter les nœud-papillons du staff.

Elle demande à Vincent, son fils alors âgé de 15 ans, d’écrire les cartons d’invitation. Au résultat, 484 tableaux de Van Gogh sont exposés au cours de ce majestueux évènement. Le cours des peintures est, en l’espace de quelques mois, multiplié par 3 dans toute l’Europe.

C’est après avoir fait le tour du monde plusieurs fois pour promouvoir l’homme Van Gogh tout autant que ses tableaux qu’au début des années 1920, Jo voit sa santé décliner. Atteinte de la maladie de Parkinson, elle s’installe dans un appartement d’Amsterdam. Entourée des siens et souffrante, elle passera le reste de ses jours à expédier des toiles dans le monde entier pour exposer et faire connaitre le travail de Van Gogh.

Dernier hommage à son beau-frère et son défunt mari, elle fera reposer Théo et Vincent côte à côte, dans le cimetière d’Auvers sur Oise en organisant le déplacement des restes du corps de Théo.

En 1925, âgée de 63 ans, Johanna Gezina van Gogh, née Bonger s’éteint, laissant ses héritiers gérer l’une des plus magistrales œuvres picturales modernes.

Plus de 100 années d’oubli

En 2020, Emilie Gordenker devient directrice du musée Van Gogh. En guise de présent d’accueil, son équipe lui offre la biographie de Jo van Gogh-Bonger écrite par Hans Luitjens. La spécialiste de l’Art Flamand du XVIIe siècle saisit l’intérêt qu’elle a à découvrir le personnage. Elle parle aujourd’hui en ces termes : « Bien sûr, je ne possède pas le talent dont disposait Jo. Mais je pense pouvoir ressentir ce qu’elle a ressenti. Lorsque je prends des décisions, on me fait souvent remarquer ce que je suis. “Tu es une femme, tu fais les choses de façon singulière”. Nous voulons être évaluées sur des idées, mais sommes mis dans des cases. Ce devait être bien pire à l’époque de Johanna, d’entendre dire qu’une chose est impensable, uniquement car c’était une femme”.

La Galerie Van Gogh à Amsterdam (Photo : Flickr/Dennis Jarvis

Inauguré en 1973, le musée Van Gogh était prévu pour accueillir 60 000 visiteurs par an

En 2019, ce sont 2.1 millions de visiteurs qui sont venus admirer le travail du peintre qui, sans les efforts incessants d’une femme pour faire reconnaître le génie de l’Homme serait tombé dans l’oubli.

#RandomBrillante .. pour faire scintiller toutes les femmes

Parce que toutes les femmes sont brillantes.
Parce que le succès couronne toutes les vies.
Parce que vous êtes toutes des stars.
Parce que vous êtes des héroïnes.
Nous vous proposons de célébrer, et pas seulement lors d’une journée, toutes ces femmes, connues comme inconnues, croisées dans la rue, dans les commerces, dans les bureaux…

Sur les réseaux sociaux

Le principe est élémentaire. Sur Twitter, Instagram, Tik Tok, Snapchat ou encore Facebook, après avoir sollicité et obtenu sa permission, vous postez une photo de la femme brillante que vous voulez mettre en lumière. En commentaire, son prénom, la région où elle se trouve et, en quelques mots, la raison qui la rend si brillante à vos yeux.

Vous nous mentionnez dans le post et voilà !

Bienveillance avant tout

Vos déclarations d’amour, vos remerciements, vos mots tendres, vos bravos et vos messages sont les bienvenus. Une règle unique, la bienveillance. Pas d’insulte, pas de plainte ou de reproche. Pas de coordonnées ni de ville non plus.

Une règle absolue, les femmes sont brillantes, toutes les femmes et dans tous les cas !

Les brillantes de la semaine

Chaque mois, la rédac’ de Brillante Magazine se réunira dans le secret et avec le sérieux dont nous sommes capables (et je peux vous dire que nous sommes capables de beaucoup de sérieux), nous sélectionnerons quelques-unes des femmes les plus brillantes et les mettrons en avant sur notre site.

Avant de photographier et de poster, demandez 🙂

Rappelez-vous de solliciter la permission de la Brillante photographiée avant de prendre la photo et de l’informer de sa présence sur les réseaux sociaux. La rédaction de Brillante Magazine n’est pas responsable des photos que vous réaliserez, alors faites-les avec le sérieux d’un enfant qui joue !

Parce que comme le chante Laurent Voulzy, toutes les femmes sont brillantes, nous allons toutes vous mettre en lumière !



Le Ballet de Pennsylvanie célèbre sa fondatrice en oubliant les femmes chorégraphes

La fondatrice du ballet de Pennsylvanie, Barbara Weisberger, nous a quittés en décembre dernier à l’âge de 94 ans. Le ballet qu’elle a créé lui rend cette année un hommage sur le thème “Force. Résilience. Beauté”. Un programme de 11 créations toutes chorégraphiées par… Des hommes !

Humour, maladresse ou inconséquence ? Nous ne saurons sans doute jamais ce qui a guidé le choix de la programmation 2021 du Ballet de Pennsylvanie. En décembre dernier, sa fondatrice, Barbara Weisberger, est décédée à son domicile à l’âge de 94 ans. C’est donc en toute logique que le programme des représentations virtuelles de la dixième compagnie la plus importante des États-Unis, a opté pour un hommage à sa fondatrice mais cette programmation, dont le thème est “Force. Résilience. Beauté.” compte seulement 11 chorégraphies, toutes réalisées par.. des hommes ! Surprenant hommage à une femme !

La programmation de la saison 2019-2020, annulée pour raisons sanitaires, comportait pourtant des pièces chorégraphiées par des femmes. “A Trace of Inevitability” chorégraphié par Yin Yue était, par exemple, prévu au programme. On peut légitimement se demander pourquoi ces créations n’ont pas été reprogrammées pour la saison 2020-2021, qui plus est pour célébrer la fondatrice de la compagnie.

Quelques points positifs sont à relever néanmoins quand à la programmation 2021 du Ballet de Pennsylvanie : le travail de la compositrice Jennifer Higdon est inclus au programme et le casting des danseurs fera la part belle à la diversité ethnique.

Ce n’est du reste pas la première fois que le monde du ballet oublie les femmes. En 2018, les Grands Ballets Canadiens organisaient une soirée sur le thème des Femmes en ne présentant que des chorégraphes… Hommes !

La danse classique souffre, depuis quelques années, d’une perte d’image auprès du public. En 2017, la fondation Wallace publiait une étude “Building Millenial Audience” dans laquelle elle relevait que seulement 3 % des 18-34 ans avaient, au cours de l’année précédente, assisté à un spectacle de danse. Ils représentaient 5 % en 1992.

Barbara Weisberger donnant un cours de danse (Photo : Pennsylvania Ballet)

Il y a 5 ans de cela, le New York Times publiait une étude (Breaking the Glass Slippers) sur la présence des femmes chorégraphes. Cet article décrivait alors le Ballet de Pennsylvanie comme “une exception dans un monde où les femmes chorégraphes sont très peu représentées avec une présence accrue de ces femmes dans la sélection”.
Force est de constater que les choses ont changé et si certaines compagnies ont fourni de vrais efforts pour inclure des créations féminines au sein de leurs programmations, d’autres, à l’instar du Ballet de Pennsylvanie, se sont « endormies sur leurs lauriers ».

Les femmes du secteur maritime : L’Organisation Maritime Internationale (OMI) mène l’enquête.

L’un des moyens pour combattre l’invisibilisation des femmes dans les métiers dits d’hommes est de produire un état des lieux précis et factuel de leur présence et des postes qu’elles occupent. L’OMI lance, en collaboration avec Women International Shopping and Trading Association une étude mondiale sur la présence féminine dans les métiers maritime.

Militaire Israéliennes (©Israel Armed Forces)

Aujourd’hui, selon les chiffres de l’OMI, les femmes ne représentent que 2 % des 1,2 millions de personnes qui travaillent dans le domaine maritime au niveau mondial. Et 94 % de ces emplois se situent au sein du tourisme de croisière.

Les femmes sous-représentées ?

En partenariat avec WISTA (Women International Shippinig and Trading Association), l’OMI entreprend une enquête au niveau mondiale, intitulée Women in Maritime – IMO and WHISTS International Survey 2021. Elle est un des éléments visant à disposer, pour le domaine du transport maritime (fret, passagers, cargo …) d’ une main d’œuvre plus diversifiée et mieux formée. Ainsi, elle sera plus apte à répondre aux évolutions du domaine (autonomisation des bateaux, ports robotisés …). C’est donc en connaissant avec précision la présence et la répartition des femmes dans les métiers du secteur que celui-ci pourra – et devra – se transformer pour être certain d’offrir avec justesse et équité les postes dont il dispose sans distinction de sexe.

Les acteurs clé du secteur se mobilisent

WISTA est une association internationale regroupant des femmes, cadres et dirigeantes d’entreprises du domaine maritime. La branche Française est présidée par Marie-Noëlle Tiné, directrice adjointe du Cluster Maritime Français. L’association se fixe pour objectif de former, intéresser et maintenir les femmes aux postes de direction des secteurs maritime, commercial et logistique.

Cette étude est la suite logique du protocole d’accord qui lie les deux institutions depuis 2020 qui porte sur la promotion et l’inclusion féminine.

Les travailleurs du secteur maritimes invités à participer

Chaque personne qui œuvre dans le secteur maritime, quel que soit son employeur ou son statut, est invitée à venir s’exprimer sur le site de WISTA. Peu importe, également, la localisation de l’entreprise. Pour s’assurer néanmoins que les répondants sont concernés, l’enquête est ouverte aux États membres de l’OMI ainsi qu’aux OIG (organisations Intergouvernementales) ; ONG (Organisations non-gouvernementales) ; entreprises publiques et privées du secteur maritime et établissements de formation maritime.

La répartition des emplois féminins est à étudier(Source : Twitter / Shruti_Vyas @shruti_vyas2706)

Elle se tiendra, selon les engagements pris par le secteur, tous les trois ans et les résultats seront rendus publiques. Cette enquête fait partie de l’engagement numéro 5 du programme Envision2030 de l’ONU. L’engagement en question vise à réduire les inégalités de genre.

Les personnes intéressées ont jusqu’au 30 juin 2021 pour répondre à l’une ou l’autre des versions de ce questionnaire et, ainsi, permettre de mieux connaître le présent pour bâtir un futur plus inclusif.

Et en France ?

Le Cluster Maritime Français mène d’ors et déjà sa propre enquête

En France, le cluster maritime semble faire partie des bons élèves de l’OMI dans le domaine de l’inclusion des femmes. Le secteur réalise, depuis 2013 sa propre enquête nommée “Cap sur l’égalité” et émet par ailleurs une série de recommandations sous la forme de fiches visant à accompagner ses membres dans la mise en place de bonnes pratiques en faveur de l’égalité Femmes / Hommes. Ces fiches se basent sur des applications concrètes testées parmi ses membres dans des domaines allant de la rémunération au recrutement en passant par la gestion de carrière et la formation.

Pour plus d’informations, vous pouvez consulter le site du Cluster Maritime Français  : www.cluster-maritime.fr/

Que peut-on attendre d’une telle enquête ?

Cette enquête et ses résultats n’ont aucune valeur d’engagement, que ce soit pour les entreprises, les organisations ou pour les États qui y répondent. Elle propose un éclairage supplémentaire sur la place faite aux femmes dans un secteur professionnel jusqu’ici plutôt très masculin.

Une étude pour permettre une mise en lumière

Chaque éclairage sur la situation des femmes dans quelque industrie que ce soit constitue un pas en avant vers une meilleure égalité professionnelle entre les femmes et les hommes, quel que soit le secteur d’activité. Le secteur maritime ne fait pas exception à la règle et entend bien promouvoir l’égalité des sexes.